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Cour Administrative d'Appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 07/01/2010, 09NC00301, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. VINCENT

Rapporteur : M. Jean-Marc FAVRET

Commissaire du gouvernement : M. COLLIER

Avocat : SCP WACHSMANN ET ASSOCIES


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 février 2009, présentée pour M. Denis A, demeurant ..., par Me Meyer ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702021 du 3 décembre 2008, rectifié par ordonnance du 9 janvier 2009, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à annuler la décision en date du 15 mars 2007 par laquelle le président de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin lui a notifié sa révocation sans préavis ni indemnités et, d'autre part, à ce que la chambre de commerce et d'industrie soit enjointe de le réintégrer dans ses fonctions de directeur financier sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la date de notification du jugement à intervenir ;

2°) d'annuler la décision du président de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin du 15 mars 2007 prononçant sa révocation ;

3°) d'enjoindre la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin de le réintégrer dans ses fonctions de directeur administratif et financier sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin à lui verser une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- en douze ans d'activité, il n'a jamais fait l'objet d'observations, de mises en garde ou de critiques de la part de sa hiérarchie et n'a jamais encouru de mesure disciplinaire ; son salaire a été augmenté à quatre reprises, en 1996, 1997, 2003 et 2005, ce qui révèle la satisfaction de son employeur à son égard ; les problèmes n'ont commencé qu'avec l'arrivée du nouveau président de la Chambre nommé en 2005, à l'origine du départ de plusieurs cadres de haut niveau de la Chambre ;

- sa révocation repose sur des faits matériellement inexacts : il n'a pas été convoqué devant le bureau de la Chambre de commerce et d'industrie le 14 février 2000 pour recevoir un avertissement ; il n'a jamais reçu notification du rapport de l'audit externe de janvier 2006 faisant état de ses prétendus agissements et de son management par la peur ; les conflits qui ont pu l'opposer ponctuellement à certains employés sont des conflits normaux de travail ; il était fondé à faire des reproches à ses collaborateurs lorsque leur travail n'était pas satisfaisant, et cela ne constitue pas un harcèlement moral ; les écrits du médecin du travail ont été établis en concertation avec la directrice des ressources humaines pour les besoins de la cause ; le médecin du travail a été partial, du fait de ses liens familiaux avec un agent de sa direction ; les problèmes signalés par le médecin du travail en 2000 concernent l'établissement dans son ensemble, et non son service en particulier ;

- sa révocation, sanction la plus grave prévue, n'est pas adaptée à la nature de la faute qui lui est reprochée, ni proportionnée à sa gravité ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2009, présenté pour la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin par Me Alexandre ;

La Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- plusieurs mises en garde ont été adressées à M. A, y compris par écrit, dès 2000, soit bien avant l'arrivée du président de la chambre de commerce et d'industrie qui a pris la décision de révocation ; l'intéressé avait été convoqué devant le bureau de la chambre de commerce et d'industrie le 14 février 2000 pour recevoir un avertissement ; la chambre de commerce et d'industrie a dû financer un coaching en septembre 2004, après une alerte du médecin du travail du 11 juin 2004, pour permettre à l'intéressé d'améliorer son comportement managérial ; un audit externe a été réalisé en 2005 qui a mis en évidence le management par la terreur de M. A ; les incidents en cause ont fait l'objet de rapports du médecin du travail en 2000 et en 2004, qui ont souligné la nécessité de protéger la santé physique et mentale des salariés placés sous l'autorité de M. A ; le médecin du travail a confirmé ses alertes le 29 juin 2007, postérieurement à la décision attaquée ; le médecin du travail a été impartial ;

- les faits reprochés à M. A sont matériellement établis et relèvent du harcèlement moral ; leur gravité et la nécessité de protéger les salariés placés sous l'autorité de M. A ont imposé la décision en litige, proportionnée à la gravité des fautes commises ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 2 novembre 2009, présentée pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du président de la 3ème chambre de la Cour, fixant la clôture de l'instruction au 5 novembre 2009 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers ;

Vu le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après qu'aient été entendus au cours de l'audience publique du 3 décembre 2009 ;

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Meyer, avocat de M. A, et de Me Alexandre, avocat de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin ;


Considérant que M. A a été engagé en 1995 par la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin pour y exercer les fonctions de directeur administratif et financier ; que, par une décision en date du 15 mars 2007, prise après avis de la commission paritaire locale, le président de la Chambre de commerce et d'industrie a décidé de prononcer sa révocation, sans préavis ni indemnités ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que si M. A soutient qu'en douze ans d'activité, il n'aurait jamais fait l'objet d'observations ou de mises en garde de la part de sa hiérarchie, que les problèmes qu'il a rencontrés seraient exclusivement imputables au nouveau président de la Chambre élu en 2005, à l'origine du départ de plusieurs cadres de haut niveau de la Chambre, et que sa révocation reposerait sur des faits matériellement inexacts, il ressort des pièces du dossier que plusieurs mises en garde lui avaient été adressées, y compris par écrit, dès 2000, soit avant l'entrée en fonction de l'auteur de la décision de révocation en litige ; que le directeur général de la Chambre lui avait notamment adressé, le 24 janvier 2000, un courrier par lequel il l'informait qu'il envisageait de lui infliger un blâme à la suite de témoignages écrits concordants attestant de son comportement particulièrement injurieux à l'égard de certains de ses collaborateurs ; que, contrairement à ce qu'il affirme, le requérant a été convoqué devant le bureau de la Chambre de commerce et d'industrie le 14 février 2000 pour recevoir un avertissement ; que la Chambre de commerce et d'industrie avait, après une alerte du médecin du travail du 11 juin 2004, financé un coaching au profit de l'intéressé, pour lui permettre d'améliorer son comportement managérial ; que l'attitude de M. A à leur égard a conduit plusieurs agents placés sous son autorité à démissionner, à demander leur mutation ou à obtenir d'être mis en arrêt de maladie ; que ces incidents, qui excèdent ceux susceptibles de survenir dans le cours normal des relations de travail, ont fait l'objet en 2000 et en 2004 de rapports du médecin du travail, qui a souligné la nécessité de protéger la santé physique et mentale des salariés placés sous l'autorité de M. A ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le médecin du travail aurait été partial, ni que ses écrits auraient été établis en concertation avec la directrice des ressources humaines pour les besoins de la cause ; que c'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont estimé que les faits reprochés à M. A étaient matériellement établis ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 36 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie : Une mesure disciplinaire doit être adaptée à la nature de la faute et proportionnée à sa gravité. Les mesures disciplinaires applicables aux agents titulaires sont : (...) 6° La révocation. ; que les faits reprochés à M. A, qui révèlent sa forte propension à outrepasser les limites du pouvoir hiérarchique, sont constitutifs de fautes justifiant une sanction disciplinaire ; qu'eu égard, d'une part, à leur importance et à leur caractère répété, et, d'autre part, à la nécessité de protéger les salariés placés sous son autorité, la sanction de révocation apparaît adaptée à la nature des fautes commises par l'intéressé et proportionnée à leur gravité ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit ainsi être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de ce dernier tendant à ce que la Chambre de commerce et d'industrie soit enjointe, sous astreinte, de le réintégrer dans ses fonctions de directeur financier ne peuvent être accueillies ;


Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge ce dernier une somme de 1 500 euros à verser à la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin au titre des mêmes dispositions ;


D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Denis A et à la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin.



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Source : DILA, 01/05/2010, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Nancy

Date : 07/01/2010