Président :
Mme VIDAL
Rapporteur :
M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Commissaire du gouvernement :
Mme ANTONIAZZI
Avocat :
SELARL SOLER-COUTEAUX ET ASSOCIES
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 10 octobre 2019, sous le n° 19NC02944, et trois mémoires, enregistrés les 10 septembre 2020, 12 août 2021 et 6 janvier 2022, la SA Marly distribution, représentée par Me Soler-Couteaux, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté n° PC 57447 18 Y0023 du 13 août 2019 par lequel le maire de la commune de Marly a refusé de lui délivrer un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale pour un projet d'extension d'un ensemble commercial situé rue de la Belle Fontaine dans la zone d'aménagement concerté " Bellefontaine " à Marly et de création d'un espace culturel et technique ;
2°) d'enjoindre au maire de Marly de lui délivrer le permis de construire demandé ou, à défaut, de réexaminer sa demande de permis de construire sollicitée après un nouvel examen par la Commission nationale d'aménagement commercial, dans un délai maximum de quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la cour administrative d'appel de Nancy est territorialement compétente pour connaître de ce recours ;
- le signataire de l'arrêté du 13 août 2019 était incompétent ;
- la Commission nationale d'aménagement commercial a porté une appréciation erronée sur son projet, au regard des critères fixés par l'article L. 752-6 du code du commerce, s'agissant notamment de la localisation et des impacts du projet sur l'animation de la vie urbaine, de sa qualité environnementale et de son effet sur la consommation économe de l'espace en termes de stationnement et d'imperméabilisation des sols ;
- en estimant que la desserte incendie du projet était insuffisante et faisait courir un risque pour la sécurité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire a entaché le refus de permis de construire d'une erreur d'appréciation ; au demeurant, il ne pouvait pas refuser le permis de construire pour ce motif dès lors qu'un tel risque, à supposer qu'il existe, pouvait être prévenu par des prescriptions spéciales.
Par trois mémoires en défense, enregistrés les 20 avril 2020, 3 août et 14 septembre 2021, la société Cora, représentée par Me Le Fouler, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'il soit mis à la charge de la SA Marly distribution la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré au greffe de la cour le 26 mai 2020, confirmé par un envoi par voie électronique le 03 juin 2020, la commune de Marly conclut au rejet de la requête ;
Elle fait valoir que les moyens soulevés par les sociétés requérantes ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête ;
Elle fait valoir que :
- l'Etat n'étant pas partie à l'instance, les conclusions de la SA Marly distribution tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ont pour effet de rendre irrecevable la requête de la SA Marly distribution ;
- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,
- les observations de Me Erkel, pour la SA Marly distribution, ainsi que celles de Me Le Fouler, pour la société Cora.
Considérant ce qui suit :
1. La SA Marly distribution exploite au sein de la zone d'aménagement commercial Bellefontaine, située sur le territoire de la commune de Marly en Moselle, un ensemble commercial à l'enseigne E. Leclerc comprenant un hypermarché et une galerie marchande. Le 24 décembre 2018, elle a sollicité du maire de Marly la délivrance d'un permis de construire devant tenir lieu d'autorisation d'exploitation commerciale afin, d'une part, d'étendre les surfaces de vente de l'hypermarché et de sa galerie marchande respectivement de 2 800 m² de 100 m² et, d'autre part, de créer un espace culturel et technique de 1 200 m². Le 1er avril 2019, la commission départementale d'aménagement commercial de la Moselle a émis un avis favorable à ce projet. Saisie d'un recours par la société Cora, la Commission nationale d'aménagement commercial a en revanche émis un avis défavorable, qui s'est substitué à celui de la commission départementale. Par un arrêté du 13 août 2019, dont la SA Marly distribution demande l'annulation, le maire de Marly a refusé le permis de construire sollicité, au double motif de l'avis défavorable rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial et d'une desserte incendie estimée insuffisante.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la Commission nationale d'aménagement commercial :
2. Il résulte de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme et des articles L. 752-17 et R. 751-8 du code de commerce que l'Etat a la qualité de partie au litige devant une cour administrative d'appel, saisie en premier et dernier ressort d'un recours pour excès de pouvoir, formé par l'une des personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du code de commerce, tendant à l'annulation de la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire en tant qu'elle concerne l'autorisation d'exploitation commerciale. Ainsi, et en tout état de cause, la Commission nationale d'aménagement commercial n'est pas fondée à soutenir qu'en demandant que soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui ne serait pas partie à l'instance, la SA Marly distribution aurait présenté à la cour une requête irrecevable. Il y a lieu, par suite, d'écarter la fin de non-recevoir opposée par la SA Marly distribution.
Sur la légalité de la décision du 13 août 2019 :
En ce qui concerne l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :
3. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 (...) ". L'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par ces dispositions.
4. Il ressort des pièces du dossier, notamment du dossier de demande constitué par la société pétitionnaire et du rapport d'instruction de la Commission nationale d'aménagement commercial, que l'hypermarché E. Leclerc exploité par la SA Marly distribution est implanté au sein de la zone d'aménagement commercial Bellefontaine, située sur le territoire de la commune de Marly, à 1,5 kilomètres du centre-ville de cette commune et à environ 6 kilomètres au Sud de Metz, zone qui accueille en outre une vingtaine d'enseignes de commerces alimentaires et non alimentaires. Le projet soumis à la Commission nationale d'aménagement commercial par la SA Marly distribution portait sur une extension des surfaces de vente de cet hypermarché et de sa galerie marchande, constituée de 15 boutiques, pour les porter, respectivement, de 7 200 à 10 000 m² et de 1 200 à 1 300 m², sans création de boutique nouvelle, ainsi que sur l'ouverture d'un espace culturel et technique de 1 200 m². L'extension envisagée de 2 800 m² de la surface de vente de l'hypermarché incluait 968 m² de surface de vente exploités depuis 2008 dans le cadre des mesures provisoires de la loi LME. Le projet concerne plus précisément trois zones d'extension positionnées pour deux d'entre-elles à l'arrière du site, en extrémité Nord/Nord-Ouest du bâtiment et, pour la troisième, en façade Est, cette dernière devant recevoir l'extension de la surface de vente attribuée à l'hypermarché ainsi que l'extension du mail de la galerie marchande. Il est prévu que cette extension soit réalisée en partie dans l'enveloppe du bâtiment existant, déjà imperméabilisée, sur des surfaces jusqu'alors dédiées aux réserves, chambres froides et laboratoires, et en partie à l'extérieur, en continuité du bâtiment actuel, sur des zones situées dans les enclaves du bâtiment. La zone de chalandise délimitée par le pétitionnaire s'étend sur 69 communes sur un temps maximum de déplacement en voiture d'environ 25 minutes, cette zone étant limitée au Nord, par l'attraction du centre-ville de Metz et du Cora de Metz-Borny, la Moselle, la rocade Sud et l'autoroute A 31, à l'Est, par l'éloignement et par l'attraction du Cora de Metz-Borny, au Sud, par l'éloignement et par l'attraction des villes de Toul et de Nancy, à l'Ouest, par l'attraction de la Zone Commerciale Cora de Moulins-lès-Metz/Jouy-aux-Arches. Enfin, ce projet fait suite à l'avis défavorable émis le 7 décembre 2017 par la Commission nationale d'aménagement commercial à l'égard d'un précédent projet portant sur une extension des surfaces de vente de l'hypermarché et de la galerie marchande de 6 800 et 1 500 m² et sur la création de quatre boutiques supplémentaires, projet qui se caractérisait par une augmentation sensible du trafic routier et de l'imperméabilisation des sols ainsi que par une absence de recours aux énergies renouvelables.
5. En premier lieu, la Commission nationale d'aménagement commercial a relevé que le projet décrit au point précédent était susceptible de porter atteinte aux équilibres commerciaux du territoire considéré et, en particulier, de fragiliser les magasins du centre-ville de Metz alors que la population de la zone de chalandise tend à diminuer. Toutefois, et alors que la commission n'a pas expressément remis en cause la zone de chalandise délimitée par la société pétitionnaire dont le centre-ville de Metz était exclu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet d'extension en cause, dont l'ampleur a été significativement réduite par rapport au précédent projet et qui a pour but principal le réaménagement des espaces de circulation de l'hypermarché et de sa galerie marchande en vue d'un meilleur confort d'achat pour la clientèle ainsi que la création d'un espace culturel et technique, dont le centre-ville de Metz, contrairement à la zone de chalandise du projet, n'est pas dépourvu, soit de nature à porter atteinte à l'animation de la vie urbaine par une concurrence excessive aux magasins du centre-ville de Metz, au demeurant préservés de l'attraction de la zone d'aménagement commercial Bellefontaine, eu égard aux temps de trajet, non plus qu'aux commerces alimentaires implantés au sein de cette zone d'aménagement commercial. Le projet en cause a d'ailleurs reçu l'avis favorable de la direction départementale des territoires et de la mer de la Moselle et du ministre chargé du commerce, qui ont estimé qu'il ne bouleverserait pas les équilibres commerciaux existants et était situé dans une zone commerciale existante, bien intégrée au tissu urbanisé de la commune, tandis que les présidents des fédérations des commerçants de Metz et de Montigny-lès-Metz ont indiqué ne pas y être opposés. La baisse démographique de la zone de chalandise du projet, au demeurant limitée, n'est pas de nature à remettre en cause cette appréciation. La création d'un espace culturel et technique, axé sur le multimédia, et destiné à lutter contre la concurrence reconnue du commerce en ligne, n'apparaît pas non plus susceptible de porter atteinte aux équilibres commerciaux des zones environnantes possédant une offre équivalente, non plus qu'à compromettre la possibilité de développer une telle offre dans le centre-ville même de Marly, alors que celui-ci est situé à seulement 1,5 kilomètre de l'ensemble commercial E. Leclerc et n'accueille depuis de nombreuses années que des petits commerces de quartier, sans qu'il soit établi qu'un projet de création d'un espace culturel y serait prévu ou attendu, ni que ces petits commerces, dont aucun ne bénéficie d'un financement du FISAC, connaitraient des difficultés de nature à fragiliser l'animation urbaine de ce centre-ville.
6. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 5 que le projet d'extension présenté par la SA Marly distribution doit être réalisé en partie dans l'enveloppe du bâtiment existant, déjà imperméabilisée, sur des surfaces jusqu'alors dédiées aux réserves, chambres froides et laboratoires, et en partie à l'extérieur, en continuité du bâtiment actuel, sur des zones situées dans les enclaves du bâtiment. La Commission nationale d'aménagement commercial a certes relevé qu'une importante extension du parc de stationnement avait été réalisée en 2015, comprenant l'aménagement de 1 188 places de stationnement de plain-pied, imperméabilisées et sans végétation. Toutefois, et s'il appartenait à la commission de prendre en compte cette extension du parc de stationnement dans le cadre de son appréciation des impacts du projets, il ressort des pièces du dossier que les travaux réalisés en 2015 n'ont pas consisté en la création de 1 188, mais uniquement de 179 places de stationnement, les autres places ayant simplement fait l'objet d'une réfection, tandis que 167 des places nouvellement crées, destinées au personnel, ont été réalisées en pavés drainants de manière à en assurer la perméabilité. Ainsi, ni l'objectif de consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement, ni celui de la qualité environnementale du point de vue de l'imperméabilisation des sols ne sont mis en cause par le projet d'extension de la SA Marly distribution.
7. En troisième lieu, la Commission nationale d'aménagement commercial a relevé que le dossier de la société pétitionnaire était insuffisamment explicite sur les gains d'énergie réalisés dans le cadre des travaux envisagés pour la rénovation du bâtiment, que les efforts en matière d'isolation du bâtiment existant semblent trop limités, le pétitionnaire indiquant simplement que le bâtiment se rapprochera au maximum des enjeux de la RT 2012, que, notamment, la mise en place de toitures végétalisées ne concernerait que les extensions du bâtiment déjà en place et qu'au titre des énergies renouvelables, le projet ne prévoyait que 806 m² de panneaux photovoltaïques. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'affirmation de la SA Marly distribution selon laquelle le bâtiment se rapprocherait au maximum des enjeux de la réglementation technique 2012 concernait, non pas les constructions nouvelles dont l'autorisation d'exploitation faisait l'objet de la demande soumise à la commission, mais le bâtiment existant, qui n'était pas soumis, ratione temporis, à cette réglementation technique 2012. En revanche, le respect de cette réglementation par les bâtiments nouvellement construits n'est pas en cause. Les efforts évoqués dans le dossier de la société pétitionnaire tant pour les bâtiments anciens que nouveaux concerne, outre l'installation de 806 m² de panneaux photovoltaïques, la réfection de l'isolation de la toiture du bâtiment existant, une requalification des façades et leur isolation et l'installation de nouveaux systèmes de chauffage et de climatisation, notamment la mise en place de pompes à chaleur permettant une gestion centralisée. A cet égard, il n'apparaît pas que les installations et les performances énergétiques annoncées dans le dossier de la société pétitionnaire seraient insuffisantes, tandis qu'il appartenait à la commission d'exercer son appréciation sur la base des informations et engagements figurant dans le dossier de la société pétitionnaire, tenue légalement au respect de ces engagements, et non au regard d'un doute, au demeurant insuffisamment caractérisé, sur son intention de respecter de tels engagement. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le projet d'extension litigieux, qui n'était pas tenu d'apporter des améliorations aux bâtiments existants et qui comporte cependant, pour l'ensemble de ses bâtiments, notamment ceux devant être construits, une série de dispositifs visant la performance énergétique et le recours aux énergies renouvelables, était de nature à compromettre sur ces points l'objectif de qualité environnementale.
8. Il résulte de ce qui précède que la SA Marly distribution est fondée à soutenir que le projet d'extension des surfaces commerciales de son hypermarché et de sa galerie marchande et de création d'un espace culturel et technique n'était pas de nature à compromettre la réalisation des objectifs énoncés par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce, notamment des objectifs d'aménagement du territoire et de développement durable. En émettant un avis défavorable à ce projet au motif qu'il portait atteinte à de tels objectifs, la Commission nationale d'aménagement commercial a fait une inexacte application de ces dispositions.
S'agissant du motif tiré de l'insuffisance de la desserte incendie :
9. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". En vertu de cet article, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
10. Dans son arrêté du 13 août 2019, le maire de Marly a estimé que la desserte incendie afférente au projet d'extension de la SA Marly distribution était insuffisante. Devant la cour, la commune de Marly fait valoir que la sous-commission départementale pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public et les immeubles de grande hauteur a rendu un avis favorable avec prescriptions au projet le 21 février 2019, selon lequel la défense extérieure contre l'incendie devrait être réalisée par des hydrants garantissant un débit simultané de 300 mètres cubes par heure sous une pression comprise entre 1 et 4 bars et que le premier hydrant devrait se situer à moins de 150 mètres de l'établissement par les voies normales de circulation. Il n'est ni établi, ni même allégué par la commune que le permis de construire n'aurait pas pu être délivré en étant assorti de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, auraient permis d'assurer la prise en compte de ces préconisations. Dès lors, en refusant le refus de permis de construire par un second motif tiré de l'insuffisance de la desserte incendie, le maire de Marly a méconnu l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Marly distribution est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 13 août 2019 par lequel le maire de la commune de Marly a refusé de lui délivrer un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. En vertu des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, le juge administratif peut, s'il annule la décision prise par l'autorité administrative sur une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale et en fonction des motifs qui fondent cette annulation, prononcer une injonction tant à l'égard de l'autorité administrative compétente pour se prononcer sur la demande de permis qu'à l'égard de la Commission nationale d'aménagement commercial. La circonstance qu'elle soit chargée par l'article R. 752-36 du code de commerce d'instruire les recours dont elle est saisie ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif lui enjoigne, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de prendre une mesure dans un sens déterminé si les motifs de la décision juridictionnelle l'impliquent nécessairement. Toutefois, l'annulation de la décision rejetant une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale sur le fondement d'un avis défavorable rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial n'implique, en principe, qu'un réexamen du projet par cette commission. Il n'en va autrement que lorsque les motifs de l'annulation impliquent nécessairement la délivrance d'un avis favorable.
13. Eu égard aux motifs d'annulation retenus par le présent arrêt, l'exécution de celui-ci implique que la Commission nationale d'aménagement commercial émette un avis favorable au projet de la SA Marly distribution et que le maire de la commune de Marly réexamine la demande de permis de construire de cette société en tenant compte, notamment, de la possibilité d'accorder ce permis de construire assorti de prescriptions permettant la prise en compte des exigences de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en matière de défense incendie. Il y a lieu d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial d'émettre cet avis favorable dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et au maire de Marly de procéder au réexamen de la demande de la SA Marly distribution dans un délai de deux mois suivant la réception de l'avis qui sera ainsi rendu par la commission.
Sur les frais liés à l'instance :
14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
15. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SA Marly distribution, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le montant des frais d'instance exposés par la société Cora et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SA Marly distribution d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'arrêté n° PC 57447 18 Y0023 du 13 août 2019 par lequel le maire de la commune de Marly a refusé de délivrer à la SA Marly distribution un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial d'émettre, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, un avis favorable sur le projet de la SA Marly distribution tendant à l'extension d'un ensemble commercial situé rue de la Belle Fontaine dans la zone d'aménagement concerté " Bellefontaine " à Marly et à la création d'un espace culturel et technique.
Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Marly de réexaminer, dans un délai de deux mois suivant la réception de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial mentionné à l'article 2, la demande de permis de construire de la SA Marly distribution en tenant compte des motifs du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la SA Marly distribution la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Marly distribution, à la commune de Marly, à la Commission nationale d'aménagement commercial et à la société Cora.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 5 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Vidal, présidente de chambre,
- M. Rees, président-assesseur,
- M. Goujon-Fischer, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mai 2022.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente,
Signé : S. Vidal
La greffière,
Signé : S. Robinet
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
S. Robinet
2
N° 19NC02944
Abstrats
14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Réglementation des activités économiques. - Activités soumises à réglementation. - Aménagement commercial.
Source : DILA, 07/06/2022, https://www.legifrance.gouv.fr/