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Retour d’expérience : le repas thérapeutique

L’enquête et le menu

Avant même de demander aux résidents ce qu’ils veulent manger, vous devrez vous renseigner quant aux possibilités d’aide que vous pourrez obtenir du cuisinier : Pourra-t-il vous laisser une place dans le four ? sur le gaz ? dans le frigo ? Pourrez-vous utiliser ses robots et ustensiles ?

Vous devrez aussi vérifier que vous pourrez mener votre atelier cuisine à bien : nombre de tables suffisant, matériel de cuisine, accès facile à un micro-ondes, à une plaque électrique…

Puis il faudra enquêter sur les goûts du groupe de résidents que vous solliciterez. Cet atelier doit plaire à tous. Sinon, comment motiver quelqu’un, sachant qu’il ne se régalera pas ?

Vous ferez un remue-méninges : ils devront donner des idées en fonction des différents plats (entrées, plats, fromages, desserts). Ensuite, vous ferez le tri pour élaborer un menu.

Le mieux serait de garder une seule idée pour chaque thème. Mais dans la réalité, vous verrez que ça n’est pas toujours possible, étant donné les régimes et textures de chacun.

A noter

  • Vous devrez veiller à ce que les plats prévus ne soient pas à base du même ingrédient (taboulé au poulet en entrée et cuisse de poulet rôtie en plat).
  • Vous vérifierez que les plats prévus répondent aux différents régimes et textures : allergies, diabétique, sans sel, sans alcool, sans résidu, normal, haché, mixé…
  • Pour certains plats, vous devrez sûrement prévoir deux idées afin de vous adapter aux régimes et aux textures (ex. : des desserts sucrés pour les personnes diabétiques).

Les courses

Le coût à prévoir pour dix à douze personnes est de 70 € tout compris (cocktail, entrée, pain, plat, accompagnement, fromage, dessert). Le café et le vin seront pris à la résidence.

Vous ferez avant de partir une liste pour répartir les courses à faire entre plusieurs petits groupes. Chacun aura la charge de quelque chose à acheter. Il faut prévoir un accompagnateur avec chaque groupe.

Vous les laisserez choisir, peser, comparer, demander de l’aide auprès des vendeurs. Vous les guiderez par des questions et validerez le choix définitif avec eux. L’un d’entre eux tiendra la liste à jour et cochera ce qui a été pris.

Si possible, prévoyez du liquide pour les laisser payer eux-mêmes.

Attention

Vous ne pourrez pas emmener tout le monde en course. Ainsi, vous prendrez soin de choisir des personnes capables de marcher et de rester debout suffisamment longtemps (au minimum une heure).

Vous pourrez prendre des personnes en fauteuil roulant, mais vous ferez alors attention à la place disponible dans votre bus pour les fauteuils roulants et au nombre de personnes présentes pouvant les pousser dans le magasin.

L’atelier cuisine

Vous devrez prévoir le matériel nécessaire à la réalisation des recettes : saladier, casserole, épluche-légumes, couteau, fouet, plats de présentation, batteur électrique…

Pensez à faire les recettes en fonction de ce qu’il y a à faire cuire pour le midi même (ex. : les viandes ne cuisent pas toutes en dix minutes…). Ainsi, préparez-les en premier.

Organisez-vous avec le cuisinier pour qu’il soit prêt à recevoir votre plat.

Vous ferez tout découper, éplucher, cuire… par les résidents, dans la mesure du possible.

Vous devrez respecter aussi les conditions d’hygiène pendant l’atelier : tablier, charlotte, gants à usage unique… seront ainsi distribués aux résidents. Vous devrez leur imposer ces mesures. Personne ne pourra travailler sans.

A noter

En principe, rien ne doit entrer en cuisine à part les commandes faites par le cuisinier. Cela a pour but de respecter les conditions de conservation, de ne pas couper la chaîne du froid et de ne pas intoxiquer les résidents.

Vous devrez ainsi, avant même de proposer le repas thérapeutique, demander l’aval de votre direction et du cuisinier. Les produits devront absolument être achetés la veille seulement et être conservés correctement.

Vous devrez aussi faire valider l’utilisation de certains ingrédients : les œufs frais par exemple.

Le repas

Prévoyez un lieu qui ne soit pas trop loin des cuisines, de la plonge et du stockage de vaisselle. Par expérience, vous aurez toujours oublié quelque chose… et, de toute manière, vos plats seront généralement tenus au chaud ou au frais en cuisine.

Les résidents pourront aider pour l’installation, la mise de table, et pour débarrasser… N’hésitez pas à les solliciter : ils en seront ravis. D’ailleurs, certains se proposeront d’eux-mêmes. Faites toujours attention à leur faire faire quelque chose en fonction de leurs capacités.

Il faudra prévoir des nappes, des serviettes et une décoration pour faire « comme au restaurant ». Le but de ce projet est effectivement de créer un repas comme quand ils étaient dans leur maison. Mais soigner la table donne envie de manger et peut solliciter ceux qui n’ont pas trop d’appétit. Cela permet aussi de bien s’occuper de soi, de se faire plaisir, de mettre la table comme quand on invite du monde à manger.

Vous présenterez correctement les plats. Si vous avez des plats de présentation dans la structure, c’est merveilleux ; sinon, vous pouvez investir. Certains magasins (Ikea, Gifi, Foir’fouille, Babou…) proposent des prix très attractifs. Mettez les plats sur la table, comme à la maison, et un des résidents fera peut-être le service…

Il sera nécessaire de se faire aider pour être suffisamment nombreux afin que le repas soit moins rapide que d’habitude. Prenez du temps, blaguez… Laissez-leur le temps. Le mieux serait de pouvoir manger avec eux, mais c’est assez difficile quand les résidents ont des capacités différentes : certains doivent être aidés pour manger.

Dans le personnel accompagnant, vous prévoirez un aide-soignant ou un infirmier en cas de fausse route et pour la distribution des médicaments. Plus votre lieu sera éloigné de la salle à manger habituelle, plus une intervention en cas d’urgence sera longue. Nous savons tous que la majorité du personnel est regroupée en salle à manger aux alentours de midi.

Attention

Le repas risquant de durer un peu plus longtemps que d’habitude, il faudra prévoir un lieu proche des toilettes. Certains résidents ont du mal à tenir plus de 30 à 45 minutes sans y aller. Cela serait dommage pour eux de devoir quitter le repas, ils ne voudraient peut-être plus revenir ensuite. Cela arrive souvent.

Avis expert

Cette activité permet aux résidents de devenir acteurs de leur repas, y compris dans la conception : ils sont revalorisés dans leurs savoir-faire, ils expliquent comment ils faisaient chez eux, ils se remémorent les recettes de leurs mères, grand-mères…

On constate souvent une bonne ambiance, les gens rient, tout le monde s’aide et s’entend bien ce jour-là. Les querelles s’effacent pour un moment.

Le plus amusant, c’est qu’on souhaite toujours que ce projet favorise la prise de repas dans de bonnes conditions. On essaye de prévoir suffisamment de temps, de personnel, un lieu agréable et où l’on ne sera pas dérangé… et, pour finir, ce sont les résidents qui nous pressent, qui trouvent qu’on leur laisse trop de temps, que ça ne va pas assez vite !

Malgré tout, ils sont ravis et veulent le refaire à chaque fois.

Ressources

Coût à l’investissement

Il faut compter de 100 à 150 € pour le matériel de cuisine :

  • couteaux ;
  • épluche-légumes ;
  • saladiers ;
  • petits plats passant au four, au micro-ondes… ;
  • plats à tarte, à gâteau, à cake ;
  • verre mesureur ;
  • balance électronique ;
  • batteur électrique ;
  • plaques électriques (peuvent servir, mais non obligatoires) ;
  • casseroles ;
  • spatules et cuillères en silicone.

Attention

Selon un cuisinier travaillant en Ehpad, les ustensiles en bois sont interdits, car même lavés à forte température, ils deviennent de vrais « nids à microbes ». Préférez donc les ustensiles en inox et en verre, voire en silicone pour les maryses.

Coût de fonctionnement

De 50 à 70 € par an, il correspond au montant d’un repas pour dix à douze personnes.

Moyens matériel

Cette liste n’est pas exhaustive, mais c’est un bon début :

  • nappes et serviettes ;
  • plats et cuillères de service ;
  • serviettes adaptées (larges, longues et imperméables) ;
  • couverts adaptés si besoin ;
  • assiettes, verres à pied, verres à apéritif.

Moyens humains

Ils sont à prévoir en fonction des activités prévues pendant ce projet.

  • Pour l’enquête : un voire deux accompagnateurs. L’un mène l’enquête et l’autre s’occupe de solliciter les résidents les moins expressifs.
  • Pour les courses : un accompagnateur pour deux résidents, afin de garantir une sécurité optimale et un risque de chute amoindri. Attention ! Les résidents déments et/ou déambulants auront plus tendance à se perdre. Vous devrez faire très attention à eux.
  • Pour l’atelier : trois accompagnateurs pour dix à douze personnes. Il faut mettre un animateur à chaque table. Vous pourrez laisser seules les quelques personnes qui sont assez autonomes. Il faudra veiller à ce que chaque table ait un travail à faire en fonction des capacités des personnes s’y trouvant. Si ça n’est pas le cas, vous risquez une mise en échec.

Bilan

Le mieux serait de mener ce type de projet plusieurs fois par an, pour qu’un grand nombre de résidents puissent y participer, chacun en fonction de ses capacités. Cependant, cela implique un coût non négligeable qui n’est pas un investissement durable (ex. : un jeu de société qui servira à tous). Il faut avoir cela en tête quand vous irez négocier votre projet auprès de votre direction.

Dans ce cas, vous devrez plutôt vous baser sur l’intérêt du projet, les bénéfices :

  • mise en valeur des résidents ;
  • stimulation sensorielle par le goût, les odeurs, le toucher ;
  • participation aux prises de décision les concernant…

Peut-être existe-t-il la possibilité de prendre ce montant sur le budget restauration : en effet, vous prendrez en atelier dix à douze personnes sur le temps de midi, par exemple. Si le cuisinier n’a pas à prévoir de repas pour eux, le prix peut éventuellement être investi dans votre projet…

Aller plus loin

Foire aux questions

Comment présenter le projet pour qu’il soit plus facilement accepté par la direction ?

Vous pouvez le faire passer dans la programmation de la Semaine du goût par exemple, ou de la Semaine bleue (dédiée à la personne âgée). Cela permet, entre autres, de ne pas ajouter un coût au budget annuel.

Comment intégrer des personnes Alzheimer dans un projet de repas thérapeutique ?

L’intérêt du repas thérapeutique doit être de permettre à tout résident de se réapproprier des gestes autrefois automatiques. Les malades d’Alzheimer devraient donc s’y retrouver à un moment ou à un autre.

En ce qui concerne le repas, on peut réfléchir à la conception de recettes que les personnes souffrant de troubles de type Alzheimer pourront manger seules. Une méthode, le finger food, a été mise au point. Elle consiste à manger avec les doigts pour les personnes qui ont oublié l’utilité des objets, grâce à des plats spéciaux, par exemple des bouchées gélifiées.

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter l’article « Alimentation : le “finger-food” au secours des malades d’Alzheimer ».

Il reste cependant difficile de faire accepter cette méthode, car les résidents semblent manger comme des enfants. Le regard porté par les familles, voire par le personnel, a tendance à assimiler cette innovation à une régression. Des explications préalables sont donc nécessaires.

Bibliographie

  • Jean-Claude Basdekis, L’Alimentation des personnes âgées et la Prévention de la dénutrition, De Boeck, 2004
  • Marie-France Benois, Autour des repas des personnes âgées, DOC éditions, 2009

Sites Internet

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