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Cour administrative d'appel de Paris, 5ème Chambre, 09/04/2015, 13PA00770, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. FORMERY

Rapporteur : M. Philippe BLANC

Commissaire du gouvernement : M. LEMAIRE

Avocat : SYMCHOWICZ & WEISSBERG


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2013, présentée pour la commune de Noisiel, par Me Symchowicz, avocat à la Cour ; la commune de Noisiel demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002212/5 et 1003810/5 du 18 décembre 2012 en tant que le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du maire de Noisiel en date du 10 mars 2010 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de Mme A...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Noisiel soutient que :

- le tribunal administratif a admis à tort la recevabilité de la demande de MmeA... ; cette demande n'a pas été motivée dans le délai de recours contentieux ; en l'absence de moyen de droit développé par l'intéressée, la requête introductive d'instance de Mme A...devant le tribunal ne répondait pas aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, alors même que cette demande avait été présentée sans avoir recours au ministère d'avocat ; que le mémoire enregistré par l'intéressée le 3 juin 2011 n'a pas eu pour effet de régulariser sa demande, qui était irrecevable ;

- le tribunal administratif a statué ultra petita en prononçant l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010, alors qu'il n'était pas saisi d'une demande présentée en ce sens par MmeA... ; ni la requête introductive d'instance présentée par MmeA..., ni les mémoires complémentaires ultérieurement produits devant les premiers juges ne comportent de conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 10 mars 2010 ;

- le tribunal administratif a soulevé d'office, pour prononcer l'annulation de l'arrêté litigieux, un moyen dont Mme A...ne s'était pas prévalue et qui n'était pas d'ordre public ;

- elle n'avait pas, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, à examiner les droits à congé de grave maladie de l'intéressée avant de décider d'interrompre le versement de son traitement, dès lors que Mme A...n'a jamais présenté de demande en ce sens et qu'elle ne remplissait pas, en tout état de cause, les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice d'un tel congé ; la procédure applicable à l'octroi d'un congé de grave maladie à un agent non titulaire en application de l'article 8 du décret du 15 février 1988 est identique à celle applicable aux agents titulaires, laquelle implique qu'une demande soit formulée par l'agent, accompagnée d'un certificat de son médecin traitant, spécifiant qu'il est susceptible de bénéficier d'un tel congé, conformément à ce que prévoient les dispositions des articles 18 et 25 du décret du 30 juillet 1987 ;

- il n'est pas établi que l'état de santé de Mme A...à la date de l'arrêté litigieux était susceptible de relever d'une grave maladie au regard des conditions prévues par l'article 8 du décret du 15 février 1988 et aurait dû justifier la saisine par la commune d'un médecin agréé avant de décider d'interrompre le versement à l'intéressée de son traitement ;

- la demande de dommages et intérêts présentée par Mme A...devant le tribunal administratif est irrecevable, en l'absence de liaison du contentieux, à défaut d'avoir été précédée d'une réclamation préalable ;

- les demandes présentées par Mme A...devant le tribunal administratif tendant, d'une part, à ce qu'il constate la résiliation du contrat, et d'autre part, à la communication des bulletins de paie depuis le mois d'avril 2010, sont également irrecevables en ce qu'elles excèdent les pouvoirs du juge administratif, celui-ci ne pouvant s'immiscer dans l'exécution d'un contrat en prononçant sa résiliation et ne disposant de pouvoir d'injonction que dans les limites et les conditions prévues par l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée, dès lors qu'elle était fondée à interrompre le versement à Mme A...de son traitement ; en ne produisant aucun certificat pour la période postérieure au 12 février 2010, Mme A...n'a pas satisfait aux conditions de l'article 7 du décret du 15 février 1988, auxquelles est subordonné le bénéfice d'un congé maladie, s'est ainsi mise en situation d'absence injustifiée et s'est exposée à ce qu'aucun traitement ne lui soit plus versé en l'absence de service fait ; à l'issue de ce congé, soit à partir du 1er avril 2010, Mme A...était, en tout état de cause, tenue de reprendre spontanément son activité, ce qu'elle n'a pas fait ;

- elle n'avait pas à organiser une " visite de reprise " de Mme A...par la médecine du travail, dès lors que les dispositions du code du travail dont se prévaut l'intéressée ne lui étaient pas applicables ;

- le taux d'invalidité reconnu à Mme A...par la caisse primaire d'assurance maladie n'emporte pas d'effets spécifiques quant à sa relation de travail avec la commune ; Mme A...n'était nullement dispensé de justifier de ce qu'elle pouvait prétendre à l'un des congés pour raison de santé prévus par le titre III du décret du 15 février 1988, à défaut de reprendre son poste à l'expiration de son congé maladie ;

- Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû faire l'objet d'un licenciement pour inaptitude définitive en application des dispositions de l'article 13 du décret du 15 février 1988, dès lors que son inaptitude définitive n'a pas été constatée par le médecin agréé, qui a été saisi à deux reprises par la commune, lequel n'a conclu qu'à une inaptitude partielle, puis, qu'à une inaptitude temporaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2013 présenté pour Mme C...A..., demeurant..., par Me Lederlin, avocat à la Cour, par lequel elle conclut au rejet de la requête de la commune de Noisiel et à ce que soit mise à la charge de celle-ci une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A...soutient que :

- les premiers juges ont à bon droit estimé qu'à la date de l'arrêté litigieux, soit le 10 mars 2010, elle remplissait les conditions prévues par l'article 8 du décret du 15 février 1988 et qu'elle était susceptible de bénéficier en application de ces dispositions d'un congé grave maladie, dès lors qu'elle était dans l'impossibilité d'exercer son activité, ainsi que l'avait constaté tant le docteur Verne, dans le cadre de l'expertise réalisée le 5 mars 2010, que le docteur Dubucs, à la suite de la visite de reprise du 22 février 2010 ; la commune n'a pas pu légalement décider d'interrompre le versement de son traitement, au motif d'un prétendu service non fait, alors qu'aucun nouveau poste compatible avec les réserves formulées dans les certificats établis par ces médecins ne lui avait été proposé ;

- la situation dans laquelle la commune de Noisiel l'a maintenue pendant une durée de deux ans sans traitement, sans saisir le comité médical départemental de son cas, lui a causé un préjudice financier dont elle demande réparation ; la commune refuse à tort d'exécuter le jugement rendu par le tribunal administratif ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 12 juin 2013 présenté pour MmeA..., par lequel celle-ci conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; elle demande en outre à la Cour :

1°) par la voie de l'appel incident, de condamner la commune de Noisiel à lui verser la somme de 36 049,44 euros correspondant au traitement dont elle estime avoir été illégalement privée au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2012 ;

2°) d'enjoindre à la commune de procéder au paiement de cette somme sans délai à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) d'ordonner les mesures qu'implique l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Melun du 18 décembre 2012 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 16 juillet 2013, présenté pour la commune de Noisiel, par lequel celle-ci conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et demande en outre à la Cour de rejeter les conclusions d'appel présentées par MmeA... ;

Elle soutient en outre que :

- Mme A...n'est pas fondée à soutenir qu'elle remplissait, dès le mois de mars 2010, les conditions prévues par l'article 8 du décret du 15 février 1988 pour bénéficier d'un congé de grave maladie, dès lors qu'elle n'établit pas qu'elle était atteinte d'une affection la mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité ; celle-ci reconnait d'ailleurs elle-même qu'elle était à cette date apte au travail ; la circonstance qu'elle n'ait pas proposé, dès le mois de mars 2010, le reclassement de l'intéressée, est sans incidence à l'égard de l'illégalité reprochée par les premiers juges, de ne pas avoir examiné le droit de Mme A...à bénéficier d'un congé de grave maladie ;

- elle a décidé à bon droit, par arrêté du 10 mars 2010, de suspendre le versement du traitement de MmeA..., dès lors, d'une part, que celle-ci n'avait pas présenté le certificat médical prévu par l'article 7 du décret du 15 février 1988, auquel est subordonné le bénéfice d'un congé maladie, d'autre part, que Mme A...avait épuisé ses droits à rémunération depuis le 1er octobre 2009 en application des mêmes dispositions, enfin, que Mme A...n'avait pas justifié de son absence ;

- les conclusions présentées par Mme A...tendant à l'exécution du jugement attaqué en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative sont irrecevables, à défaut d'avoir fait l'objet d'une requête distincte de celle donnant lieu à la présente instance tendant à l'annulation du même jugement ; de telles conclusions sont, en tout état de cause, dépourvues d'objet, dès lors que la Cour annulera le jugement du 18 décembre 2012 ;

- la demande de Mme A...tendant à ce que la commune lui verse la somme de 36 049,44 euros est, en tout état de cause, infondée, faute pour l'intéressée de justifier des bases de calcul de la somme qu'elle réclame ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées les 27 mars et 31 mars 2015, présentées pour la commune de Noisiel, par Me B...;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 mars 2015, présentée pour MmeA..., par Me Lederlin ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 26 mars 2015 :

- le rapport de M. Blanc, premier conseiller,

- les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public,

- les observations de MeB..., substituant Me Symchowicz, avocat de la commune de Noisiel ;

- et les observations de Me Lederlin, avocat de MmeA... ;

1. Considérant que Mme A...était employée, depuis le 1er mars 1991, par l'association " office municipal de l'enfance de Noisiel ", en tant qu'animatrice auprès des enfants dans les centres de loisirs et les accueils périscolaires de la commune de Noisiel ; que, dans le cadre de la reprise en régie des activités de cette association, elle a été recrutée en vertu d'un contrat à durée indéterminée par la commune pour exercer les mêmes fonctions à compter du 1er avril 2009, en bénéficiant d'une reprise de son ancienneté ; qu'à cette date, en raison de problèmes de santé, Mme A... a été placée en congé de maladie en application de l'article 7 du décret du 15 février 1988 ; que par arrêté du 10 mars 2010, le maire de la commune de Noisiel a décidé d'interrompre le versement du traitement de l'intéressée à compter du 13 février 2010, au motif que celle-ci n'avait pas justifié de son absence depuis cette dernière date ; que la commune de Noisiel fait appel du jugement du 18 décembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Melun a fait partiellement droit à la demande de MmeA... et a annulé cet arrêté ; que Mme A...demande, par la voie de l'appel incident, la condamnation de la commune de Noisiel à lui verser une somme de 36 049,44 euros correspondant au traitement dont elle estime avoir été illégalement privée, et d'autre part, d'ordonner les mesures qu'implique l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Melun du 18 décembre 2012 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, pour annuler l'arrêté du 10 mars 2010, le Tribunal administratif de Melun a considéré, d'une part, que le maire de Noisiel avait commis une erreur d'appréciation en décidant la suspension du versement du traitement de Mme A...à une date antérieure à celle à laquelle un médecin agréé avait estimé que l'intéressée pouvait reprendre des fonctions, et d'autre part, que l'arrêté litigieux devait être annulé, en l'absence d'avis d'un médecin agréé se prononçant sur l'éventuel droit à un congé de grave maladie de Mme A... ;

3. Mais, considérant que si Mme A...a contesté le bien-fondé du motif sur lequel l'arrêté du 10 mars 2010 était fondé pour en demander au tribunal administratif l'annulation, il ne ressort ni des termes de la requête de première instance, ni de ses mémoires ultérieurs présentés devant le tribunal, qu'elle ait reproché au maire de Noisiel d'avoir commis une erreur quant à la date d'interruption du versement de son traitement ou d'avoir entaché son arrêté d'un vice de procédure ; qu'ainsi, les premiers juges se sont fondés à tort sur ces moyens, qui n'étaient pas d'ordre public, pour annuler l'arrêté litigieux ; qu'ainsi, le jugement du 18 décembre 2012 doit, dans cette mesure, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement dans le présent arrêt, par la voie de l'évocation, sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010 et, par la voie de l'effet dévolutif, sur les autres conclusions présentées par Mme A...devant le tribunal administratif ;

Sur les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeA... :

En ce qui concerne les fins de non recevoir opposées par la Commune de Noisiel :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge " ;

6. Considérant qu'aux termes de sa requête introductive d'instance, enregistrée le 1er avril 2010 par le greffe du tribunal administratif, sous le n° 102212, MmeA..., qui n'était pas alors représentée par un avocat, a indiqué qu'elle entendait " déposer un recours par rapport à la lettre de son employeur en date du 10 mars 2010 " ; qu'ainsi, cette requête, en dépit de la maladresse des termes dans laquelle elle était formulée, doit être regardée comme comportant, conformément à ce que prévoit l'article R. 411-1 précité, l'énoncé de conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010 ;

7. Considérant, par ailleurs, qu'il ressort des termes de l'arrêté litigieux que, pour justifier l'interruption du traitement de MmeA..., le maire de Noisiel s'est borné à reprocher à celle-ci de ne pas avoir justifié ses absences depuis le 13 février 2010, sans faire référence, ni viser les dispositions du décret du 15 février 1988 applicables à l'intéressée, ni aucun autre texte sur lequel le maire aurait entendu se fonder ; qu'en faisant valoir qu'il ne pouvait lui être reproché des absences injustifiées, dès lors qu'elle estimait ne pas avoir à présenter de nouveaux arrêts maladie depuis que son invalidité avait été reconnue au cours du mois de janvier 2010, Mme A...a indiqué de manière suffisamment précise qu'elle contestait le bien-fondé du motif de l'arrêté contre lequel elle déclarait former un recours, alors même qu'elle n'a pas elle-même expressément fait référence aux dispositions du décret du 15 février 1988, dont elle entendait invoquer la méconnaissance ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la commune de Noisiel, sa requête doit être regardée comme ayant été suffisamment motivée au regard des exigences de l'article R. 411-1 précité ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 10 mars 2010 :

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, l'arrêté du 10 mars 2010, par lequel le maire de Noisiel a interrompu le versement du traitement de MmeA..., a été pris au motif que l'intéressée n'avait pas justifié ses absences depuis le 13 février 2010 ; que, toutefois, il est constant que Mme A...avait informé les services de la commune de Noisiel de l'invalidité qui lui avait été reconnue, dès le 14 janvier 2010, réduisant sa capacité de travail et s'opposant à ce qu'elle reprenne les fonctions exercées antérieurement à son congé de maladie ; que le motif retenu par le maire de Noisiel, aux termes de l'arrêté litigieux, ne pouvait, dès lors, légalement justifier que le versement du traitement de l'intéressée soit interrompu ;

9. Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 15 février 1988, susvisé : " L'agent non titulaire en activité bénéficie, sur présentation d'un certificat médical, de congés de maladie pendant une période de douze mois consécutifs ou, en cas de service discontinu, au cours d'une période comprenant trois cents jours de services effectifs, dans les limites suivantes :/ 1° Après quatre mois de services, un mois à plein traitement et un mois à demi-traitement ; / 2° Après deux ans de services, deux mois à plein traitement et deux mois à demi-traitements ; / 3° Après trois ans de services, trois mois à plein traitement et trois mois à demi-traitement " ; et qu'aux termes de son article 8 : " L'agent non titulaire en activité employé de manière continue et comptant au moins trois années de services, atteint d'une affection dûment constatée, le mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée bénéficie d'un congé de grave maladie pendant une période maximale de trois ans./ Dans cette situation, l'intéressé conserve l'intégralité de son traitement pendant une durée de douze mois. Le traitement est réduit de moitié pendant les vingt quatre mois suivants./ En vue de l'octroi de ce congé, l'intéressé est soumis à l'examen d'un spécialiste agréé compétent pour l'affection en cause. La décision d'octroi est prise par le chef de service sur avis émis par le comité médical saisi du dossier. / La composition du comité médical et la procédure suivie sont celles prévues par la réglementation en vigueur pour les fonctionnaires titulaires. / Le congé pour grave maladie peut être accordé par période de trois à six mois. L'agent qui a épuisé un congé de grave maladie ne peut bénéficier d'un autre congé de cette nature s'il n'a repris auparavant l'exercice de ses fonctions pendant un an. " ; qu'aux termes de l'article 13 du même décret : " L'agent non titulaire temporairement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie, de grave maladie, de maternité, de paternité ou d'adoption est placé en congé sans traitement pour une durée maximale d'un an, qui peut être prolongée de six mois s'il résulte d'un avis médical que l'agent sera apte à reprendre ses fonctions à l'issue de cette période complémentaire. / Si l'agent se trouve à l'issue de la période de congé sans traitement dans la situation définie aux articles 9 ou 10, le bénéfice du congé prévu par l'un ou l'autre de ces articles lui est accordé. / L'agent non titulaire définitivement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie, de grave maladie, d'accident du travail, de maladie professionnelle, de maternité, de paternité ou d'adoption est licencié. (...) " ;

11. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'autorité administrative compétente ne peut légalement décider de suspendre le versement du traitement d'un agent non titulaire en activité, qui est employé de manière continue et compte au moins trois années de services, lorsqu'elle est informée que l'invalidité dûment constatée dont cet agent est atteint, le met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, sans avoir préalablement recherché, le cas échéant, de sa propre initiative, si l'intéressé peut bénéficier d'un congé de grave maladie dans les conditions prévues par l'article 8 du décret du 15 février 1988 ;

12. Considérant que, pour établir que l'arrêté litigieux du 10 mars 2010 serait légal, le maire de Noisiel invoque, aux termes de son mémoire en date du 16 juillet 2013, qui a été communiqué à MmeA..., un autre motif, tiré de ce que cette dernière avait épuisé, à la date de l'arrêté, les droits à congé de maladie auxquels elle pouvait prétendre en application de l'article 7 du décret du 15 février 1988 ;

13. Mais considérant qu'en application des dispositions précitées des articles 8 et 13 du décret du 15 février 1998 précitées, le maire de Noisiel, dès lors qu'il avait été informé de la gravité de l'état de santé de Mme A...et de l'invalidité reconnue à celle-ci, était tenu, avant de décider d'interrompre le versement du traitement de l'intéressée, compte tenu de l'ancienneté qu'elle avait acquise, de vérifier si elle ne pouvait pas bénéficier d'un congé de grave maladie, même s'il n'avait pas été expressément saisi d'une demande en ce sens ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, le maire de Noisiel ne pouvait prendre l'arrêté litigieux, sans recueillir l'avis d'un médecin spécialiste agréé dans les conditions prévues par l'article 8 du décret du 15 février 1988, afin que celui-ci se prononce sur la possibilité pour Mme A...d'obtenir le bénéfice d'un congé de grave maladie, et le cas échéant, au vu de l'avis de ce médecin, saisir le comité médical du dossier de Mme A...; que si le maire a saisi, le 26 février 2010, un médecin agréé afin qu'il se prononce sur l'aptitude de Mme A... à reprendre ses fonctions ou sur la possibilité d'un reclassement de celle-ci, il est constant qu'il n'a pas interrogé ce médecin sur la possibilité pour l'intéressée de bénéficier d'un congé de grave maladie ; que, dès lors, la substitution demandée par le Maire de Noisiel aurait pour effet de priver l'intéressée de la garantie que ces dispositions confèrent aux agents publics non titulaires ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu d'y procéder ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens présentés par MmeA..., que celle-ci est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010 par lequel le maire de Noisiel a décidé d'interrompre le versement de son traitement ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité présentées par Mme A...:

15. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " ;

16. Considérant que Mme A...demande la condamnation de la commune de Noisiel à lui verser une somme de 36 049,44 euros correspondant au traitement dont elle estime avoir été illégalement privée au titre de la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2012 ; que toutefois, Mme A...n'a pas, préalablement à la saisine du tribunal administratif, ni en cours de première d'instance, présenté, comme l'exigent les dispositions de l'article R. 421-1 précité, une réclamation à la commune de Noisiel pour demander la réparation du préjudice dont elle se prévaut devant le juge ; que la commune de Noisiel ayant soulevé à titre principal l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires présentées devant le tribunal pour défaut de réclamation préalable, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté, pour ce motif, cette demande ; que si Mme A...a présenté une telle réclamation, le 8 janvier 2013, qui a été rejetée par une décision du maire de Noisiel du 11 février 2013, elle n'a pu régulariser les conclusions indemnitaires présentées par l'intéressée, dès lors qu'elle a été effectuée postérieurement au jugement attaqué ; que la commune de Noisiel est, dès lors, fondée à soutenir que les conclusions à fin indemnitaire présentées par Mme A...sont, en tout état de cause, irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme A...:

17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ; qu'il appartient au juge, lorsqu'il est saisi de conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions, d'y statuer en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ;

18. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que le comité médical départemental, dans un avis du 15 novembre 2012, a déclaré Mme A...définitivement inapte à l'exercice de toutes fonctions et que le maire de Noisiel a procédé au licenciement de celle-ci pour inaptitude physique en application de l'article 13 du décret du 15 février 1988, à partir du 1er mars 2013, par arrêté du 11 février précédent ; qu'en raison de ce changement dans les circonstances de fait, l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010 litigieux n'implique plus nécessairement qu'une mesure soit prise dans un sens déterminé ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non recevoir opposées par la commune de Noisiel, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A...tendant à ce qu'elle soit convoquée à une visite de reprise du travail ou à ce que la commune procède à la résiliation de son contrat ne sont pas susceptibles d'être accueillies ;

19. Considérant que l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2010, par lequel le maire de Noisiel a suspendu le versement du traitement de Mme A...à compter du 13 février 2010 n'implique pas, pour la commune de Noisiel, de procéder à la communication à l'intéressée de ses bulletins de paye à compter du mois d'avril 2010 ;

Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 911-4 du code de justice administrative :

20. Considérant que l'annulation du jugement du 18 décembre 2012 rend sans objet les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeA..., qui n'est pas, pour l'essentiel, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Noisiel demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Noisiel une somme de 1 500 euros à verser à MmeA... sur le fondement des mêmes dispositions ;


D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 18 décembre 2012 est annulé en tant que le Tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du maire de Noisiel en date du 10 mars 2010.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions présentées en appel par Mme A... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative.
Article 3 : L'arrêté du maire de Noisiel en date du 10 mars 2010 est annulé.
Article 4 : La commune de Noisiel versera une somme de 1 500 euros à Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par la commune de Noisiel et par Mme A...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Noisiel et à Mme C...A....
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,
- Mme Coiffet, président assesseur,
- M. Blanc, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 9 avril 2015.

Le rapporteur,
P. BLANC Le président,
S.-L. FORMERY Le greffier,
S. JUSTINE
La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13PA00770



Abstrats

36-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Questions d'ordre général.

Source : DILA, 11/05/2015, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Paris

Date : 09/04/2015