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CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 12/11/2015, 14VE00801, Inédit au recueil Lebon

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Président : Mme SIGNERIN-ICRE

Rapporteur : M. Jean-Edmond PILVEN

Commissaire du gouvernement : Mme MEGRET

Avocat : MIRABEAU


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et MmeA..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leur enfants mineurs, ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à les indemniser des préjudices résultant de l'accident dont leur fils C...a été victime le 12 mai 2006 au sein de l'école maternelle et primaire Edith Gorce-Franklin à Neuilly-sur-Seine.

Par un jugement n° 1103086 du 29 mars 2012, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a, après avoir jugé que l'accident en cause était imputable à un défaut d'organisation dans le service de la surveillance de nature à engager la responsabilité de l'État, ordonné une expertise aux fins de décrire la nature et l'étendue des préjudices subis par l'enfant du fait de l'accident.

Par un jugement n° 1103086 du 16 janvier 2014, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a condamné l'État à verser à M. D... A...et Mme B...A..., pris séparément et à chacun d'eux, la somme de 2 500 euros, aux intéressés pris solidairement et en qualité de représentants légaux respectivement de leur fils C...et de leur fille Oriane, les sommes de 8 000 euros et de 500 euros, et a décidé qu'il y avait lieu de déduire de ces sommes la somme de 6 000 euros ayant pu être versée à titre de provision en exécution de l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 3 mai 2012.


Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 mars 2014, M. et MmeA..., représentés par Me Mirabeau, avocat, demandent à la Cour :

1° de réformer le jugement du 16 janvier 2014 en tant qu'il limite leur indemnisation aux sommes susmentionnées ;

2° de porter les sommes auxquelles l'État est condamné à 80 000 euros au titre des préjudices personnels subis par leur fils, à 9 000 euros au titre des préjudices patrimoniaux supportés par M.A..., à 5 000 euros au titre des préjudices personnels subis par chacun des deux parents, et à 1 000 euros pour le préjudice personnel subi par leur fille ;

3° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme A...soutiennent que :

- le jugement du 29 mars 2012 par lequel le tribunal administratif a jugé que la responsabilité de l'Etat est engagée dans la survenance de l'accident est devenu définitif ; par un arrêt du 3 mai 2012, la Cour d'appel de Versailles a également retenu la responsabilité de l'État pour défaut de surveillance et l'a condamné à leur verser une provision de 6 000 euros ; la Cour de cassation ayant cassé cet arrêt le 16 janvier 2014, ils saisiront à nouveau la Cour d'appel dans le délai imparti ;
- les sommes allouées par le tribunal administratif sont nettement sous-évaluées au regard de ce qui est retenu par la jurisprudence pour des accidents de ce type ou pour des accidents moins graves ; l'état de santé de leur fils ne pourra être évalué qu'à la fin de sa puberté ;
- cet accident a eu des répercutions sur la carrière professionnelle de M. A...qui a dû changer de travail pour s'occuper de sa famille ;
- les préjudices personnels subis par la famille doivent prendre en compte la pression exercée par la commune et un déménagement en bord de mer rendu nécessaire pour la santé de leur enfant.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,
- et les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public.


1. Considérant que, le 12 mai 2006,C... A..., alors âgé de cinq ans, a chuté d'un toboggan de la cour de récréation de l'école maternelle et élémentaire Edith Gorce-Franklin à Neuilly-sur-Seine, où il était scolarisé ; qu'à la suite de cet accident, qui lui a occasionné une fracture-tassement de la vertèbre D12, l'enfant a dû porter un corset thoraco-lombaire pendant plus de trois mois et demi puis une ceinture de soutien lombaire au cours des quatre mois suivants ; que, par une demande enregistrée le 15 avril 2011, M. et Mme A..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs, ont demandé la condamnation de l'État à réparer les conséquences dommageables de l'accident subi par leur fils sur le fondement du défaut d'organisation du service public et du défaut d'exercice par le chef de l'établissement de sa mission de sécurité des personnes et des biens ; que, par un jugement du 29 mars 2012, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que l'accident était imputable à un défaut d'organisation dans le service de la surveillance, de nature à engager la responsabilité de l'État et a ordonné une expertise afin d'évaluer les préjudices subis par l'enfant ; que la responsabilité des enseignants et de la directrice de l'école ayant été également recherchée par les époux A...devant la juridiction judiciaire, la Cour d'appel de Versailles, par un arrêt en date du 3 mai 2012, a ordonné une expertise afin de déterminer les préjudices subis par la victime et ordonné le versement par l'Etat d'une provision de 6 000 euros aux requérants ; que le rapport d'expertise, en date du 8 novembre 2012, a été déposé près la Cour d'appel de Versailles le 14 janvier 2013 ; que, par un jugement du 16 janvier 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir constaté que la mesure d'expertise qu'il avait ordonnée était devenue inutile compte tenu de l'expertise ordonnée par la Cour d'appel de Versailles qui avait le même objet, a, au vu du rapport de l'expert déposé devant le juge judiciaire, condamné l'État à verser à M. et Mme A...la somme de 2 500 euros chacun au titre de leurs préjudices personnels, la somme de 8 000 euros, en leur qualité de représentants légaux de leur fils, et la somme de 500 euros, en leur qualité de représentants de leur fille, et a décidé qu'il y avait lieu de déduire de ces sommes la somme de 6 000 euros ayant pu être versée par l'Etat à titre de provision en exécution de l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du
3 mai 2012 ; qu'estimant que les indemnités allouées par le tribunal administratif sont insuffisantes, M. et MmeA..., qui précisent que l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 3 mai 2012 a été annulé en toutes ses dispositions par un arrêt de la cour de cassation du
16 janvier 2014, font appel de ce jugement ;

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le toboggan, duquel le jeune
C...A...est tombé le 12 mai 2006, ne faisait pas l'objet d'une surveillance effective au moment de l'accident ; qu'ainsi cet accident est imputable à un défaut d'organisation du service de nature à engager la responsabilité de l'Etat, comme l'a retenu à bon droit le tribunal administratif ; que l'Etat ne conteste d'ailleurs pas sa responsabilité en appel ;

3. Considérant, en premier lieu, que, pour demander une augmentation de l'indemnité allouée par le tribunal administratif s'agissant de l'indemnisation des préjudices personnels subis par leur fils, M. et MmeA..., qui se fondent comme le ministre chargé de l'éducation nationale sur les conclusions du rapport d'expertise médicale du 8 novembre 2012, se bornent à faire référence à des indemnisations intervenues dans d'autres litiges, relatifs à des préjudices de nature différente ; que le ministre de l'éducation nationale se fonde, pour sa part, sur les indemnisations résultant du barème précis de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, en fonction de chaque type de préjudice, dont il résulte effectivement que le préjudice du jeune C...n'a pas été sous évalué en première instance ; que, dans ces conditions, faute de tout élément probant de nature à établir que la somme retenue par le tribunal administratif, au vu des préjudices décrits dans le rapport d'expertise médicale, serait erronée, les requérants ne sont pas fondés à demander que l'indemnité allouée au titre du préjudice personnel subi par leur enfant soit portée à
80 000 euros ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant du préjudice patrimonial qu'il aurait subi, M. A...soutient que l'accident dont son fils a été victime l'a contraint à abandonner sa carrière de clerc de notaire et à adopter une vie nomade entre Paris et la province ; qu'il n'apporte toutefois, pas plus en appel qu'en première instance, d'éléments de nature à justifier le lien de causalité direct entre un tel préjudice et l'accident dont il s'agit, ni même d'éléments de nature à établir la réalité de ce préjudice, en se bornant à produire une attestation datée du
15 juin 2010 du notaire chez lequel il était employé jusqu'en février 2008 indiquant seulement qu'il était démotivé dans son travail de clerc de notaire et souhaitait changer de vie pour s'occuper de sa famille ; qu'il ne produit, de surcroît, aucun élément de nature à justifier, notamment, une perte de revenus à l'occasion de ce changement de profession ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'indemnisation de ce préjudice patrimonial à hauteur de 9 000 euros ne peuvent qu'être rejetées ;

5. Considérant, enfin, que, s'agissant des préjudices subis par M. et Mme A...et par leur fille, les requérants indiquent qu'un déménagement en bord de mer a été rendu nécessaire pour assurer le bien-être du jeune C...et qu'un changement d'école de leurs enfants a été nécessaire pour préserver la famille des pressions subies par la commune ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Neuilly-sur-Seine aurait exercé de quelconques pressions sur la famille de M. et Mme A...ni que ces derniers auraient déménagé en bord de mer alors qu'il est seulement établi que les enfants des requérants ont été retirés de leur école Edith Gorce-Franklin à Neuilly-sur-Seine pour être scolarisés à l'école
La Saussaye, située elle aussi à Neuilly-sur-Seine ; que, par suite, leurs conclusions tendant à l'augmentation à hauteur de 5 000 euros pour chaque parent et de 1 000 euros pour leur fille de l'indemnisation que l'État a été condamnée à verser M. et Mme A...ainsi qu'à leur fille, ne peuvent qu'être rejetées ;


6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a limité l'indemnisation que l'État a été condamné à verser à chacun d'entre eux et au titre de leur préjudice personnel, à la somme de 2 500 euros, et solidairement en qualité de représentants légaux de leur fils, à la somme de 8 000 euros, et en qualité de représentants légaux de leur fille, à la somme de 500 euros ; qu'en revanche, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 1, la Cour de cassation, par son arrêt du 16 janvier 2014, a annulé l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 3 mai 2012 en toutes ses dispositions, il y a lieu de réformer le jugement attaqué en tant qu'il prévoit la prise en compte de la provision de 6 000 euros allouée par l'arrêt du
3 mai 2012 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions des requérants tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1103086 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du
16 janvier 2014 est réformé en tant qu'il prévoit la prise en compte de la provision de
6 000 euros allouée aux époux A...par l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du
3 mai 2012.
Article 2 : Le surplus de la requête de M. et Mme A...est rejeté.
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N° 14VE00801 2




Abstrats

60-02-015-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de l'enseignement. Organisation du service.

Source : DILA, 24/11/2015, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Versailles

Date : 12/11/2015