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Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 11/04/2012, 355564

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Président : M. Christian Vigouroux

Rapporteur : M. Frédéric Dieu

Commissaire du gouvernement : M. Nicolas Boulouis

Avocat : FOUSSARD


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi, enregistré le 4 janvier 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ; le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1106875 du 21 décembre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, statuant en application de l'article
L. 551-1 du code de justice administrative, a, à la demande de la société PMN, d'une part, annulé la procédure engagée en vue de l'attribution du lot 2a du marché ayant pour objet la construction du pôle de police judiciaire installé sur la commune de Cergy-Pontoise, d'autre part, lui a enjoint, s'il entendait poursuivre la procédure engagée, de la reprendre au stade de l'examen des offres ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société PMN ;

3°) de mettre à la charge de la société PMN une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 mars 2012, présentée pour la société PMN ;


Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Dieu, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Foussard, avocat de la société PMN,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de la société PMN ;



Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 551-1 du code de justice administrative que le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut être saisi, avant la conclusion d'un contrat de commande publique ou de délégation de service public, d'un manquement, par le pouvoir adjudicateur, à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ; qu'aux termes de l'article L. 551-2 du même code : " Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l'emporter sur leurs avantages. / Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un avis d'appel public à la concurrence publié le 30 août 2011, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de l'attribution de trois des seize lots du marché portant sur la construction d'un pôle de police judiciaire à Pontoise ; que la candidature de la société PMN a été rejetée en ce qui concerne le lot 2a " façades, menuiseries extérieures occultations " ; que cette société a contesté le rejet de sa candidature devant le tribunal administratif de Versailles ; que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a annulé la procédure de passation du marché litigieux à compter de l'examen des offres et enjoint au ministre, s'il entendait poursuivre la procédure engagée, de la reprendre au stade de l'examen des offres ;

Considérant que, pour annuler la procédure de passation litigieuse, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a estimé que le ministre ne s'était pas livré à l'examen des références professionnelles et de la liste des travaux présentées par la société PMN afin d'attester de sa compétence à effectuer les prestations pour lesquelles le règlement de la consultation exigeait la détention d'un certificat de qualification professionnelle " Qualibat " ou équivalent ; qu'en se fondant sur cette seule circonstance pour juger illégal le rejet de la candidature de la société PMN, alors que le ministre avait également justifié ce rejet par le caractère insuffisant des capacités financières de la société au regard du montant des travaux à exécuter la première année et qu'il lui appartenait en conséquence d'examiner le bien-fondé de cet autre motif de rejet, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par la société PMN ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 80 du code des marchés publics : " 1° Pour les marchés et accords-cadres passés selon une procédure formalisée autre que celle prévue au II de l'article 35, le pouvoir adjudicateur, dès qu'il a fait son choix pour une candidature ou une offre, notifie à tous les autres candidats le rejet de leur candidature ou de leur offre, en leur indiquant les motifs de ce rejet. / Cette notification précise le nom de l'attributaire et les motifs qui ont conduit au choix de son offre aux candidats ayant soumis une offre et à ceux n'ayant pas encore eu communication du rejet de leur candidature " ; qu'aux termes de l'article 83 du même code : " Le pouvoir adjudicateur communique à tout candidat écarté qui n'a pas été destinataire de la notification prévue au 1° du I de l'article 80 les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre dans les quinze jours de la réception d'une demande écrite à cette fin. / Si le candidat a vu son offre écartée alors qu'elle n'était aux termes de l'article 35 ni inappropriée, ni irrégulière, ni inacceptable, le pouvoir adjudicateur est en outre tenu de lui communiquer les caractéristiques et les avantages relatifs de l'offre retenue ainsi que le nom du ou des attributaires du marché ou de l'accord-cadre " ;

Considérant que si l'absence de communication par le pouvoir adjudicateur de l'une des informations mentionnées par le deuxième alinéa des dispositions précitées de l'article 83 du code des marchés publics doit conduire le juge à enjoindre à ce dernier de communiquer les informations manquantes au candidat dont l'offre bien que recevable a été rejetée, il résulte en l'espèce de l'instruction que la société PMN a été écartée de la procédure litigieuse au stade de la présentation de sa candidature et non à celui de la présentation de son offre ; que, par suite, cette société ne saurait utilement soutenir que les caractéristiques, notamment le prix, et les avantages relatifs de l'offre retenue ne lui ont pas été communiqués par le ministre et que celui-ci aurait par cette omission méconnu les dispositions du deuxième alinéa de l'article 83 du code des marchés publics ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du II de l'article 45 du code des marchés publics : " Le pouvoir adjudicateur peut demander aux opérateurs économiques qu'ils produisent des certificats de qualité. Ces certificats, délivrés par des organismes indépendants, sont fondés sur les normes européennes. / Pour les marchés qui le justifient, le pouvoir adjudicateur peut exiger la production de certificats, établis par des organismes indépendants, et attestant leur capacité à exécuter le marché. / Pour les marchés de travaux et de services dont l'exécution implique la mise en oeuvre de mesures de gestion environnementale, ces certificats sont fondés sur le système communautaire de management environnemental et d'audit (EMAS) ou sur les normes européennes ou internationales de gestion environnementale. / Dans les cas prévus aux trois alinéas précédents, le pouvoir adjudicateur accepte tout moyen de preuve équivalent ainsi que les certificats équivalents d'organismes établis dans d'autres Etats membres. " ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, l'article 7-1 du règlement de la consultation applicable à la procédure litigieuse a exigé des candidats qu'ils produisent un certificat de qualification professionnelle ou équivalent " Qualibat " n° 3813 (" tout type de bardage "), " Qualibat " n° 3523 (" fabrication et pose de menuiseries extérieures en aluminium ") et " Qualibat " n° 3532 (" fabrication et pose de menuiseries extérieures en acier ") ; que le même article précisait que, sur ces points, la preuve de la capacité du candidat pourrait être apportée par tout moyen, notamment par des certifications d'autres organismes indépendants répondant aux normes européennes ou des références de prestations attestant de la compétence de l'opérateur économique à réaliser la prestation pour laquelle il se porte candidat, ces références devant cependant être nécessairement appuyées d'attestations d'un tiers indépendant ;

Considérant, d'une part, que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS pouvait légalement, sur le fondement des dispositions précitées du II de l'article 45 du code des marchés publics, demander aux candidats de produire, à titre de moyen de preuve équivalent aux trois certificats de qualification professionnelle " Qualibat " mentionnés à l'article 7-1 du règlement de la consultation, des références de prestations accompagnées d'attestations délivrées par un tiers indépendant, lesquelles étaient destinées, comme la certification " Qualibat ", à prouver la qualité technique des prestations antérieurement effectuées par le candidat dans les domaines couverts par les certifications en cause ;

Considérant, d'autre part, que la société PMN ne conteste pas ne pas être titulaire des certificats " Qualibat " nos 3532 et 3813 ; qu'il résulte de l'instruction que les références de prestations qu'elle a produites à l'appui de sa candidature, afin d'attester de sa compétence à réaliser des travaux de fabrication et de pose de menuiseries extérieures en acier et des travaux de bardage, émanaient seulement de clients pour lesquels elle a effectué des travaux et n'étaient pas accompagnées d'attestations délivrées par un tiers indépendant, contrairement à ce qu'exigeait l'article 7-1 du règlement de la consultation ; que, par suite, la société PMN n'est pas fondée à soutenir que le ministre a manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en rejetant sa candidature ; que sa demande doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que le MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS ne justifiant pas avoir exposé des frais pour la présente instance, il n'y a pas lieu non plus de mettre à la charge de la société PMN la somme de 2 000 euros demandée par le ministre au titre des mêmes dispositions ;




D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance n° 1106875 du juge des référés du tribunal administratif de Versailles du 21 décembre 2011 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société PMN devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société PMN et l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS et à la société PMN.

Abstrats

39-02-005 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. FORMATION DES CONTRATS ET MARCHÉS. FORMALITÉS DE PUBLICITÉ ET DE MISE EN CONCURRENCE. - EXAMEN DES CANDIDATURES - EVALUATION DES CAPACITÉS PROFESSIONNELLES, TECHNIQUES ET FINANCIÈRES DES CANDIDATS - CERTIFICATS (II DE L'ART. 45 DU CMP) - POSSIBILITÉ POUR LE POUVOIR ADJUDICATEUR DE DEMANDER AUX CANDIDATS DE PRODUIRE DES MOYENS DE PREUVE ÉQUIVALENTS AUX CERTIFICATS - EXISTENCE [RJ1].

Résumé

39-02-005 Le pouvoir adjudicateur peut, sur le fondement du II de l'article 45 du code des marchés publics (CMP), demander aux candidats de produire, à titre de moyen de preuve équivalent aux trois certificats de qualification professionnelle mentionnés dans le règlement de la consultation, des références de prestations accompagnées d'attestations délivrées par un tiers indépendant, si celles-ci sont destinées, comme la certification exigée, à prouver la qualité technique des prestations antérieurement effectuées par le candidat dans les domaines couverts par les certifications en cause.

Source : DILA, 23/03/2016, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

ECLI:FR:CESSR:2012:355564.20120411

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Conseil d'État

Date : 11/04/2012