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Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 23/12/2013, 13BX00624, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. CHEMIN

Rapporteur : Mme Florence REY-GABRIAC

Commissaire du gouvernement : M. BENTOLILA

Avocat : THEOBALD


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 26 février 2013 et le 5 avril 2013, présentés pour la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour, dont le siège est situé 15 avenue Foch à Bayonne (64185), représentée par son président en exercice, par Me A...;

La communauté d'agglomération Côte Basque-Adour demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201677 du 20 décembre 2012 du tribunal administratif de Pau qui a annulé, sur déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques, le contrat de travail du 3 mai 2012 par lequel le président de la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour a engagé M. B... en qualité de directeur général des services techniques ;

2°) de rejeter le déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques présenté devant le tribunal administratif de Pau ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens comprenant la contribution à l'aide juridique de 35 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 1999/70/CE du Conseil de l'Union Européenne du 28 juin 1999 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

Vu la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2013 :

- le rapport de Mme Rey-Gabriac, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Bentolila, rapporteur public ;


1. Considérant que le président de la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour a, le 3 mai 2012, recruté M. B...par un contrat à durée indéterminée sur l'emploi fonctionnel de directeur général des services techniques ; que la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour fait appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 20 décembre 2012 qui a, sur déféré du préfet des Pyrénées-Atlantiques, annulé ce contrat de travail au motif qu'il ne pouvait être conclu pour une durée indéterminée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes des stipulations de la clause 4, relative au principe de non-discrimination, de l'accord-cadre concernant le travail à durée déterminée, que la directive 1999/70/CE du Conseil de l'Union Européenne du 28 juin 1999 a pour objet de mettre en oeuvre : " 1. Pour ce qui concerne les conditions d'emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d'une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu'ils travaillent à durée déterminée, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives. (...) 3. Les modalités d'application de la présente clause sont définies par les Etats membres, après consultation des partenaires sociaux, et/ou par les partenaires sociaux, compte tenu de la législation Communautaire et de la législation, des conventions collectives et pratiques nationales. (...) ", et qu'aux termes des stipulations de la clause 5 du même accord-cadre, relative aux mesures visant à prévenir l'utilisation abusive des contrats à durée déterminée : " 1. Afin de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, les Etats membres, après consultation des partenaires sociaux, conformément à la législation, aux conventions collectives et pratiques nationales, et/ou les partenaires sociaux, quand il n'existe pas des mesures légales équivalentes visant à prévenir les abus, introduisent d'une manière qui tienne compte des besoins de secteurs spécifiques et/ou de catégories de travailleurs, l'une ou plusieurs des mesures suivantes : a) des raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail ; b) la durée maximale totale de contrats ou relations de travail à durée déterminée successifs ; c) le nombre de renouvellements de tels contrats ou relations de travail. 2. Les Etats membres, après consultation des partenaires sociaux et/ou les partenaires sociaux, lorsque c'est approprié, déterminent sous quelles conditions les contrats ou relations de travail à durée déterminée : a) sont considérés comme " successifs " ; b) sont réputés conclus pour une durée indéterminée. " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. " ; qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les dispositions de la présente loi s'appliquent aux personnes qui, régies par le titre Ier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales, ont été nommées dans un emploi permanent et titularisées dans un grade de la hiérarchie administrative des communes, des départements, des régions ou des établissements publics en relevant (...). " ; qu'aux termes de l'article 3-3 de la même loi, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l'article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu'aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi ; (...) Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par reconduction expresse, dans la limite d'une durée maximale de six ans. Si, à l'issue de cette durée, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. " ; que l'article 3-4 de cette même loi dispose : " II. - Tout contrat conclu ou renouvelé pour pourvoir un emploi permanent en application de l'article 3-3 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu pour une durée indéterminée. La durée de six ans mentionnée au premier alinéa du présent II est comptabilisée au titre de l'ensemble des services accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement dans des emplois occupés sur le fondement des articles 3 à 3-3. Elle inclut, en outre, les services effectués au titre du deuxième alinéa de l'article 25 s'ils l'ont été auprès de la collectivité ou de l'établissement l'ayant ensuite recruté par contrat. Pour l'appréciation de cette durée, les services accomplis à temps non complet et à temps partiel sont assimilés à des services effectués à temps complet. Les services accomplis de manière discontinue sont pris en compte, sous réserve que la durée des interruptions entre deux contrats n'excède pas quatre mois. Lorsqu'un agent remplit les conditions d'ancienneté mentionnées aux deuxième à quatrième alinéas du présent II avant l'échéance de son contrat en cours, les parties peuvent conclure d'un commun accord un nouveau contrat, qui ne peut être qu'à durée indéterminée. " ; que selon l'article 41 de la même loi du 26 janvier 1984, modifié par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 : " Lorsqu'un emploi permanent est créé ou devient vacant, l'autorité territoriale en informe le centre de gestion compétent qui assure la publicité de cette création ou de cette vacance (...). L'autorité territoriale pourvoit l'emploi créé ou vacant en nommant l'un des candidats inscrits sur une liste d'aptitude établie en application de l'article 44 ou l'un des fonctionnaires qui s'est déclaré candidat par voie de mutation, de détachement, d'intégration directe ou, le cas échéant et dans les conditions fixées par chaque statut particulier, par voie de promotion interne et d'avancement de grade. " ; que l'article 47 de la même loi, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004, prévoit que : " Par dérogation à l'article 41, peuvent être pourvus par la voie du recrutement direct, dans les conditions de diplômes ou de capacités fixées par décret en Conseil d'Etat, les emplois suivants : (...) Directeur général des services et directeur général des services techniques des communes de plus de 80 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 80 000 habitants ; (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 3 du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale : " L'agent non titulaire est recruté, soit par contrat, soit par décision administrative. L'acte d'engagement est écrit. Il précise l'article et, éventuellement, l'alinéa de l'article de la loi du 26 janvier 1984 précitée en vertu duquel il est établi. Il fixe la date à laquelle le recrutement prend effet et, le cas échéant, prend fin et définit le poste occupé et ses conditions d'emploi. (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles 3-3 et 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée que les contrats passés par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non titulaires doivent être conclus pour une durée déterminée, sauf dans le cas où le contrat est conclu avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans au moins sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique ; que les dispositions de l'article 47 de la loi du 26 janvier 1984 permettent, par dérogation aux règles générales de nomination aux emplois permanents, de pourvoir à un emploi fonctionnel, tel que celui de directeur général des services techniques d'une communauté d'agglomération de plus de 80 000 habitants, qui constitue un emploi permanent de cet établissement public, par voie de recrutement direct d'un agent non titulaire dans certaines conditions de diplômes ou de capacités ; que ces dispositions n'ayant pas par elles-mêmes pour objet ou pour effet de déterminer la durée du contrat conclu spécialement pour le recrutement d'un emploi fonctionnel, ne sauraient dès lors être interprétées comme autorisant la conclusion d'un contrat à durée indéterminée en dehors des hypothèses d'application générale prévues par les articles 3-3 et 3-4 précités de la loi du 26 janvier 1984 ;

5. Considérant que la directive 1999/70/CE du Conseil de l'Union Européenne du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée, qui vise notamment à prévenir l'utilisation abusive de contrats ou de relations de travail à durée déterminée successifs, et dont les dispositions ont été transposées en droit interne par la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, elles-mêmes complétées par une modification des dispositions législatives nationales statutaires par la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, ne s'oppose pas, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne [C-212/04 du 4 juillet 2006], au recours à la conclusion de contrats à durée déterminée, lorsqu'il existe pour cela des raisons objectives, justifiées par l'existence d'éléments concrets tenant notamment à l'activité en cause et aux conditions de son exercice ; que la nature des relations de travail des agents occupant un emploi fonctionnel, tel que celui de directeur général des services techniques d'une collectivité de plus de 80 000 habitants, fait qu'il existe, au sens de la directive du 28 juin 1999, eu égard à l'importance du rôle qui leur est dévolu et à la nature particulière des responsabilités qui incombe à ces agents qui peuvent être déchargés de leurs fonctions lorsqu'ils se trouvent placés dans une situation ne leur permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de leurs missions, des éléments concrets tenant notamment à l'activité en cause et aux conditions de son exercice permettant le recours à des contrats à durée déterminée ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu de poser sur ce point une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour n'est pas fondée à soutenir que l'article 47 de la loi du 26 janvier 1984, sur le fondement duquel a été conclu le contrat en litige, ne serait pas compatible avec les objectifs de la directive du 28 juin 1999 s'il devait être interprété comme pouvant justifier le recours à un contrat à durée déterminée et permettant d'exclure la conclusion d'un contrat à durée indéterminée ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé le contrat du 3 mai 2012 recrutant pour une durée indéterminée M. B...en qualité de directeur général des services techniques de cet établissement public ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la communauté d'agglomération Côte basque-Adour demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en application de l'article R. 761-1 du même code, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser la contribution à l'aide juridique à la charge de la communauté d'agglomération ;


DECIDE


Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération Côte Basque-Adour est rejetée.
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No 13BX00624




Abstrats

15-05-085 Communautés européennes et Union européenne. Règles applicables.
36-12-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Nature du contrat.

Source : DILA, 15/01/2014, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Bordeaux

Date : 23/12/2013