RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Ministère de la fonction publique
Circulaire du 31 mars 2017
relative à l’application des règles en matière de temps de travail dans les trois versants de la fonction publique
NOR : RDFF1710891C
La ministre de la fonction publique
à
Mesdames et Messieurs les ministres,
Madame et Messieurs les préfets de région,
Mesdames et Messieurs les préfets de département
(Métropole et départements d’outre-mer),
Mesdames et Messieurs les directeurs généraux des agences régionales de santé
Résumé : La présente circulaire rappelle les grands principes de la réglementation applicable aux obligations annuelles de travail, aux autorisations spéciales d’absence, aux modalités d’attribution des jours de réduction du temps de travail, aux heures supplémentaires et aux astreintes.
Le dialogue social entre les représentants du personnel et les employeurs doit permettre de faire du temps de travail un levier essentiel de l’adaptation du service public aux besoins des usagers, avec un examen régulier des horaires d’ouverture des services au public, d’une meilleure organisation du travail et d’une meilleure qualité de vie au travail des agents, grâce notamment au développement des chartes du temps.
Pour diffuser largement la réglementation et sensibiliser aux enjeux liés au temps de travail rappelés par la présente circulaire, la formation et l’information des agents sont des pivots essentiels que les employeurs sont invités à développer.
Enfin, le suivi du temps de travail dans la fonction publique sera renforcé avec le lancement d’un groupe de travail statistique pour définir les indicateurs pertinents et une évaluation de la présente circulaire prévue dans les deux ans.
Mots-clés : temps de travail, conditions de travail
Quinze ans après la réforme du temps de travail, le Gouvernement a souhaité réaliser un état des lieux du temps de travail des agents publics dans les trois versants de la fonction publique.
Remis en mai 2016, le rapport de la mission présidée par Monsieur Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, dresse un bilan de la mise en œuvre de cette réforme dans la fonction publique et émet des recommandations. Ce rapport, d’une part, met en évidence l’impact des spécificités des missions du service public sur les régimes de temps de travail des agents publics. D’autre part, il relève des situations de mauvaise application de la réglementation et insiste sur la nécessité de faire évoluer l’organisation du travail au regard tant des nouvelles attentes des usagers que de celles des agents publics, en rappelant le principe d’exemplarité du service public et de la fonction publique qui l’incarne.
Compte tenu des recommandations émises par ce rapport, un rappel des principales règles encadrant le temps de travail dans la fonction publique s’avère nécessaire. J’invite fermement les employeurs publics, en cas de besoin, au regard de la diversité des situations et des spécificités des missions qui leur incombent et de l’organisation de leurs services, à réexaminer les dispositifs en place sur le temps de travail en poursuivant deux objectifs : adapter les organisations de travail aux besoins des usagers et favoriser une meilleure qualité de vie au travail des agents publics. Cet examen ne pourra être conduit que dans le cadre d’un dialogue approfondi avec les représentants des personnels.
Enfin, la complexité de la réglementation relative au temps de travail suppose une formation renouvelée de l’encadrement et une information régulière des agents. Il est rappelé que le portail de la fonction publique1 fournit tout renseignement utile sur le sujet, notamment en matière réglementaire.
1. Le respect de la réglementation est nécessaire pour garantir l’exemplarité de la fonction publique et l’égalité entre les agents des trois versants.
Il est de la responsabilité des employeurs publics de veiller au respect des obligations annuelles de travail de leurs agents.
1.1 Les obligations annuelles de travail
En application de la réglementation en vigueur2, la durée de travail effectif est fixée à 35 heures par semaine et à 1 607 heures par an.
Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d’une durée annuelle de travail effectif, heures supplémentaires non comprises, pour l’ensemble des agents publics des trois versants. Cette obligation légale constitue le pivot du droit applicable en matière de temps de travail. La durée annuelle de 1 607 heures peut être réduite pour tenir compte des sujétions spécifiques liées à la nature des missions par arrêté interministériel3 dans la fonction publique de l’État, par délibération de la collectivité dans la fonction publique territoriale ou dans les cas précisés par le décret du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l’organisation du travail pour la fonction publique hospitalière. Ainsi il existe des régimes particuliers dans les trois versants de la fonction publique liés au travail de nuit, du dimanche ou les jours fériés, qui justifient des plafonds réglementaires spécifiques.
Concernant plus spécifiquement les collectivités territoriales, celles-ci bénéficient, en application de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 créé par la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001, de la possibilité de maintenir, par délibération expresse prise après avis du comité technique, les régimes de travail mis en place antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 3 janvier 2001 précitée.
Sans préjudice des sujétions spécifiques rappelées ci-dessus, cette faculté doit pouvoir être réexaminée au regard de l’évolution des besoins des usagers et des agents eux-mêmes. Les collectivités territoriales concernées – certaines d’entre elles ont d’ores et déjà engagé cette démarche – pourront revoir les dérogations existantes, dès lors que la démarche est conduite dans le respect du dialogue social avec les représentants des personnels.
1 http://www.fonction-publique.gouv.fr/regimes-de-travail
2 décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature, également applicable à la fonction publique territoriale en application de l’article 1er du décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l’application de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale ; décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l’organisation du travail dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière
3 Décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État et dans la magistrature
1.2 Les autorisations spéciales d’absence
Les autorisations spéciales d’absence (A.S.A) permettent à l’agent de s’absenter de son service alors qu’il aurait dû exercer ses fonctions, lorsque les circonstances le justifient.
Certaines autorisations spéciales d’absence sont prévues par la loi ou le règlement. Elles peuvent être de droit ou accordées sous réserve des nécessités de service.
Il est rappelé le rôle en matière de dialogue social des autorisations d’absence accordées pour l’exercice du droit syndical. À ce titre, comme l’indique la circulaire SE1 2014-2 du 3 juillet 2014 relative à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique de l’État, « il est indispensable que les représentants syndicaux disposent d’un temps suffisant pour remplir leur mission ».
Les autres autorisations spéciales d’absence, mentionnées au travers de circulaires et d’instructions ou de délibération des collectivités territoriales et de leurs établissements publics locaux, constituent une faculté, accordée par le chef de service ou par l’autorité investie du pouvoir de nomination dans la fonction publique hospitalière, en fonction de situations individuelles particulières, et sous réserve des nécessités de service.
Depuis ces quinze dernières années, il a été constaté une augmentation des motifs d’octroi des ASA et, en conséquence, du nombre de jours accordés avec une prise en compte insuffisante de la durée annuelle du travail désormais prévue par la réglementation.
Il appartient au chef de service dans la fonction publique de l’État, à l’autorité investie du pouvoir de nomination dans la fonction publique hospitalière ou à l’autorité territoriale de prendre toutes mesures nécessaires pour garantir le bon fonctionnement de son service4 ; à cet égard, il ne peut accorder d’autorisations d’absence qu’au regard de la nécessité de garantir la continuité du service public, tout en prenant en compte les situations personnelles de chacun des agents.
La réglementation applicable aux autorisations d’absence est rappelée ci-dessous :
4 Conseil d’État, Jamart, 7 février 1936
5 Décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique, décret n° 2014-1624 du 24 décembre 2014 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale, décret n° 86-660 du 19 mars 1986 relatif à l’exercice du droit syndical dans les établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière
1.3 Modalités d’attribution des jours de réduction de temps de travail (RTT)
Dans les trois versants de la fonction publique6, le temps de travail effectif s’entend comme « le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ».
Actuellement, il existe des différences dans les modalités d’application de la réglementation quant à l’attribution des jours de repos compensateurs applicables dans le cadre de l’aménagement et de la réduction du temps de travail (ARTT).
Les jours de réduction du temps de travail (RTT) ne sont accordés qu’en contrepartie d’une durée de travail supérieure à 35 heures hebdomadaires.
Quel qu’en soit le motif, les jours non travaillés – sous réserve de certaines autorisations d’absence, cf. point 1.2 – n’ont pas vocation à être considérés comme du temps de travail effectif et par voie de conséquence, n’ouvrent pas droit à des jours de réduction du temps de travail.
Il revient à l’employeur d’effectuer un décompte régulier des jours de travail effectif et d’adapter les logiciels de gestion du temps de travail disponibles, afin d’être en mesure d’actualiser les droits ouverts au titre de l’ARTT.
1.4 Les heures supplémentaires
Sont considérées comme des heures supplémentaires celles effectuées, à la demande du chef de service, en dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail.
Il est rappelé que les heures supplémentaires ne peuvent être déclenchées que sur demande du supérieur hiérarchique et dans le respect de la réglementation nationale et européenne sur la durée maximale du travail.
Il appartient au chef de service de formaliser sa demande auprès de chacun de ses collaborateurs pour que les heures effectuées soient considérées comme des heures supplémentaires et de veiller au décompte des horaires des agents.
1.5 Les dispositifs d’astreintes
Dans les trois versants de la fonction publique, les astreintes sont organisées pour faire face à des urgences et des imprévus et donnent lieu à des compensations, en temps ou en rémunération, dans des conditions très variables entre les employeurs.
Je vous demande de procéder à une évaluation régulière des dispositifs d’astreintes, en ce qui concerne leur nécessité, leur organisation concrète et, le cas échéant, les modalités de leur compensation, dans le respect des droits des agents mobilisés.
2. Le temps de travail comme levier de l’adaptation du service public aux besoins des usagers, d’une meilleure organisation du travail et d’une meilleure qualité de vie au travail des agents
2.1 L’adaptation continue du service public aux besoins des usagers.
L’adaptation de l’administration aux besoins des usagers et l’adaptation en conséquence de l’organisation des services sont inhérentes au service public et à la fonction publique. Ainsi, un examen régulier des horaires d’ouverture des services au public au regard des besoins des usagers constitue une exigence pour l’ensemble des employeurs publics. Ces derniers sont appelés à poursuivre le dialogue engagé avec les représentants des personnels pour garantir ce principe.
6 Article 2 du décret 2000-815 précité (fonction publique de l’État), également applicable à la fonction publique territoriale (article 1er du décret 2001-623 précité) ; article 5 alinéa 1 du décret 2002-4 précité pour la fonction publique hospitalière.
De même, les services soumis à des variations saisonnières d’activité sont conduits à adapter leurs organisations de travail afin de répondre efficacement aux besoins des usagers mais également de mieux lisser la charge de travail des agents sur l’année.
2.2 La généralisation des chartes du temps.
La circulaire du 8 juillet 2013 relative à la mise en œuvre du protocole d’accord du 8 mars 2013 sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique prévoit explicitement la mise en place « de chartes du temps prenant en compte les nécessités d’organisation du travail et les souhaits des personnels, en concertation avec les représentants du personnel et l’encadrement ».
Sans se substituer aux règlements intérieurs, qui fixent précisément les règles et cycles de travail, les chartes de gestion du temps conduisent à associer étroitement les agents et leurs représentants à la mise en œuvre de la réglementation du temps de travail.
Les chartes doivent permettre une meilleure prise en compte des impacts liés aux technologies de l’information et de la communication sur les conditions d’exercice des fonctions et sur la vie personnelle et préciser les modalités de mise en œuvre du droit à la déconnexion. Elles doivent également garantir l’adéquation entre l’organisation du travail et les besoins des usagers.
L’élaboration des chartes du temps de travail et leur suivi régulier constituent nécessairement un temps fort du dialogue social.
Je rappelle qu’aux termes de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, le temps de travail, parce qu’il est un élément essentiel des conditions et de l’organisation du travail, constitue un objet de négociation entre les organisations syndicales de fonctionnaires et les employeurs.
3. Organiser les formations et informer les agents
3.1 Renouveler la formation de l’encadrement
Au-delà de la formation initiale, quand elle existe, de l’encadrement, qui a vocation à comporter des modules spécifiques à la réglementation du temps de travail, le développement de modules de formation continue est essentiel pour assurer l’appropriation de cette réglementation complexe par les cadres.
De nombreux employeurs se sont d’ores et déjà engagés dans des actions de formation continue, avec par exemple le recours à des sessions spécifiques ou la diffusion de supports pédagogiques. Ces initiatives doivent être généralisées afin de permettre à chaque cadre de disposer d’une connaissance actualisée de la réglementation.
3.2 Les outils d’information des agents
Les agents doivent régulièrement être informés sur la réglementation, en priorité ceux rejoignant la fonction publique. Les outils d’information existants seront recensés par la DGAFP et diffusés aux employeurs.
3.3 Le rôle essentiel de l’encadrement de proximité
L’encadrement de proximité a la responsabilité d’assurer le respect de la réglementation du temps de travail. Il lui appartient également de faire connaitre ces règles aux agents placés sous sa responsabilité.
Pour remplir cette mission, l’encadrement de proximité est appelé à exploiter les données disponibles dans les systèmes d’information RH, à assurer un suivi de la répartition du travail au sein des équipes, à gérer les agents de façon personnalisée et à engager sur cette base une réflexion plus large. Cette réflexion est d’autant plus utile que les processus et organisations du travail ont beaucoup évolué, sous l’effet de la transformation numérique, du développement de nouvelles formes de travail comme le télétravail et de nouveaux modes de management plus participatifs.
4. La pérennisation du suivi statistique
4.1 Un suivi statistique renforcé.
Un groupe de travail se réunira, au 1er semestre 2017, sous l’égide de la DGAFP, afin d’élaborer des outils statistiques pertinents et communs aux trois versants de la fonction publique. Ces outils permettront d’améliorer la connaissance statistique du temps de travail dans la fonction publique, de faciliter les comparaisons entre les trois versants et de mieux cibler les adaptations réglementaires éventuellement nécessaires. L’évaluation du temps de travail dans l’ensemble de la fonction publique sera, grâce à ces outils, organisée à échéances régulières.
4.2 Une première évaluation à échéance de deux ans.
Un bilan de la présente circulaire sera réalisé dans les deux ans à compter de sa publication.
*
Je vous serais obligée de bien vouloir assurer largement la diffusion de la présente circulaire au sein de vos services et en outre, pour les préfets, auprès des collectivités territoriales de votre département et de leurs établissements publics et, pour les directeurs généraux des agences régionales de santé, aux établissements publics de santé.
Informations sur ce texte
Date : 3/ed/vend
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