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Cour administrative d'appel de Lyon, 3e chambre, du 29 novembre 1994, 93LY00413 93LY00494, inédit au recueil Lebon

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Rapporteur : M. RIQUIN

Commissaire du gouvernement : M. BONNET


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu, 1°) sous le n° 93 LY 00413, la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés respectivement le 22 mars et le 22 juillet 1993 au greffe de la cour, présentés pour la société de construction traditionnelle VIEITEZ, dont le siège social est au ..., à Saint Flour (15 100), par Me A..., avocat ;
Elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 19 janvier 1993, en tant que ledit jugement l'a condamnée solidairement avec M. Z..., à verser à la commune de CLAVIERES la somme de 356 554 Francs, en réparation des désordres ayant affecté l'immeuble dénommé "centre d'accueil du Mont Mouchet-Margeride", la somme de 10 000 Francs en application de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et à supporter le tiers des frais de l' expertise diligentée par M. Y... ;
- de rejeter la demande de la commune présentée devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Vu, 2°) sous le n° 93 LY 00494, la requête enregistrée le 13 avril 1993, présentée pour la commune de CLAVIERES (Cantal), dûment représentée par son maire en exercice, par la SCP CHASSAING-COLLET-DE ROCQUIGNY & associés, avocats ;
Elle demande à la cour :
- d'annuler le jugement susvisé, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la société SACAN, de M. Z... et de la société d'études et d'équipements régionaux, à lui verser la somme de 678 702,73 Francs en réparation des désordres ayant affecté la toiture ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 novembre 1994 :
- le rapport de M. RIQUIN, conseiller ;
- les observations de Me COLLET, avocat de la commune de CLAVIERES et de Me X... substituant Me VINCENT, avocat de la société SACAN ;
- et les conclusions de M. BONNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 93LY00413 et n° 93LY00494 sont dirigées contre le même jugement et sont relatives à l'exécution du même marché de travaux publics ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant qu'à la suite de désordres qu'elle a constatés dans le centre d'accueil du Mont Mouchet, la commune de CLAVIERES a demandé la condamnation de certains constructeurs, par une demande enregistrée le 19 janvier 1990 au tribunal administratif de Clermont-Ferrand ; que par un jugement avant dire droit du 14 mars 1991, le tribunal a écarté une première expertise et a désigné un second expert ; qu'à la suite du dépôt de cette seconde expertise, la commune de CLAVIERES a présenté une seconde demande, enregistrée le 19 novembre 1992 ; que par le jugement du 19 janvier 1993 rendu sur les deux demandes de la commune de CLAVIERES, le tribunal administratif a fait droit partiellement aux conclusions de celle-ci, en rejetant celles concernant les désordres affectant la toiture de l'ouvrage, et en condamnant la société VIEITEZ et M. Z... à réparer les désordres relatifs au gros oeuvre, aux enduits extérieurs, aux revêtements intérieurs et au réseau d'évacuation des eaux ; que la société VIEITEZ et la commune de CLAVIERES font appel de ce jugement ;
Sur les conclusions de M. Z... et de la société VIEITEZ :
Considérant que dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, la commune de CLAVIERES n'a, à aucun moment, explicité le fondement juridique de son action ; qu'un tel fondement ne pouvait découler, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, de la seule mention que la société VIEITEZ et M. Z... avaient commis des fautes ; que par suite les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a admis la recevabilité de l'action de la commune dirigée à leur encontre, en décidant que ladite action devait être regardée comme invoquant implicitement la responsabilité contractuelle de ces constructeurs ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler le jugement dans cette mesure, et de rejeter la demande présentée par la commune de CLAVIERES à l'encontre de ces constructeurs ;
Sur les conclusions de la commune de CLAVIERES :
Sur les conclusions dirigées contre la société d'études et d'équipements régionaux et M. Z... :
Considérant que dans sa demande présentée devant les premiers juges, la commune de CLAVIERES n'a, à aucun moment, explicité le fondement juridique de son action ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ces conclusions ;
Sur les conclusions dirigées contre la société SACAN :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de transaction que la société SACAN a signé le 19 juin 1987, au cours du délai de garantie décennale, que cette entreprise a accepté de prendre à sa charge d'une part, la révision générale de la toiture, et d'autre part, près d'un quart des désordres provenant de la ventilation défectueuse de la couverture ; que dans les circonstances où elle a été effectuée, cette intervention constitue, de la part de l'entreprise SACAN, une reconnaissance de responsabilité qui a interrompu le cours du délai ; que par suite c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté les conclusions de la commune de CLAVIERES au motif qu'elles ont été présentées après l'expiration du délai de garantie décennale ;
Considérant en second lieu que, contrairement à ce que soutient la société SACAN, il ne résulte d'aucune des stipulations de la transaction intervenue le 19 juin 1987, et particulièrement de l'article 3, que la commune ait entendu renoncer à toute action concernant l'apparition de désordres postérieure à ladite transaction ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise diligentée par M. Y..., que les désordres qui affectent la toiture du bâtiment, et qui consistent en des infiltrations d'eau qui ont détérioré les panneaux sur avant-toit et les panneaux d'aggloméré, sont de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination ; que ces désordres proviennent des conditions dans lesquelles la société SACAN a procédé à l'assemblage et à la découpe des panneaux , ainsi qu'à la pose des bardeaux d'asphalte ; que par suite ils sont, au moins pour partie, imputables à l'exécution des travaux par la société SACAN ; que ce constructeur ne saurait utilement se prévaloir de ce que ces désordres seraient également imputables à d'autres constructeurs pour demander à être déchargé même partiellement de la responsabilité qu'il encourt vis à vis du maître d'ouvrage sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Considérant que si la société SACAN soutient qu'en ayant obstrué des entrées de ventilation, l'exploitant de la maison d'accueil a contribué à provoquer des phénomènes de condensation sous la toiture, il résulte de l'instruction que l'absence de ventilation n'est pas à l'origine des désordres constatés ; qu'ainsi la société SACAN n'est pas fondée à demander l'atténuation de sa responsabilité en invoquant une faute du maître d'ouvrage ;
Sur le montant de l'indemnité mise à la charge de la société SACAN :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'un constat d'huissier dressé le 2 août 1993, que les désordres affectant la couverture de l'ouvrage se sont aggravés depuis le dépôt du rapport d'expertise, enregistré le 8 octobre 1992 au greffe du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ; que, contrairement à ce que soutient la société SACAN, la commune de CLAVIERES est recevable à demander, en appel, la réévaluation de l'indemnité correspondant à l'aggravation des dommages constatés en première instance ; qu'étant donné l'importance des réparations nécessaires à la réfection de l'ensemble du bâtiment d'une part, et de l'endettement actuel et du niveau des ressources de la commune d'autre part, celle-ci est également fondée à soutenir qu'elle n'a pu procéder qu'à des mesures conservatoires limitées, et par suite à demander l'indemnisation des désordres qui ont pour origine le défaut d'étanchéité de la toiture de la maison d'accueil ;
Considérant que l'état du dossier ne permet pas à la cour de statuer sur les conclusions susanalysées de la commune de CLAVIERES ; qu'il y a lieu dès lors d'ordonner un complément d'expertise afin de déterminer l'aggravation des désordres affectant la couverture du bâtiment, ainsi que ceux qui sont consécutifs au défaut d'étanchéité de ladite couverture, et le montant des réparations nécessaires pour y remédier ; que l'expert précisera également la date d'apparition de chacun des désordres, afin de fixer le coefficient de vétusté à retenir, compte tenu de la durée normale de fonctionnement de la partie d'ouvrage concernée ; que l'expert devra enfin se prononcer sur l'existence éventuelle d'une plus-value générée par les travaux préconisés ;
Considérant qu'il y a lieu de réserver la question de la charge des frais d'expertise pour y être statué en fin d'instance ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation."
Considérant que la commune de CLAVIERES a demandé la condamnation solidaire des constructeurs à lui verser la somme de 50 000 francs en application des dispositions précitées ; que celles-ci font obstacle à ce que la société d'études et d'équipements régionaux et M. Z... soient condamnés à verser à la commune une somme au titre des frais qu'elle a exposés ; que, d'autre part, il y a lieu de réserver le jugement des conclusions dirigées contre la société SACAN pour y être statué en fin d'instance ;
Considérant qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de CLAVIERES à verser à la société VIEITEZ, à la société d'études et d'équipements régionaux et à M. Z... la somme de 4 000 francs chacun ;
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand sont annulés.
Article 2 : la demande présentée par la commune de CLAVIERES contre la société VIEITEZ et M. Z... est rejetée.
Article 3 : il sera, avant de statuer sur les conclusions de la commune de CLAVIERES dirigées contre la société SACAN, procédé par un expert désigné par le président de la cour, à une expertise en vue de déterminer :
- la nature et le coût des mesures conservatoires prises par la commune. - l'aggravation des désordres affectant actuellement la couverture du centre d'accueil du Mont Mouchet, ainsi que des désordres qui sont la conséquence directe du défaut d'étanchéité de la toiture, depuis le dépôt du rapport d'expertise. - le coût supplémentaire des réparations nécessaires pour remédier aux désordres susmentionnés par rapport au coût évalué par le rapport d'expertise. - la date d'apparition de l'ensemble des désordres et le coefficient de vétusté affectant chaque partie d'ouvrage à cette date. - l'existence éventuelle d'une plus-value apportée par les travaux, sa nature et son montant.
Article 4 : L'expert prêtera serment par écrit. Le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la cour dans le délai de deux mois suivant la prestation de serment.
Article 5 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.
Article 6 : La commune de CLAVIERES est condamnée à verser à la société VIEITEZ la somme de 4 000 francs en application de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 7 : La commune de CLAVIERES est condamnée à verser à la société d'études et d'équipements régionaux la somme de 4 000 francs en application de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 8 : La commune de CLAVIERES est condamnée à verser à M. Z... la somme de 4 000 francs en application de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.

Abstrats

39-06-01-02-005 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - CHAMP D'APPLICATION

Source : DILA, 01/05/2010, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Lyon

Date : 29/11/1994