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Cour Administrative d'Appel de Nantes, 4ème chambre, 14/06/2016, 14NT00819, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. LAINE

Rapporteur : Mme Sophie RIMEU

Commissaire du gouvernement : M. GAUTHIER

Avocat : SELARL PUBLI-JURIS


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne à lui verser la somme de 29 682,43 euros au titre de prestations réalisées dans le cadre de l'opération d'extension, de restructuration et d'humanisation des bâtiments du centre hospitalier.

Par un jugement n°1204526 du 5 février 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces complémentaires, enregistrés le 28 mars 2014, le 20 mars 2015 et le 17 mars 2016, M. A..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 février 2014 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne à lui verser la somme de 29 682,43 euros au titre des prestations réalisées dans le cadre de l'opération d'extension, de restructuration et d'humanisation des bâtiments du centre hospitalier ;

3°) de mettre à la charge de du centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- en prononçant ses conclusions en tant que rapporteur public lors de l'audience du 8 janvier 2014, alors qu'il s'était déjà prononcé sur le même litige en référé en qualité de rapporteur, le rapporteur public a méconnu le principe d'impartialité ;
- le tribunal a insuffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de l'existence d'une promesse tenant à la révision de la rémunération de la mission de maîtrise d'oeuvre ;
- en jugeant qu'il n'était pas fondé à rechercher la responsabilité quasi-délictuelle du centre hospitalier, alors qu'il invoquait la responsabilité délictuelle de celui-ci, les premiers juges ont entaché leur jugement d'une contradiction de motifs ;
- il justifie avoir effectivement réalisé les prestations pour lesquelles il avait émis deux factures ; il est fondé à solliciter le paiement de ces prestations directement au centre hospitalier, en sa qualité de sous-traitant non déclaré ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'existence d'un engagement ferme, portant révision des prix, n'est pas subordonné à la signature d'un avenant ;
- le centre hospitalier a tacitement accepté la révision des prix initiaux, par un courrier du 18 mai 2010, lui donnant droit à être indemnisé pour un montant de 28 704 euros TTC.


Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 juillet 2014 et le 21 mars 2016, le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne, représenté par MeB..., conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que soit mis à la charge de M. A...le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués par M. A...ne sont pas fondés.


Par ordonnance du 5 avril 2016, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu, ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de M. Le Rouzic, avocat stagiaire, en présence de MeD..., représentant M.A..., et celles de MeE..., représentant le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne.

Une note en délibéré, présentée pour M.A..., a été enregistrée le 30 mai 2016 ;

1. Considérant que dans le cadre de l'opération d'extension, de restructuration et d'humanisation de ses bâtiments, le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne a conclu, le 29 mai 2000, un marché de maîtrise d'oeuvre avec un groupement, dont le mandataire était le cabinet Roch, devenu le cabinet Roch Atic ; que, par un contrat de sous-traitance signé le 8 janvier 2007, le cabinet Roch a confié à M. A... une mission de bureau d'études technique (BET) généraliste pour un montant forfaitaire de 90 400 euros HT ; que M. A...relève appel du jugement du 5 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui verser, d'une part, la somme de 978,43 euros en paiement de deux factures au titre du solde de prestations sous-traitées pour les missions de type DET et OPC et, d'autre part, la somme de 28 704 euros au titre de surcoûts liés à l'allongement de la durée des travaux ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, qu'eu égard à la nature de son office, le juge des référés, statuant en matière de provision, doit nécessairement, pour trancher le litige qui lui est soumis, donner une réponse sur l'existence de l'obligation invoquée ; que, par suite, le principe d'impartialité fait obstacle à ce que le magistrat qui a rendu une ordonnance sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative siège à nouveau lors du jugement au fond de cette affaire par le tribunal administratif ; que, toutefois, dès lors qu'aux termes de l'article R. 732-2 du code de justice administrative " La décision est délibérée hors la présence des parties et du rapporteur public. ", le rapporteur public qui, avant de prononcer des conclusions lors de l'audience intervenant pour le jugement au fond de l'affaire, s'est prononcé en qualité de juge des référés sur une demande de provision, ne peut être regardé comme ayant siégé à nouveau pour le jugement au fond ; qu'en effet, aucune règle générale de procédure, notamment pas le principe d'impartialité, n'interdit à un membre d'une juridiction administrative ayant statué en tant que juge du référé provision sur le caractère non sérieusement contestable d'une obligation, d'exercer ensuite les fonctions de rapporteur public lors de l'examen, en formation collégiale, du bien fondé de la même créance ; que par suite, c'est sans méconnaître le principe d'impartialité que le raporteur public du tribunal administratif de Nantes a conclu lors de l'audience du 8 janvier 2014, alors qu'il avait, comme juge des référés, rejeté, par une ordonnance du 22 février 2012, la demande de provision de M. A...portant sur les mêmes sommes ;

3. Considérant, d'autre part, que le jugement attaqué, qui précise que le courrier du 18 mai 2010 adressé par le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne au cabinet Roch-Atic ne fait état que de l'éventualité de conclure un avenant, a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de ce que le centre hospitalier se serait engagé à payer les sommes évoquées dans ce courrier ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne au versement de la somme de 978, 43 euros :

4. Considérant que les dispositions du titre II de la loi du 31 décembre 1975, relatives au paiement direct des sous-traitants, s'appliquent, en vertu de l'article 4 de la même loi, " aux marchés passés par l'Etat, les collectivités locales, les établissements et entreprises publics " sous réserve que leur montant soit supérieur ou égal à six cents euros ; que celles de son titre III, relatives à l'action directe des sous-traitants, s'appliquent, aux termes de l'article 11 de la même loi, " à tous les contrats de sous-traitance qui n'entrent pas dans le champ d'application du titre II " ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article 14-1, inséré au titre III de cette loi : " Pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics : / - le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations. " ; que la loi du 11 décembre 2001 a complété cet alinéa pour préciser que " Ces dispositions s'appliquent aux marchés publics et privés " ; que le législateur a ainsi entendu, par dérogation aux dispositions de l'article 11 de la même loi, que l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 s'impose à l'ensemble des marchés de sous-traitance, que leurs modalités de paiement relèvent du titre II ou du titre III de la loi du 31 décembre 1975 ; qu'il résulte de ces dispositions que, en invoquant sa situation de sous-traitant non déclaré, M. A...doit être regardé comme recherchant la responsabilité quasi-délictuelle du centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne, déjà invoquée en première instance, sur le fondement des dispositions de l'article 14-1 du titre III de la loi du 31 décembre 1975 ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des échanges de courriels entre M. A...et l'établissement et des comptes rendus des réunions de chantier, que le centre hospitalier ne pouvait pas ignorer, au moins dès le début de l'année 2009, que M. A...participait aux missions de maîtrise d'oeuvre ; que si le centre hospitalier a finalement, au dernier trimestre de l'année 2009, à la suite d'un changement de directeur, demandé au cabinet Roch Atic de régulariser la situation de M.A..., cette demande apparaît tardive au regard des informations dont il disposait, et elle n'a de plus été concrétisée, par l'acceptation de M. A...et l'agrément de ses conditions de paiement, que le 15 avril 2010 ; que dans ces conditions, M. A...est fondé à soutenir que le centre hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que cette faute est cependant atténuée aux deux tiers par les fautes également commises par le cabinet Roch Atic, qui n'a pas déclaré son sous-traitant, et par M. A...lui-même, qui doit être regardé comme ayant négligé de s'assurer de l'acceptation de sa sous-traitance dès lors qu'il n'établit pas avoir essayé de régulariser sa situation ;

6. Considérant, toutefois, que les deux factures, d'un montant total de 978,43 euros correspondent à l'achèvement des missions ordonnancement, coordination et pilotage du chantier (OPC) et direction et comptabilité des travaux (DET) qui étaient confiées à M. A...par son contrat de sous-traitance ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, notamment des échanges de courriers entre le cabinet Roch Atic et M.A..., que ce dernier avait exécuté l'ensemble de ses missions ; que dans ces conditions, la réalité des prestations dont le paiement est demandé, et le préjudice subi par M.A..., ne peuvent être regardés comme établis ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui verser la somme de 978, 43 euros ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne au versement de la somme de 28 704 euros :

7. Considérant que M. A...soutient que le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne aurait commis une faute en ne respectant pas son engagement de lui verser la somme de 28 704 euros, qu'il estime lui être due en raison de l'allongement de la durée du chantier ; que cependant, d'une part, il n'était pas destinataire du courrier du 18 mai 2010, dont résulte selon lui cet engagement, et d'autre part, ce courrier du centre hospitalier au cabinet Roch Atic se bornait à proposer au groupement de maîtrise d'oeuvre, titulaire du marché, la négociation d'un avenant afin de répondre à la demande faite par celui-ci de réviser les prix forfaitaires du marché pour tenir compte de l'allongement de la durée des travaux, sans comporter le moindre engagement à l'égard du sous-traitant ; que dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne à lui verser la somme de 28 704 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne, qui n'est pas la partie perdante, verse à M. A...une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


DECIDE :


Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...A...et au centre hospitalier de Corcoué-sur-Logne.


Délibéré après l'audience du 24 mai 2016, à laquelle siégeaient :


- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller,


Lu en audience publique, le 14 juin 2016.


Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. C...

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°14NT008192



Source : DILA, 21/06/2016, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Nantes

Date : 14/06/2016