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Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, du 24 avril 2001, 97PA00974 97PA01033, inédit au recueil Lebon

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Rapporteur : M. EVEN

Commissaire du gouvernement : Mme LASTIER


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


(4ème Chambre A)
VU I°) la requête n° 97PA00974, enregistrée au greffe de la cour le 16 avril 1997, présentée pour M. Damien Y... et M. Christophe Y..., héritiers de M. Y..., architecte, demeurant ..., et Mme Maria B..., demeurant ..., par la SCP BOULLOCHE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; les consorts Y... et C... B... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 866763 en date du 31 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné la SCIC, la société LGX Ingénierie, Mme B..., les consorts Y... venant aux droits de M. Y..., la société Bethac et les bureaux d'études Lasa et Générale de Restauration, conjointement et solidairement, à garantir la commune de Vélizy-Villacoublay de la somme de 827.586 F, assortie des intérêts moratoires, et la société LGX Ingénierie à garantir les consorts Y... et C... B... de la moitié des sommes que l'appel en garantie de la commune mettrait à leur charge ;
2°) de condamner la commune de Vélizy-Villacoublay et la société LGX Ingénierie à lui verser une somme de 15.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU II ) la requête n° 97PA01033, enregistrée au greffe de la cour le 24 avril 1997, présentée pour la société SCIC AMO SA, dont le siège est ..., et la société SCIC SA, dont le siège est à l'Atrium, 6 place Abel Gance, 92652 Boulogne Billancourt, par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; les SA SCIC AMO et SCIC demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 866763 en date du 31 janvier 1997 en ce qu'il condamne la SCIC à garantir, conjointement et solidairement avec les constructeurs, la commune de Vélizy-Villacoublay des condamnations prononcées à son encontre au bénéfice de la société Sogea ;
2°) de rejeter l'appel en garantie formé à l'encontre de la SCIC par la commune ;
3°) de condamner la commune à lui verser une somme de 15.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des marchés publics ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2001 :
- le rapport de M. EVEN, premier conseiller,

- les observations de la SCP SILLARD et associés, avocat, pour la commune de Vélizy-Villacoublay,
- et les conclusions de Mme LASTIER, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n°s 97PA00974 et 97PA01033 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que le tribunal administratif de Versailles a, par jugement du 10 février 1994, condamné la commune de Vélizy-Villacoublay à verser une indemnité globale de 1.323.721,91 F, assortie d'intérêts moratoires à compter du 16 septembre 1986, à la société Sogea, laquelle vient aux droits des sociétés Bouveron placée en liquidation de biens le 17 octobre 1983, puis Dodin, attributaires successives du lot n° 2 correspondant aux travaux de fondations et de gros uvre d'un ensemble immobilier communal, réalisés en vertu d'un marché daté du 6 décembre 1982 ; que ce même tribunal a, par un jugement postérieur du 31 janvier 1997, condamné la SCIC, la société LGX Ingénierie, Mme B..., les consorts Y... venant aux droits de M. Y..., architecte, la société Bethac et les bureaux d'études Lasa et de la Générale de Restauration, conjointement et solidairement, à garantir la commune à concurrence de la somme de 827.586 F, assortie des intérêts moratoires, correspondant à des charges extra-contractuelles que la commune devait rembourser à la société Sogea ; que la société LGX Ingénierie a par ailleurs été condamnée à garantir les consorts Y... et C... B... de la moitié des sommes que l'appel en garantie de la commune mettrait à leur charge ;
En ce qui concerne la responsabilité de la SCIC AMO vis à vis de la commune de Vélizy-Villacoublay :
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que pour condamner la SCIC, les premiers juges se sont bornés à indiquer, sans préciser le fondement juridique de sa responsabilité, qu'elle n'a pas assuré sa mission de surveillance des travaux avec une diligence suffisante ; que, dès lors, la SCIC AMO, qui vient aux droits de la SCIC, est fondée à soutenir que cette motivation est insuffisante et à obtenir l'annulation, en tant qu'il la concerne, du jugement du tribunal administratif de Versailles du 31 janvier 1997 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions d'appel en garantie présentées devant le tribunal administratif de Versailles par la commune de Vélizy-Villacoublay et dirigées contre la SCIC AMO ;
Sur le fond :

Considérant en premier lieu qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la convention du 14 décembre 1981 passée entre la commune et la SCIC, qu'aux termes de l'article 7 de ladite convention : "La commune suit les travaux par l'intermédiaire des services techniques de la ville, qui font part de leurs observations éventuelles au conducteur d'opération. Dans tous les choix pouvant intervenir au cours de la réalisation, le point de vue de la commune reste déterminant, et dans le cas d'un différend, seule une solution ayant reçu l'agrément express de la commune peut être appliquée." ; qu'aux termes de l'article 8 intitulé paiement des travaux : "Au fur et à mesure de l'avancement des travaux, la SCIC adresse à la commune des états mensuels accompagnés de toutes pièces." ; qu'aux termes de l'article 11 : "La SCIC ... ne supporte que la responsabilité du mandataire, telle que définie à l'article 1991 du code civil." ; qu'il en résulte que cette dernière s'est bornée à assurer une "conduite d'opération" de la construction de l'ensemble immobilier faisant l'objet du présent litige, portant pour l'essentiel sur la gestion des rémunérations dues aux constructeurs, et ne peut être regardée comme ayant exercé une mission de maître d'ouvrage délégué ; qu'il ressort des dispositions de l'article 5 bis ajouté à l'arrêté interministériel du 7 mars 1949 par l'arrêté du 23 juin 1976 alors applicable qu'une telle mission de conducteur d'opération s'effectue sous l'autorité du maître de l'ouvrage ; que la commune n'invoque aucune faute contractuelle à l'origine des retards observés dans l'exécution des travaux, principalement liés à une production tardive des plans béton armé et éléments de calcul par la S.A.R.L. LGX Ingénierie, susceptible de se rattacher aux missions dévolues à la SCIC ; que les fautes éventuellement commises par la SCIC ne sauraient en tout état de cause fonder l'exercice par les architectes et des entrepreneurs ayant participé à la construction, d'actions en garantie dirigées contre la SCIC ;
Considérant en second lieu qu'en l'absence d'obligations pesant sur la S.A.R.L. LGX Ingénierie découlant de l'article 8 du CCAP définissant les modalités d'application de pénalités contractuelles de retard, lequel renvoit au contenu de l'acte d'engagement, la commune ne peut reprocher à la SCIC de ne pas avoir appliqué de telles pénalités en réduction des honoraires qui étaient dus à cette société ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vélizy-Villacoublay n'est pas fondée à demander la condamnation de la SCIC AMO, solidairement avec les maîtres d'oeuvre, à la garantir de la somme de 827.586 F qu'elle a été condamnée, par le jugement du 10 février 1994, à verser à la société Sogea ;
En ce qui concerne les appels en garantie de la commune de Vélizy-Villacoublay à l'égard des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre :

Considérant que par un marché d'ingénierie et d'architecture en date du 17 septembre 1982, M. Y..., architecte-concepteur, la S.A.R.L. LGX Ingénierie, la société Bethac, la société Lasa, et le bureau d'études techniques de la Générale de Restauration ont constitué un groupement d'entrepreneurs conjoints et solidaire en vue de la maîtrise d' uvre de l'opération réalisée pour le compte de la commune de Vélizy-Villacoublay ; que les entreprises membres de ce groupement ainsi constitué ont désigné en qualité de mandataire commun M. Y..., puis à la suite de son décès intervenu le 20 février 1984, Mme B..., acquéreur du cabinet Y... ;
Sur la fin de non recevoir opposée par la commune à l'appel des consorts Y... et de Mme B... :
Considérant que l'action exercée par les consorts Y... et C... B... ne tend pas à remettre en cause le jugement du 10 février 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné la commune à indemniser la société Sogea, mais tend à l'annulation du jugement du 31 janvier 1997 en tant qu'il les condamne à garantir la commune d'une partie des condamnations prononcées par son précédent jugement ; que, par suite, la commune de Vélizy-Villacoublay n'est pas fondée à leur opposer l'absence d'appel à l'encontre de ce premier jugement ;
Sur l'action en garantie entreprise par la Ville de Vélizy-Villacoublay à l'encontre des maîtres d' uvre :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête :
Considérant que l'établissement du décompte général et définitif fixant le montant des honoraires dus aux maîtres d'oeuvre, après achèvement de leur mission, met fin à leurs obligations contractuelles, à l'exception de leur obligation de conseil envers le maître de l'ouvrage lors de la réception des travaux et interdit par conséquent au maître de l'ouvrage d'invoquer ultérieurement une faute qu'ils auraient pu commettre dans la conception de l'ouvrage ou dans la direction des travaux ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que la réception des travaux est intervenue le 20 octobre 1985 et la levée des réserves signifiée le 15 novembre 1985 ; que la commune de Vélizy-Villacoublay a versé le solde du décompte afférent aux maîtres d' uvre en 1986 ; qu'elle ne pouvait, dès lors, utilement invoquer pour la première fois dans son mémoire enregistré au greffe du tribunal le 29 mai 1991, tendant à ce que les maîtres d'oeuvre fussent condamnés à lui rembourser l'indemnité qu'elle serait amenée à verser à la société Dodin en raison des retards supportés par cette dernière dans l'exécution de ses travaux, la faute qu'aurait commise la S.A.R.L. LGX Ingénierie en fournissant tardivement des plans béton armé et des éléments de calculs indispensables à la réalisation des travaux de fondation et de gros-oeuvre ; que si la commune invoque en outre une méconnaissance du devoir de conseil pesant sur les maîtres d' uvre, elle n'apporte aucun élément susceptible d'établir que ce manquement serait à l'origine des retards supportés par la société Dodin ; que, par suite, les consorts Y... et C... B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles les a condamnés à garantir la commune de Vélizy-Villacoublay ;

Considérant que l'admission totale des appels principaux des consorts Y... et de Mme B... aggrave la situation de la S.A.R.L. LGX Ingénierie et de la SA Bethac ; qu'elles sont dès lors recevables et fondées, pour les mêmes motifs, à obtenir par la voie d'appels provoqués que les indemnités qu'elles ont été condamnées à payer par le jugement attaqué soient annulées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les consorts Y..., C... A... Z... et la S.A.R.L. LGX Ingénierie, qui ne sont pas, dans la présente instance, des parties perdantes, soient condamnées à verser des sommes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, par application des mêmes dispositions, de condamner la commune de Vélizy-Villacoublay à payer à chacun d'entre eux, à la SCIC AMO, aux consorts Y..., à Mme B..., et à la S.A.R.L. LGX Ingénierie, la somme de 10.000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement n° 866763 du tribunal administratif de Versailles en date du 31 janvier 1997 est annulé, en tant qu'il a condamné la SCIC, la société LGX Ingénierie, la SA Bethac, Mme B..., les consorts Y... venant aux droits de M. Y..., à garantir la commune de Vélizy-Villacoublay de la somme de 827.586 F, assortie des intérêts moratoires, et la société LGX Ingénierie à garantir les consorts Y... et C... B... de la moitié des sommes que l'appel en garantie de la commune mettrait à leur charge.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Vélizy-Villacoublay à l'encontre de la SCIC, de la société LGX Ingénierie, de la SA Bethac, de Mme B..., et des consorts Y... venant aux droits de M. Y... sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des consorts Y... et de Mme B... dirigées contre l'entreprise Dodin, la société Sogea, et la société LGX Ingénierie, ni sur les conclusions d'appel provoqué de cette dernière tendant à l'atténuation de sa responsabilité.
Article 4 : La commune de Vélizy-Villacoublay versera la somme de 10.000 F à la SCIC AMO, aux consorts Y..., à Mme B..., et à la S.A.R.L. LGX Ingénierie au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
Article 5 : Le surplus des conclusions afférentes aux frais irrépétibles est rejeté.

Abstrats

39-06-01-06 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - ACTIONS EN GARANTIE
39-07 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RESPONSABILITE DU MAITRE DE L'OUVRAGE DELEGUE A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE
39-08-04-01 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - VOIES DE RECOURS - APPEL

Source : DILA, 01/05/2010, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Paris

Date : 24/04/2001