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COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 4ème chambre - formation à 3, 22/09/2011, 10LY00323, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. du BESSET

Rapporteur : Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL

Commissaire du gouvernement : Mme VINET

Avocat : SCP DUFAY-SUISSA-CORNELOUP


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 12 février 2010, présentée pour M. et Mme A, dont le domicile est ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700878 du 17 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision de signer le marché public de réalisation du réseau d'assainissement et de la station d'épuration de la commune de Colombier, ainsi que de la décision implicite par laquelle le maire a refusé de demander au conseil municipal de retirer la délibération du 19 octobre 2006 l'autorisant à signer ledit marché ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Colombier une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le jugement est insuffisamment motivé en se bornant à écarter le grief circonstancié tiré de l'insuffisante information des conseillers municipaux par une formulation générale ne tenant pas compte des circonstances de l'espèce ; que le jugement est entaché d'erreur de fait, la personne responsable du marché n'ayant pas pris la décision de recourir à la procédure négociée qui a été décidée par le conseil municipal ; que, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, la négociation a bien été menée avec des candidats n'ayant pas été admis à présenter une offre et sans que la procédure négociée ait été précédée de nouvelles mesures de publicité, en méconnaissance de l'article 35 du code des marchés publics ; que le jugement est entaché d'erreur dans la qualification juridique des faits, l'offre initialement présentée par la société Maitr'o n'ayant pas été inacceptable au sens du code des marchés publics alors qu'elle n'est supérieure que de 6,8 % à l'offre qui sera faite dans le cadre de la procédure négociée ; que l'offre présentée dans le cadre de l'appel d'offres restreint était parfaitement conforme et ne permettait pas de recourir à la procédure négociée, sauf pour le pouvoir adjudicateur à retenir une estimation irréaliste du prix pour pouvoir à coup sûr recourir à la procédure négociée ; que l'estimation initiale était irréaliste et ne permettait pas de considérer l'offre initiale de la société Maitr'o comme excessive ; que l'autorisation de signer le marché n'a pas été donnée au maire par le conseil municipal, la délibération du 19 octobre 2006 imprécise ne concernant pas la signature du marché et le maire ayant pris la décision seul et sans autorisation préalable ; que le conseil municipal a méconnu sa compétence en ne s'étant pas prononcé sur les éléments essentiels du marché et notamment pas sur son montant précis ni sur l'identité du futur cocontractant ;

Vu le jugement et les décisions attaquées ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2010, présenté pour la commune de Colombier qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que lorsque la commission a décidé d'opter pour la procédure négociée, il ne subsistait qu'une entreprise, les deux autres admises à l'origine n'ayant pas déposé d'offres ; que l'offre de la société Maitr'o, trop onéreuse, était inacceptable et justifiait, en application de l'article 35 du code des marchés publics, de recourir à la procédure négociée ; que ne voulant pas négocier avec des entreprises n'ayant pas déjà été admises à présenter une offre dans le cadre de l'appel d'offres déclaré infructueux, elle était dispensée de publicité ; que c'est bien la commission d'appel d'offres qui a, conformément à l'article 65 du code des marchés publics, déclaré l'appel d'offres infructueux, et le maire qui a décidé de recourir à la procédure négociée ; que le conseil municipal s'est prononcé sur la base du prix de l'offre rectificative lequel ne pouvait évoluer qu'à la baisse ; que le procès-verbal de la réunion du conseil municipal justifie que ce dernier disposait des éléments d'information essentiels ; que la délibération, qui retient l'offre de la société Maitr'o, a nécessairement donné au maire l'autorisation de signer l'acte d'engagement ;

Vu le mémoire enregistré le 24 août 2011 par lequel M. et Mme A concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens et par le motif, en outre, que la commune a admis explicitement que c'est la commission d'appel d'offres et non la personne responsable du marché qui a pris la décision de recourir à la procédure adaptée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2011 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

- les observations de Me Burnier, avocat de M. et Mme A,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Burnier ;

Considérant que, par un avis d'appel à la concurrence publié le 7 juillet 2006, la commune de Colombier a lancé une procédure d'appel d'offres restreint, pour l'attribution d'un marché de travaux de création du système collectif d'assainissement du bourg, auquel sept entreprises ont fait acte de candidature ; que sur les trois entreprises sélectionnées à l'issue de la première réunion de la commission d'appel d'offres, seul le groupement solidaire d'entreprises dont la société Maitr'o était mandataire a présenté une offre ; que la commission qui s'est réunie pour la deuxième fois le 25 septembre 2006, après examen de l'unique offre qui lui était ainsi soumise, a déclaré l'appel d'offres infructueux ; qu'il a été alors recouru à la procédure négociée aux termes de laquelle la commission d'appel d'offres a retenu l'offre du groupement représenté par la société Maitr'o ramenée à 410 278,20 euros ; que par délibération du 19 octobre 2006, le conseil municipal a décidé de retenir ladite offre et a autorisé le maire à signer tous les documents nécessaires à la réalisation du réseau d'assainissement et de la station d'épuration ; qu'en leur qualité de contribuables communaux M. et Mme A ont demandé au Tribunal administratif de Dijon l'annulation de la délibération du conseil municipal du 19 octobre 2006 et de la décision du maire de signer ledit marché public ;


Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'en écartant le moyen tiré du défaut d'information suffisante du conseil municipal, invoqué en première instance, au motif : que, d'autre part, il ressort de l'ensemble des pièces du dossier, et en particulier des termes mêmes de la délibération du 19 octobre 2006 ainsi que des précédentes délibérations adoptées sur le projet d'assainissement collectif de la commune, que le conseil municipal disposait d'informations suffisantes pour lui permettre d'exercer sa compétence ; que, dès lors, et contrairement à ce que soutiennent les époux A, le conseil municipal doit être regardé comme ayant valablement autorisé le maire à signer le marché de réalisation des travaux de construction du réseau d'assainissement et de la station d'épuration avec le Groupement Maitr'o pour un montant de 410 278 euros HT ; qu'en particulier, la circonstance que seul le nom du mandataire du groupement, qui assure en réalité l'essentiel des prestations dues au titre du marché, figure dans la délibération n'a pas été de nature, dans les circonstances de l'espèce, à créer une équivoque ni une insuffisance dans l'information qu'ont reçue les conseillers municipaux , le Tribunal administratif de Dijon, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments invoqués à l'appui de ce moyen, a suffisamment motivé son jugement ;


Sur le caractère infructueux de l'appel d'offres :

Considérant que la commission d'appel d'offres réunie le 25 septembre 2006, a déclaré l'appel d'offres infructueux eu égard au prix jugé excessif de la seule offre qui avait été présentée, par la société Maitr'o ; qu'il résulte de l'instruction que cette offre qui s'élevait à 440 432,20 euros excédait très largement l'estimation initiale de 295 452,50 euros faite par le maître d'oeuvre ; que la seule circonstance que le prix de 410 278,20 euros obtenu à l'issue de la négociation avec la société Maitr'o excédait lui même l'estimation initiale ne suffit pas à établir que cette dernière, dont il est constant qu'elle avait été faite sur la base des prix unitaires constatés dans le hameau de Pont d'Ouche pour des travaux du même ordre, aurait été irréaliste ; que, dans les circonstances de l'espèce, il ne résulte pas de l'instruction que l'appel d'offres aurait été mené dans des conditions qui ne permettaient pas sa réussite ; que, par suite, il a pu régulièrement être déclaré infructueux ;


Sur la procédure de marché négocié :

Considérant qu'aux termes de l'article 64 du code des marchés publics de 2004 applicable en l'espèce : [...] II. - La personne responsable du marché après avis de la commission d'appel d'offres pour l'Etat, [...] ou la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales, choisit l'offre économiquement la plus avantageuse en application du ou des critères annoncés dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation. / [...] / Lorsque aucune offre ne lui paraît acceptable au regard du ou des critères mentionnés à l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation, la personne responsable du marché sur proposition de la commission d'appel d'offres pour l'Etat, [...], ou la commission d'appel d'offres pour les collectivités territoriales, peut déclarer l'appel d'offres infructueux. Elle en avise tous les candidats. Elle peut alors procéder soit à un nouvel appel d'offres, soit, si les conditions initiales du marché ne sont pas modifiées, à un marché négocié conformément au I de l'article 35. / La personne responsable du marché peut à tout moment ne pas donner suite à l'appel d'offres pour des motifs d'intérêt général. ; et qu'aux termes de l'article 35 du même code : Il ne peut être passé de marchés négociés que dans les cas définis ci-dessous. / I. - Peuvent être négociés après publicité préalable et mise en concurrence : 1° Les marchés qui, après appel d'offres, n'ont fait l'objet d'aucune offre ou pour lesquels il n'a été proposé que des offres irrecevables ou inacceptables au sens de l'article 53. Les conditions initiales du marché ne doivent pas être modifiées. Si la personne responsable du marché décide de ne négocier qu'avec les candidats qui avaient été admis à présenter une offre, elle est dispensée de procéder à une nouvelle mesure de publicité ; [...] ;

Considérant qu'il ressort des dispositions précitées que, s'agissant des collectivités territoriales, la commission d'appel d'offres était compétente pour choisir le type de procédure à mettre en oeuvre lorsque l'appel d'offres a été déclaré infructueux ; qu'il résulte de l'instruction que, après avoir déclaré l'appel d'offres infructueux, la commission d'appel d'offres a donné un avis favorable au recours à la procédure négociée, laquelle a ensuite été mise en oeuvre ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la commission d'appel d'offres ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, à l'issue de la déclaration d'appel d'offres infructueux, le maire de Colombier avait décidé de ne négocier qu'avec les trois candidats qui avaient été admis à présenter une offre et que, dès lors, la mise en oeuvre de la procédure était dispensée d'une nouvelle mesure de publicité, en application des dispositions de l'article 35 précitées ; que s'il ressort des pièces du dossier que les quatre autres entreprises qui avaient initialement fait acte de candidature ont été averties du caractère infructueux de l'appel d'offres et également invitées, dans le même courrier à l'initiative de la direction départementale de l'équipement maître d'oeuvre de l'opération, à présenter une offre, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure négociée qui a été conduite ;


Sur la délibération du 19 octobre 2006 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par sa délibération du 19 octobre 2006 le conseil municipal de Colombier a retenu l'offre de la société Maitr'o et, en autorisant le maire à signer tous documents nécessaires pour la finalisation et le paiement des travaux de l'assainissement collectif , a nécessairement entendu autoriser le maire à signer avec cette société le marché public de travaux correspondant ; que le conseil municipal s'est prononcé sur tous les éléments essentiels du contrat à intervenir, notamment son objet précis ainsi que son montant et l'identité de son attributaire ; que ni la circonstance que le montant du marché mentionné soit présenté comme un maximum, ni celle que la qualité de mandataire d'un groupement solidaire de l'entreprise attributaire n'ait été précisée, ne sont de nature à entacher d'irrégularité la délibération par laquelle le maire a été habilité à contracter au nom de la commune ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté leur demande ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Colombier, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions susvisées, de mettre à la charge de M. et Mme A le paiement à la commune de Colombier de la somme de 1 500 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;



DECIDE :


Article 1er : La requête de M. et Mme A, est rejetée.

Article 2 : M. et Mme A verseront à la commune de Colombier, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Bernard A à la commune de Colombier et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.








Délibéré après l'audience du 1er septembre 2011, à laquelle siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,
- Mme Verley-Cheynel, président assesseur,
- M. Arbarétaz, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 22 septembre 2011.
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N° 10LY00323
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Abstrats

39-02-02-05 Marchés et contrats administratifs. Formation des contrats et marchés. Mode de passation des contrats. Marché négocié.

Source : DILA, 27/09/2011, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Lyon

Date : 22/09/2011