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CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 08/03/2021, 19BX01550, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. ARTUS

Rapporteur : Mme Fabienne ZUCCARELLO

Commissaire du gouvernement : Mme MOLINA-ANDREO

Avocat : DYKMAN


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le président du syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation (SMICVAL) du Libournais Haute-Gironde lui a infligé la sanction de mise à la retraite d'office.

Par un jugement n° 1705345 du 27 février 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 avril 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 février 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2017 par lequel le président du syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation (SMICVAL) du Libournais Haute-Gironde lui a infligé la sanction de mise à la retraite d'office ;

3°) d'enjoindre au SMICVAL de le réintégrer et de reconstituer sa carrière ;

4°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et du SMICVAL la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- la sanction est disproportionnée dès lors que le conseil de discipline a estimé dans son avis du 7 septembre 2017 que sa participation au vol de batteries n'était pas établie ;
- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation et repose sur des faits matériellement inexacts ;
- l'annulation de la sanction entraînera sa réintégration ; il est privé d'emploi depuis le 23 mai 2017 ; son employeur devra procéder à la reconstitution de sa carrière.

Par un mémoire enregistré le 8 janvier 2021, le SMICVAL, représenté par Me H..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 16 mai 2019.

Vu :
- les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... I...,
- les conclusions de Mme K..., rapporteure publique,
- et les observations de Me E..., représentant M. C..., et de Me J..., représentant le SMICVAL.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été titularisé le 1er septembre 2012 en qualité d'adjoint technique territorial par le président du syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation du Libournais Haute-Gironde (SMICVAL) sur l'emploi de ripeur qu'il occupait depuis septembre 2007. M. C... a ensuite, en raison d'une inaptitude physique consécutive à un accident de la vie domestique, bénéficié d'un reclassement professionnel en tant qu'agent d'accueil en pôle de recyclage au sein du service pôle de recyclage et transport de Saint-Mariens. A la suite du visionnage d'images issues de la vidéosurveillance du site, enregistrées au cours des mois de janvier et février 2017, la direction du SMICVAL a établi le 14 février 2017 un rapport disciplinaire à l'encontre de M. C... à qui il est reproché d'avoir récupéré des matériaux déposés par les usagers de la déchetterie alors que toute récupération est interdite, d'avoir été complice de vols de batteries, d'être l'auteur de plusieurs manquements au règlement du SMICVAL, tels que ne pas avoir respecté différentes consignes de sécurité et avoir été présent sur le site pendant ses jours de repos gênant le bon fonctionnement du service. Après avoir été suspendu de ses fonctions M. C... a été sanctionné d'une mise à la retraite d'office par arrêté du président du SMICVAL du 17 octobre 2017. M. C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler cet arrêté. Il relève appel du jugement du 27 février 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ; (...) ". Selon l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges, la décision attaquée comporte les motifs de droit qui ont justifié la sanction et expose de manière précise les griefs et les circonstances sur lesquels l'autorité territoriale s'est fondée pour retenir l'existence d'une faute de nature à entrainer une sanction disciplinaire et notamment la participation à des vols de batteries, la récupération illicite d'objets, des manquements dans le respect des consignes de travail et du règlement intérieur en ce qui concerne le tagage des objets déposés, les jours et heures de travail, l'accueil et l'enregistrement des usagers, leur orientation et leur surveillance. Cette décision précise l'incidence des agissements du requérant sur le fonctionnement et sur l'image du SMICVAL. La décision attaquée est ainsi suffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : (...); / Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

5. M. C... fait valoir que la décision de le sanctionner d'une mise à la retraite d'office repose sur des faits qui ne sont pas matériellement établis et qu'elle est entachée d'erreur d'appréciation. La décision attaquée repose sur des faits de participation du requérant avec d'autres agents à des vols de batteries et métaux déposés par des usagers de la déchetterie caractérisant un manquement à la probité et au devoir de loyauté, sur la récupération et le détournement d'objets mis en déchetterie alors que cette pratique est interdite dans le règlement intérieur et dans les consignes du SMICVAL à ses agents, sur le non-respect des consignes de travail et sur une présence gênant le fonctionnement du service sur le pôle recyclage de Saint-Mariens pendant ses jours de repos.

6. Il ressort des pièces du dossier et en particulier des images des enregistrements de vidéosurveillance du pôle de recyclage de Saint-Mariens, qui ont été visionnés en raison de nombreux vols détectés que, le 9 février 2017, M. C... a positionné un bac jaune de collecte rempli de batteries, qui sont des matériaux à haute valeur marchande, et qui n'avaient été ni enregistrées ni taguées, en contrebas du local où sont stockés les déchets électriques, facilitant ainsi les vols par des tiers. Le 11 février 2017, il a été constaté par deux responsables du site qu'un bac jaune rempli de 4 batteries non taguées se trouvait positionné au même endroit alors que M. C... venait de terminer son service. Ainsi, le SMICVAL établit que M. C... a placé ces batteries dans un lieu destiné à en faciliter le vol par lui-même ou par d'autres personnes extérieures et qu'il a ainsi joué un rôle dans l'organisation d'un trafic. Dès lors qu'il s'agissait d'objets destinés à être valorisés par le SMICVAL, la réalité des participations aux vols reprochés, au mieux en qualité de complice, doit être regardée comme établie. Par ailleurs, il n'est pas contesté que M. C..., qui était informé par le règlement intérieur et des rappels de sa hiérarchie que ce comportement était interdit, se rendait sur le site de la déchetterie pendant ses jours de repos nuisant ainsi au fonctionnement du service. De même, l'exploitation de la vidéosurveillance a permis de démontrer que M. C... remettait à des tiers des objets déposés par les usagers et appartenant au SMICVAL, tel qu'un plafonnier. Enfin, il n'est pas davantage contesté que les images de vidéosurveillance qui ont été visionnées les 8 et 11 février 2017, montrent que M. C... a laissé entrer sur le site des usagers qu'il n'a ni enregistré ni guidés ni surveillé en méconnaissance des missions de l'agent valoriste telles que récapitulées dans la fiche de poste et des consignes de travail que le requérant a contresignées le 27 mai 2016.

7. Ces agissements constituent un manquement grave à l'obligation de probité et au devoir d'obéissance attendus d'un fonctionnaire et sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.

8. Eu égard à la nature des faits reprochés à M. C... et à leur ampleur, et bien que M. C... bénéficie d'une ancienneté dans ses fonctions, en prononçant à raison des faits cités ci-dessus, la sanction de mise à la retraite d'office de M. C..., lequel est né en 1957, le président du SMICVAL n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2017.

10. Le présent arrêt qui rejette les conclusions de M. C..., n'implique aucune mesure d'exécution et fait obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du SMICVAL et, en tout état de cause, de l'Etat à lui verser une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. C... la somme que le SMICVAL demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


DECIDE :


Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du SMICVAL au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C... et au syndicat mixte intercommunal de collecte et de valorisation du Libournais Haute-Gironde.
Délibéré après l'audience du 1er février 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme F... I..., présidente-assesseure,
Mme D... A..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2021.

Le président,
Didier ARTUS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
5
N° 19BX01550



Abstrats

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.

Source : DILA, 16/03/2021, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Bordeaux

Date : 08/03/2021