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CAA de PARIS, 4ème chambre, 24/09/2021, 19PA00755, Inédit au recueil Lebon

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Président : Mme HEERS

Rapporteur : M. Pascal MANTZ

Commissaire du gouvernement : M. BARONNET

Avocat : PIEUX


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Cabinet d'architecture W. B... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner la commune de Hienghène (Province nord) à lui verser la somme globale de 8 423 875 francs CFP, correspondant à la note d'honoraires " WP 1077 - décompte d'honoraires n°2 " du 15 janvier 2018, émise en règlement d'un marché de maîtrise d'œuvre relatif à un projet de construction d'une stèle commémorative et d'un musée à Tiendanite, ainsi qu'à l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1800290 du 13 décembre 2018, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 février 2019, la SARL Cabinet d'architecture W. B..., représentée par Me Pieux, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Hienghène à lui verser la somme de 3 423 875 francs CFP, correspondant à la note d'honoraires " WP 1077 - décompte d'honoraires n°2 " du 15 janvier 2018 précitée ;

3°) de condamner la commune de Hienghène à lui verser la somme de 5 000 000 francs CFP, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi, tiré de l'atteinte à sa réputation et à son image ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Hienghène la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa mission se limitait à une étude architecturale relative au projet de musée et de stèle et ne concernait pas le projet d'urbanisation du village de Hienghène ;
- l'imprécision du contrat oral passé avec la commune de Hienghène, notamment sur son objet et son prix, ne saurait constituer un motif de nullité de ce contrat ;
- l'objet du contrat était nettement déterminé, conformément aux dispositions de l'article 1er de la délibération n° 136/CP du 1er mars 1967 portant réglementation des marchés publics ;
- l'existence d'un contrat administratif verbal de maîtrise d'œuvre résulte de ce que la commune a entendu lui confier la réalisation d'une étude relative à un lieu de recueillement et de mémoire, mission de service public selon la jurisprudence administrative ;
- elle peut se prévaloir d'un tel contrat et du paiement de ses honoraires dès lors que le seuil de 20 000 000 francs CFP prévu à l'article 1er de la délibération précitée concernant la passation des marchés publics n'était pas atteint, s'agissant d'un marché de prestation intellectuelle pour lequel aucun texte ne fixe d'obligation d'un contrat écrit en deçà de ce seuil ;
- les premiers juges se sont laissés tromper par la présentation erronée par la commune de Hienghène d'un contrat global pour l'urbanisation du village, alors même que celle-ci n'ignorait pas qu'elle s'était limitée à lui demander une étude architecturale ;
- elle a subi un préjudice d'atteinte à sa réputation et à son image du fait du non-respect par la commune de ses engagements.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2019, la commune de Hienghène conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SARL Cabinet d'architecture W. B... de la somme de 500 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 136/CP du 1er mars 1967 modifiée portant réglementation des marchés publics ;
- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mantz,
- et les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Cabinet d'architecture W. B... relève appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Hienghène à lui verser la somme globale de 8 423 875 francs CFP au titre de prestations exécutées dans le cadre d'un marché de maîtrise d'œuvre d'étude et de conception dont elle estime être titulaire, relatif à un projet de construction d'une stèle commémorative et d'un musée à Tiendanite, ainsi qu'au titre de l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi, tiré de l'atteinte à sa réputation et à son image.

Sur la responsabilité contractuelle :

2. Aux termes de l'article 1er de la délibération n° 136/CP du 1er mars 1967 portant réglementation des marchés publics : " Toute dépense publique se rapportant à un objet unique nettement déterminé, dont la fourniture ou l'exécution est assurée à la Nouvelle-Calédonie, aux provinces, aux communes de Nouvelle-Calédonie et à leurs établissements publics par une personne physique ou morale doit donner lieu à un marché soumis aux règles fixées ci-après, sauf dispositions contraires prévues par délibération du congrès dès lors que son montant excède 20.000.000 F CFP ". Aux termes de l'article 2 de la même délibération : " Les marchés sont des contrats écrits dont les cahiers des charges sont des éléments constitutifs. Ils sont passés après mise en concurrence dans les conditions prévues au titre 1er. / Ils doivent être conclus et notifiés avant tout commencement d'exécution ".

3. La SARL Cabinet d'architecture W. B... soutient qu'elle aurait passé un contrat verbal avec la commune de Hienghène, tendant à l'élaboration d'une étude architecturale concernant la réalisation d'un mémorial et d'une stèle sur le site de Tiendanite. Elle invoque notamment au soutien de ce moyen une lettre de la commune du 29 février 2016 adressée à la direction des infrastructures, de la topographie et des transports terrestres de
Nouvelle-Calédonie, un courriel de la commune relatif à une demande de devis du
7 décembre 2016 ainsi que deux comptes-rendus de réunion des 24 février 2017 et 1er juin 2017, impliquant divers intervenants dont M. A... B... à propos de projets architecturaux concernant la commune. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que la SARL Cabinet d'architecture W. B... et la commune de Hienghène auraient convenu de la chose et du prix, les deux parties étant au contraire en désaccord sur l'objet de ce prétendu contrat. Par suite, la SARL Cabinet d'architecture W. B... ne peut être regardée comme invoquant des éléments probants de nature à justifier l'existence d'un contrat verbal. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que la commune de Hienghène aurait approuvé tacitement le contrat invoqué par la société requérante, l'existence d'une telle approbation étant en tout état de cause exclue dès lors que ce contrat était susceptible de relever de l'article 2 de la délibération du 1er mars 1967 susvisée qui exige que les marchés dont le montant est supérieur à 20 000 000 francs CFP revêtent une forme écrite. Par suite, la SARL Cabinet d'architecture W. B..., qui ne peut se prévaloir d'aucun contrat régulièrement intervenu, ne saurait utilement rechercher la responsabilité contractuelle de la commune de Hienghène aux fins d'être rémunérée des prestations réalisées. Pour les mêmes motifs, la société requérante ne peut utilement invoquer la faute contractuelle qu'aurait commise cette commune en ne respectant pas ses engagements et en s'abstenant de la rémunérer.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Cabinet d'architecture W. B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant au paiement de la note d'honoraires " WP 1077 - décompte d'honoraires n°2 " du 15 janvier 2018.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Hienghène, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Cabinet d'architecture W. B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la SARL Cabinet d'architecture W. B... la somme demandée par la commune de Hienghène sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Cabinet d'architecture W. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Hienghène présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Cabinet d'architecture W. B... et à la commune de Hienghène.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente-assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 septembre 2021.
Le rapporteur,




P. MANTZ
La présidente,




M. HEERS La greffière,




S. GASPAR

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
4
N° 19PA00755



Abstrats

39-02 Marchés et contrats administratifs. - Formation des contrats et marchés.

Source : DILA, 05/10/2021, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Paris

Date : 24/09/2021