Base de données juridiques

Effectuer une recherche

Circulaire de la DACG 2008 - 11 G4/ du 9 mai 2008 relative à la lutte contre la toxicomanie et les dépendances

  • Favori

    Ajoutez ce texte à vos favoris et attribuez lui des libellés et annotations personnels

    Libellés

    Séparez les libellés par une virgule

    Annotations

  • Partager
  • Imprimer

BULLETIN OFFICIEL DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE

Injonction thérapeutique

Médecin relais

Stage de sensibilisation

Toxicomanie

Circulaire de la DACG 2008 – 11 G4/ du 9 mai 2008 relative à la lutte contre la toxicomanie et les dépendances

NOR : JUSD0811637C

La garde des sceaux, ministre de la justice à Mesdames et Messieurs les procureurs généraux près les cours d’appel ; Mesdames et Messieurs les procureurs de la République près les tribunaux de grande instance (pour attribution) ; Mesdames et Messieurs les premiers présidents des cours d’appel ; Mesdames et Messieurs les présidents des tribunaux de grande instance ; Monsieur le représentant national auprès d’eurojust ; Monsieur le directeur de la protection judiciaire de la jeunesse ; Monsieur le président de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.

Les dernières constatations effectuées par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) ont montré que la France figurait parmi les pays les plus consommateurs de produits stupéfiants en Europe et qu’il était indispensable que ces comportements, qui ont de graves conséquences tant sur la santé de chacun que sur la délinquance, trouvent une réponse adaptée.

Si la consommation de stupéfiants en France concerne une grande variété de produits, le cannabis est la substance illicite la plus consommée. Ainsi, en 2005, 12,4 millions de personnes ont consommé au moins une fois du cannabis dans leur vie et 1,2 million sont des consommateurs réguliers, dont 550 000 usagers quotidiens. La part des consommateurs réguliers est en hausse. Entre 2000 et 2005 elle est passée de 3,8 à 5,9 % et touche majoritairement les jeunes âgés de douze à vingt-cinq ans (69 % des usagers quotidiens). Ainsi, près de 100 000 personnes sont interpellées chaque année pour usage de stupéfiants, toutes drogues confondues (1).

La consommation d’héroïne, de cocaïne et de drogues de synthèse est le plus souvent à l’origine de prises en charge sanitaires et sociales, qui concernent également les grands consommateurs de cannabis dépendants. Le consommateur d’héroïne peut quant à lui bénéficier d’un traitement de substitution (méthadone ou buprénorphine).

Il convient de noter que la toxicomanie a évolué vers une polytoxicomanie, utilisant le mélange de différentes drogues, médicaments ou substances à l’alcool et on observe par ailleurs une banalisation générale concernant l’usage de stupéfiants, ainsi que l’interpellation d’un nombre important de conducteurs sous l’emprise de produits stupéfiants.

Le volet répressif de la loi du 31 décembre 1970 relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et de l’usage de stupéfiants pose le principe de la pénalisation de l’usage sur la base d’une classification des stupéfiants établie par arrêté du ministre de la santé, en conformité avec les conventions internationales. Cette loi prévoit également un volet sanitaire qui consiste à considérer l’usage de stupéfiants comme une conduite à risque pouvant nécessiter l’intervention de professionnels du réseau sanitaire et social.

La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance dans ses dispositions concernant la lutte contre la toxicomanie, de même que les orientations de politique pénale adressées par le ministère de la justice aux procureurs de la République par la circulaire du 8 avril 2005, confirment le refus du gouvernement de banaliser la consommation de produits stupéfiants. Elle aggrave la sanction dans certains cas (I), elle vise à accroître l’efficacité du traitement judiciaire de la toxicomanie en accélérant et améliorant la prise en charge des consommateurs de drogues par une réponse pénale sanitaire ou pédagogique (II). Il devient dès lors nécessaire de définir une nouvelle politique pénale qui sera systématique, adaptée et diversifiée (III).

I. – UNE AGGRAVATION DES SANCTIONS ENCOURUES

En sanctionnant plus sévèrement la commission d’infractions sous l’emprise de la drogue et en état d’ivresse manifeste, la loi veut réduire les facteurs de passage à l’acte et de récidive.

Cette répression accrue prend tout d’abord la forme d’un alourdissement des peines encourues à l’égard de certaines personnes ou dans certaines circonstances (A) ; elle permet en outre le dépistage de l’usage de stupéfiants dans les entreprises de transports publics (B).

(1) Les statistiques issues du casier judiciaire national montrent une forte augmentation du nombre de condamnations pour simple usage de stupéfiants en 2006 (11 210) qui s’inscrit dans une constante augmentation depuis 2002 (1 494), Ainsi 3 198 condamnations ont été prononcées en 2003, 4 057 en 2004 et 7 862 en 2005

A. – L’ALOURDISSEMENT DES PEINES RÉPRIMANT L’USAGE DE STUPÉFIANTS OU LA PROVOCATION À L’USAGE

Les articles 48 et 54 de la loi ont créé de nouvelles circonstances aggravantes qui ont pour objet l’augmentation des sanctions encourues pour les infractions commises par certaines personnes et dans des circonstances particulières.

1. La loi permet d’apporter une réponse pénale adaptée aux responsabilités professionnelles que peuvent exercer certains consommateurs

L’article L. 3421-1 du code de la santé publique prévoit des peines accrues lorsque l’usage de stupéfiants est commis par des personnes exerçant une profession susceptible de mettre directement en danger la vie d’autrui (transporteurs), ainsi que par des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public lorsqu’ils ont fait usage de stupéfiants dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions. En ce cas les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende.

2. De même, la répression est accrue lorsque la provocation à la consommation de stupéfiants est directe et lorsqu’elle est commise dans des lieux devant faire l’objet d’une attention particulière.

L’article L. 3421-4 du code de la santé publique prévoit en effet l’aggravation des peines encourues lorsque l’infraction est commise dans l’enceinte des établissements d’enseignement, d’éducation ou dans les locaux de l’administration, ainsi qu’à leurs abords à l’occasion de l’entrée et la sortie des élèves ou du public.

En ce cas les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 € d’amende.

3. Les articles 222-12-14°, 222-13-14°, 222-24-12°, 222-28-8°, 222-30-7° et 227-26-5° du code pénal prévoient une nouvelle circonstance aggravante en cas de violences commises sous l’emprise manifeste de stupéfiants ou en état d’ivresse manifeste, ainsi que pour les faits de viol, d’agressions sexuelles et d’atteintes sexuelles commis dans les mêmes circonstances.

B. – UNE NOUVELLE POSSIBILITÉ DE PROCÉDER À LA RECHERCHE DES INFRACTIONS : LE DÉPISTAGE DE L’USAGE DE PRODUITS STUPÉFIANTS AU SEIN DES ENTREPRISES OU DES ÉTABLISSEMENTS DE TRANSPORTS PUBLICS

Dans le but de préserver la sécurité des personnes transportées, le procureur de la République pourra, sur réquisition, faire procéder à des contrôles d’identité dans les entreprises ou des établissements de transports publics de voyageurs, terrestres, maritimes ou aériens, ainsi que dans leurs annexes et dépendances, à l’exception des locaux qui constituent un domicile (art. L. 3421-5, L. 3421-6 et L. 3421-7 du code de la santé publique). S’il existe à l’occasion de ce contrôle une raison plausible de soupçonner que les personnes présentes dans ces entreprises de transports publics ont fait usage de stupéfiants, le dépistage peut être pratiqué.

Le dépistage est effectué sur les personnes dont les fonctions exercées mettent en cause la sécurité du transport, et dont la liste est fixée par le décret 2007-935 du 15 mai 2007 (joint en annexe). Cette liste se rapporte aux personnes chargées de la conduite ou de la maintenance des dispositifs de sécurité dans les entreprises de transport.

Les réquisitions du procureur doivent être écrites et précises quant aux opérations de contrôle, spécialement en ce qui concerne les date, heure, locaux concernés et ne sont prises que pour une durée d’un mois maximum.

Il doit d’abord être procédé au contrôle d’identité des personnes présentes dans les lieux énumérés par le texte, afin de déterminer si elles relèvent des dispositions de l’article L. 3421-1 alinéa 3 du code de la santé publique.

Le texte ne vise qu’à la recherche et à la constatation de l’usage de stupéfiants, ce qui exclut les autres produits qui sont de nature à altérer les capacités de ces personnels.

Ainsi, lorsque les officiers et agents de police judiciaire chargés de procéder aux contrôles d’usage de stupéfiants constateront un état d’ivresse sur l’une des personnes concernées, ils devront en référer immédiatement au responsable afin que des mesures conservatoires ou disciplinaires puissent être prises à l’encontre de l’intéressé. Dans cette circonstance, il ne sera pas procédé au dépistage.

Compte tenu de la nature dérogatoire de ces dépistages, qui ne doivent pas être utilisés à d’autres fins, les parquets devront veiller au respect des conditions de fond et de forme posées par le législateur pour leur exercice, qui n’est pas laissé à l’initiative des officiers de police judiciaire.

La procédure doit établir l’existence de raisons plausibles d’usage de stupéfiants pour réaliser un dépistage. Ces raisons plausibles peuvent être appréciées en fonction du comportement de la personne ou en présence de signes caractéristiques, tels que ceux illustrés par les exemples suivants : troubles de l’équilibre, démarche hésitante, difficulté à tenir la station debout, troubles de l’élocution ou du langage, sudation, rougeur oculaire et mydriase (pupilles dilatées) ainsi qu’un état anormal d’excitation, d’euphorie, d’apathie ou d’anxiété.

Si l’épreuve de dépistage est positive ; les enquêteurs doivent faire procéder aux vérifications biologiques (analyses de sang) et cliniques qui permettront d’établir la preuve de l’usage de stupéfiants.

Le recours à ces vérifications médicales concerne également la personne qui n’est pas en état ou qui refuse de se soumettre au test de dépistage, refus qui est d’ailleurs réprimé.

Les mesures prises dans le cadre de ces dépistages font l’objet d’un procès-verbal qui doit être remis aux personnes contrôlées. Il conviendra de s’assurer que l’opération de contrôle se déroule dans la discrétion et dans le respect de la présomption d’innocence.

En cas de contrôle positif, l’autorité administrative en charge de la politique des transports sera informée des suites de la procédure. Il lui appartiendra de prendre les mesures qui relèvent de ses compétences (vérification de la validité du permis de conduire, retrait de points, etc.)

Il convient de préciser que l’entrée en vigueur des dispositions relatives au dépistage est subordonnée à la parution d’un décret, non encore intervenu, sur les modalités de conservation des échantillons.

II. – L’AMÉLIORATION DU TRAITEMENT JUDICIAIRE DE L’USAGE DE STUPÉFIANTS

Outre l’extension de la procédure d’ordonnance pénale au délit d’usage de stupéfiants et le rétablissement des coups d’achat, la loi du 5 mars 2007 a innové en créant le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage des produits stupéfiants (A). Elle a par ailleurs renforcé l’efficacité de l’injonction thérapeutique (B)

A. – UNE INNOVATION : LE STAGE DE SENSIBILISATION AUX DANGERS DE L’USAGE DE PRODUITS STUPÉFIANTS

Ce stage est une mesure dont la portée pédagogique est indéniable. Il doit faire prendre conscience au consommateur des dommages induits par la consommation de produits stupéfiants, ainsi que des incidences sociales d’un tel comportement. En application du décret n° 2007-1388 du 26 septembre 2007, les modalités de ce stage sont fixées aux articles R. 131-46 et R. 131-47 du code pénal par renvoi aux articles R. 131-36 à R. 131-44 du même code relatifs au stage de citoyenneté.

l. La mise en œuvre du stage de sensibilisation

Le procureur de la République peut proposer le stage de sensibilisation à l’auteur des faits dans le cadre des alternatives aux poursuites (art. 41-1 CPP) et dans celui de la composition pénale (art. 41-2 CPP). Il peut le proposer à tout auteur majeur ainsi qu’aux mineurs âgés d’au moins treize ans, selon les modalités prévues par les articles 7-1 et 7-2 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

Ce stage peut aussi être ordonné dans le cadre de l’ordonnance pénale et à titre de peine complémentaire au même titre que celles traditionnellement encourues.

Le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage des produits stupéfiants peut aussi être ordonné à titre de peine complémentaire pour réprimer la conduite d’un véhicule sous l’influence de produits stupéfiants (art L. 235-1 du code de la route), les atteintes à la vie, les infractions entraînant une mise en danger de la personne, les atteintes à l’intégrité physique ou psychique de la personne, les extorsions et les dégradations.

Le stage de sensibilisation s’effectue selon les modalités prévues à l’article 131-35-1 du code pénal qui s’applique à tous les stages de sensibilisation (danger des drogues, mais aussi sécurité routière et responsabilité parentale).

Il doit être exécuté dans un délai de six mois à compter de la date de condamnation définitive lorsqu’il est prononcé à titre de peine complémentaire. Il est souhaitable de faire exécuter la mesure dans le même délai quand le stage est proposé à titre de mesure alternative aux poursuites, dans le cadre d’une composition pénale ou d’une ordonnance pénale.

Une fois le stage accompli, le stagiaire doit adresser au procureur de la République l’attestation qui lui aura été remise.

Afin de mettre en œuvre cette mesure, le parquet se mettra en relation avec le chef de projet départemental de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) désigné pour son ressort, qui lui indiquera les ressources associatives de lutte contre la toxicomanie et le trafic de stupéfiants susceptibles de remplir la prestation. Il reviendra au parquet général de veiller à une harmonisation des frais des stages (qui devront rester d’un montant raisonnable) et à une durée homogène des stages proposés par les associations au sein du ressort. Quel que soit le cadre dans lequel la mesure est décidée, les frais du stage de sensibilisation ne peuvent en toute hypothèse excéder le montant de l’amende prévue pour les contraventions de la 3e classe, soit 450 €.

Par ailleurs, il s’assurera que des stages distincts soient organisés, dans la mesure du possible, pour les usagers mineurs et les usagers majeurs.

2. La charge des frais du stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants

Par principe, les frais du stage de sensibilisation seront à la charge de l’usager.

A titre exceptionnel, il pourra être décidé de le dispenser du paiement de tout ou partie du coût du stage dans les cas ci-après indiqués où la loi le permet. Cette décision sera évidemment guidée par l’examen de la situation familiale et sociale de l’usager. La dispense de paiement devra être réservée au bénéfice des usagers pour lesquels un stage de sensibilisation apparaît hautement souhaitable et qui sont réellement dans l’impossibilité d’en assumer la charge financière.

a) Lorsque le stage est ordonné dans le cadre d’une alternative aux poursuites, les frais sont toujours à la charge de la personne qui accomplit le stage en application de l’article 41-1 du code de procédure pénale.

b) Dans le cadre d’une composition pénale (art. 41-2 du code de procédure pénale), les frais peuvent être à la charge de l’usager mineur ou majeur, sauf décision contraire.

c) Lorsque le stage de sensibilisation est décidé dans le cadre d’une ordonnance pénale (art. 495 4° du code de procédure pénale), l’usager de stupéfiants peut être dispensé des frais de stage.

Il conviendra donc de s’assurer, avant de choisir l’une de ces voies, que l’intéressé est en mesure de payer les frais de stage, afin d’éviter un échec de la mesure pour des raisons pécuniaires

d) Lorsque le stage est prononcé à titre de peine complémentaire :

  • – s’il s’agit d’un usage simple (art. L. 3421-1 al. 1 du CSP, art. 131-35-1 du code pénal) les frais sont à l’appréciation de la juridiction de jugement. Il en va de même (art. 227-32 du code pénal) s’il s’agit d’une provocation de mineur à l’usage, au transport, la détention et la cession de produits stupéfiants (art. 227-18 et 18-1 du code pénal).
  • – s’il s’agit d’un usage aggravé (personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ou par le personnel d’une entreprise de transport, ou de l’incitation dans des établissements scolaires ou dans l’administration), le stage est toujours aux frais du condamné (art. L. 3421-7 8° du CSP).

La prise en charge des frais de stage de sensibilisation ne figure pas aux articles R. 92 et R. 93 du code de procédure pénale et ne peut en aucun cas intervenir au titre des frais de justice.

Le rôle des chefs de projets départementaux, en lien avec les procureurs de la République apparaît dès lors déterminant dans la recherche des sources de financement du stage pour les personnes dispensées d’en assumer la charge financière. Il est en effet indispensable que toutes les décisions judiciaires portant obligation de stage puissent être effectivement mises en œuvre et que les stagiaires dispensés du paiement soient toujours en mesure d’être accueillis par les associations.

B. – L’EFFICACITÉ DE L’INJONCTION THÉRAPEUTIQUE RENFORCÉE PAR L’INTERVENTION DU MÉDECIN RELAIS

Le dispositif actuel souffre d’un manque de visibilité et d’efficacité. Le rapport de politique pénale 2006 montre que cette mesure est peu utilisée, le plus souvent par manque de moyens sanitaires et sociaux (1). Elle est également concurrencée par le développement de dispositifs associatifs et publics sur le plan sanitaire et social qui assurent la prise en charge médicosociale des consommateurs de produits stupéfiants.

L’article 47 de la loi du 5 mars 2007 (art. L. 3413-1 du CSP) vise à améliorer le recours à l’injonction thérapeutique, qui peut être une mesure de soins ou un suivi médical, par la création d’un dispositif reposant sur le médecin relais. Il étend par ailleurs la mesure d’injonction thérapeutique à tous les stades de la procédure. Elle peut désormais être décidée dans le cadre des alternatives aux poursuites, de la composition pénale à l’égard de l’usager majeur comme du mineur de treize ans au moins, comme modalité d’exécution d’une peine et notamment dans le cadre du sursis avec mise à l’épreuve, y compris en matière d’infractions liées à l’abus d’alcool. Elle peut être également ordonnée par le juge d’instruction, le juge des enfants ou le juge des libertés et de la détention, ainsi que par la juridiction de jugement (art. L. 3143-1 à L. 3413-4 et L. 3425-1 du code de la santé publique, 132-45 du code pénal).

Les règles relatives à la liste départementale des médecins relais, à leur rémunération et au déroulement de la procédure d’injonction thérapeutique sont fixées aux articles R. 3413-1 à R. 3413-18 du code de la santé publique.

Le décret n° 2008-364 du 16 avril 2008 (joint en annexe) modifie les dispositions du code de la santé publique relatives aux modalités de mise en œuvre de l’injonction thérapeutique (art. R. 3413-1 à R. 3413-8 CSP) pour clarifier les relations entre les différents acteurs concernés : procureur de la République, autorité sanitaire départementale, médecin relais qui notifie l’injonction et médecin traitant. Il précise leur rôle, leurs obligations, ainsi que les délais dans lesquels les étapes de cette mesure doivent intervenir afin d’accroître l’efficacité et la rapidité de sa mise en œuvre.

Le médecin relais est chargé de mettre en œuvre la mesure d’injonction thérapeutique, d’en proposer les modalités et d’en contrôler le suivi effectif sur le plan sanitaire. A ce titre il procède à l’examen des personnes, contrôle la mise en œuvre effective de la mesure, assure l’articulation entre le dispositif de prise en charge et l’autorité judiciaire qui a prononcé l’injonction thérapeutique à qui il fait connaître son avis motivé sur l’opportunité médicale de la mesure.

Le préfet communique sans délai les pièces adressées par l’autorité judiciaire (procédure, enquête de personnalité, ordonnance, jugement de condamnation) au médecin relais lequel procède à l’examen médical initial dans le mois suivant la réception de ces pièces. A ce stade, il fait connaître son avis motivé à l’autorité judiciaire et, s’il estime la mesure médicalement opportune, il informe l’intéressé des modalités d’exécution de l’injonction thérapeutique en l’invitant à lui indiquer, au plus tard dans les dix jours, le nom du médecin soignant qu’il a choisi. Si le consommateur ne connaît pas de médecin susceptible de le prendre en charge, le médecin relais lui indiquera une liste de médecins ou un centre de prise en charge et de soins spécialisés dans la toxicomanie.

(1) Le nombre d’injonctions thérapeutiques décidées par les procureurs de la République en 2006 dans le cadre des alternatives aux poursuites (5 189) est cependant en légère augmentation depuis 2004 (4 068).

Pour éviter que la mesure prononcée ne fasse l’objet d’un avis de non-opportunité après le premier examen médical par le médecin relais, il faut impérativement que la décision soit prise à l’appui des éléments figurant dans la procédure et dans l’enquête de personnalité du consommateur de produits stupéfiants.

Le médecin désigné par l’intéressé est informé par le médecin relais du cadre juridique de la mesure. Il doit confirmer par écrit son accord au médecin relais dans un délai de quinze jours. Pour les personnes mineures, le choix du médecin soignant est effectué par ses représentants légaux et l’accord du mineur sur ce choix doit être recherché.

Le médecin relais procède ensuite aux examens médicaux au troisième et sixième mois de la mesure. A l’issue de chaque examen, il établit un rapport, adressé à l’autorité judiciaire ayant ordonné la mesure, par lequel il décrit l’évolution de la situation médicale de l’intéressé, sous réserve du secret médical, de la régularité du suivi et du type de mesure de soins ou de surveillance mis en place. Si l’autorité judiciaire décide de mettre fin à une injonction thérapeutique, elle doit alors en informer le préfet et le médecin relais.

L’alinéa 2 de l’article L. 3423-1 du code de la santé publique dispose que la durée de la mesure de l’injonction thérapeutique est d’une durée de six mois renouvelable trois fois, soit 24 mois au plus. Si cet article traite de l’injonction thérapeutique par le procureur de la République, il apparaît que la loi du 5 mars 2007 visait à développer l’injonction thérapeutique à tous les stades de la procédure mais sans créer plusieurs régimes d’injonction. Nonobstant sa place dans le code de la santé publique et sous réserve de l’appréciation souveraine des juridictions, il convient donc de considérer que ce délai vaut pour tous les cadres procéduraux dans lesquels la mesure d’injonction est décidée.

III. – LA NÉCESSITÉ DE DÉFINIR UNE NOUVELLE POLITIQUE PÉNALE

A. – UNE POLITIQUE PÉNALE RAPIDE ET GRADUÉE, GUIDÉE PAR LA PERSONNALITÉ ET LE PROFIL DE L’USAGER

La réponse pénale doit être systématique dès lors que l’infraction apparaît juridiquement caractérisée et ce quelle que soit la substance concernée, l’intensité de la consommation ou l’âge du consommateur. En effet, il est impératif qu’elle symbolise aux yeux du consommateur l’interdit légal qui s’attache à l’usage d’un stupéfiant.

Les parquets doivent recourir à une enquête sociale rapide (selon les modalités prévues à l’article 41 du code de procédure pénale) ou à une audition circonstanciée de l’usager afin d’apporter une réponse pénale adaptée et graduée, qui doit prendre en compte les éléments de sa personnalité et de son profil de consommation (type de drogue, régularité de la consommation, mode d’approvisionnement, situation familiale et socioprofessionnelle, ressources financières).

Pour les mineurs, la réponse judiciaire est guidée par la situation personnelle du mineur et doit demeurer à dominante éducative et sanitaire, après recours systématique à des investigations relatives à sa personnalité, au contexte de l’usage, à son environnement social et familial. Elle s’inscrit dans le cadre des dispositions de l’ordonnance du 2 février 1945.

Il est rappelé que la qualification de détention de produits stupéfiants ne doit être préférée à celle d’usage que lorsque la quantité des produits trouvés en possession de l’usager excède celle de sa consommation personnelle.

1. L’usager simple

Il s’agit essentiellement d’un délinquant usager occasionnel de produits stupéfiants ou consommateur régulier qui ne pose toutefois pas de problèmes de santé ou d’insertion majeure, et qui détient une très petite quantité de substances.

Le classement avec rappel à la loi doit se limiter en tout état de cause aux consommateurs occasionnels, en possession d’une très faible quantité de produits.

Dans l’hypothèse de l’usage simple, le stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants paraît constituer une réponse pénale tout particulièrement indiquée.

L’évaluation de la nécessité d’accomplir un stage de sensibilisation devra prendre en compte le fait que l’intéressé doit faire l’objet de poursuites pénales, si le stage n’est pas exécuté. Dans ces conditions, il faudra veiller à ne proposer cette mesure que si elle est proportionnée à la consommation reprochée.

Le choix du cadre procédural dans lequel sera effectué le stage de sensibilisation dépendra de l’existence de précédents et de la situation familiale et sociale de l’usager.

2. L’usager toxicodépendant

Dans le cadre des mesures de classement avec orientation, les dispositifs ayant fait leurs preuves, tels que les consultations cannabis, pourront être proposées.

L’injonction thérapeutique, qui peut désormais être décidée à tous les stades de la procédure, doit être systématiquement envisagée lorsque les circonstances de fait ou de droit font apparaître que le mis en cause est toxicodépendant et nécessite des soins ou lorsque les circonstances de la commission d’une infraction révèlent par ailleurs une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques.

3. Les poursuites correctionnelles

Les poursuites pénales sont privilégiées dans l’hypothèse d’un usager réitérant ou récidiviste, pour l’usager qui refuse de se soumettre aux mesures ordonnées par le parquet ou lorsque l’usage de stupéfiants est associé à une autre infraction.

Si la personne poursuivie paraît rester ouverte à une dynamique pédagogique ou de soins, il devra être envisagé de requérir, outre la peine principale, un stage de sensibilisation ou une mesure d’injonction thérapeutique à titre de peine complémentaire.

Lorsque les faits d’usage de stupéfiants sont à l’origine d’atteintes involontaires à l’intégrité de la personne, ils doivent être poursuivis et traités avec la plus grande sévérité. Dans ces hypothèses, une réponse pénale dissuasive doit être apportée et les parquets devront engager des poursuites devant la juridiction correctionnelle.

B. – UNE POLITIQUE PÉNALE NÉCESSAIREMENT EN LIEN AVEC LES PARTENAIRES INSTITUTIONNELS ET LE SECTEUR ASSOCIATIF

L’effectivité de la réponse pénale voulue par la loi du 5 mars 2007, dont la dominante sanitaire est incontestable, est conditionnée par un partenariat efficace entre les autorités judiciaires et sanitaires, ainsi qu’avec les acteurs du secteur associatif.

La circulaire du 8 avril 2005 prévoyait déjà ce partenariat qui doit continuer à se développer pour une meilleure application de la loi du 5 mars 2007 laquelle consacre et renforce le rôle des procureurs généraux et des procureurs de la République en matière de prévention de la délinquance.

Le conseil départemental de prévention de la délinquance, qui est présidé par le président du conseil général, doit prendre en compte les priorités résultant des décisions judiciaires en réponse à la toxicomanie. Le procureur de la République, en sa qualité de vice-président de cette instance partenariale privilégiée, veillera à exposer sa politique d’action publique en matière de lutte contre l’usage de drogue.

Le parquet s’attachera à ce que les orientations relevant de la politique pénale en ce domaine soient intégrées dans le plan départemental de prévention et participera activement aux comités locaux de prévention de la délinquance.

Par ailleurs et afin de garantir la cohérence des politiques publiques en matière de prévention et de lutte contre les toxicomanies, il appartient aux chefs de parquet de se rapprocher des chefs de projet départementaux de la MILDT pour les informer des modalités pratiques de mise en œuvre des réponses et priorités judiciaires.

Vous voudrez bien désigner au sein de chaque parquet un magistrat plus particulièrement identifié qui sera l’interlocuteur des autorités sanitaires et du milieu associatif au titre de la lutte contre la toxicomanie.

Il serait utile par ailleurs d’indiquer les initiatives prises pour fixer, au titre du partenariat, les modalités de mise en œuvre des nouvelles procédures et notamment la mise en œuvre de l’injonction thérapeutique avec le dispositif du médecin relais ainsi que des stages de sensibilisation.

Vous voudrez bien enfin signaler toutes les affaires significatives intervenues dans le cadre de l’application de cette circulaire, le nombre d’ordonnances pénales, d’injonctions thérapeutiques et de stages de sensibilisation prononcés en précisant, pour les deux dernières mesures, à quel stade de la procédure elles sont intervenues.

Un dispositif de remontée des données statistiques trimestrielles sera opérationnel dans les jours qui viennent à l’adresse électronique suivante : http://10.21.2.205/dacg.st.

Il devra impérativement être renseigné avant le 15 du mois suivant chaque trimestre échu et pour la première fois avant le 15 juillet 2008 pour les mesures ordonnées au cours du second trimestre 2008.

Il convient pour cela de s’identifier à l’adresse indiquée à l’aide de son « prénom.nom » et de son mot de passe de messagerie.

Je vous saurais gré de rendre compte, sous le timbre du bureau de la santé publique, du droit social et de l’environnement, de toute difficulté que vous pourriez rencontrer pour l’application de la présente circulaire.

Pour la garde des sceaux, ministre de la justice :

Le directeur des affaires criminelles et des grâces,

JEAN-MARIE HUET

ANNEXES

(non publiées)

1. Les codes NATINF des nouvelles infractions.

2. Le cahier des charges du stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants.

3. Décret n° 2007-935 du 15 mai 2007 fixant la liste des personnes dont les fonctions mettent en cause la sécurité du transport.

4. Décret n° 2008-364 du 16 avril 2008 relatif au suivi des mesures d’injonction thérapeutique et aux médecins relais.

Informations sur ce texte

NOR : JUSD0811637C

Nature : Circulaire

Date : 09/05/2008