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Cour Administrative d'Appel de Paris, 6ème Chambre, 22/03/2010, 08PA06403, Inédit au recueil Lebon

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Président : M. PIOT

Rapporteur : M. Hervé Guillou

Commissaire du gouvernement : Mme DELY

Avocat : SCP VIER - BARTHELEMY - MATUCHANSKY


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les
29 décembre 2008 et 18 février 2009, présentés pour Mme Dominique A, demeurant ..., par la SCP Vier - Barthelemy - Matuchansky ;
Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0516279 en date du 29 octobre 2008 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a fait droit à sa demande indemnitaire dirigée contre l'Etat en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de sa notation et du harcèlement moral dont elle a fait l'objet qu'à hauteur de 1 500 euros tous intérêts compris ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 51 000 euros ainsi que les intérêts au taux légal, les intérêts étant eux-mêmes capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée notamment par la loi n° 2002-73 du
17 janvier 2002 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2010 :

- le rapport de M. Guillou, rapporteur,

- les conclusions de Mme Dely, rapporteur public,

- et les observations de Me Gargam, représentant la SCP Vier - Barthélémy - Matuchansky, pour Mme A ;


Considérant que Mme A, agent du ministère de la défense, a bénéficié d'un détachement auprès de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Hauts-de-Seine en 1996 où elle a été affectée au secrétariat de la commission départementale de l'éducation spéciale ; que, par une décision en date du 8 janvier 1998, le directeur des affaires sanitaires et sociales du département des Hauts-de-Seine a refusé à Mme A le renouvellement de son détachement ; que, par un jugement en date du 20 juin 2002 devenu définitif, le Tribunal administratif de Paris a annulé la notation de Mme A au titre de l'année 1997 au motif qu'elle était entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que par une lettre du 4 mars 2003 Mme A a alors demandé au directeur départemental des affaires sanitaires et sociales le paiement de la somme de 12 569 euros au titre du préjudice moral et financier résultant de sa notation défavorable ainsi que du harcèlement moral dont elle soutenait avoir été victime au cours de son détachement ; que Mme A demande l'annulation du jugement en date du 29 octobre 2008 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a fait droit à sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 51 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'illégalité de sa notation et du harcèlement moral dont elle prétend avoir été victime qu'à hauteur de 1500 euros tous intérêts compris ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement attaqué a été notifié à Mme A le
4 novembre 2008 ; que ce n'est que le 18 février 2009 que la requérante a contesté dans un mémoire complémentaire la régularité dudit jugement ; qu'il suit de là que les moyens tenant à l'irrégularité du jugement attaqué, fondés sur une cause juridique distincte de celles qui servaient de fondement à la requête, constitue une demande nouvelle qui, présentée tardivement, n'est pas recevable ;

Au fond :

Considérant que l'illégalité dont est entachée la notation de l'année 1997 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ;

Considérant que Mme A soutient qu'à la suite de sa notation au titre de l'année 1997, son détachement auprès de la direction des affaires sanitaires et sociales n'a pas été renouvelé et que, ayant dû réintégrer son administration d'origine sur un poste éloigné de son domicile, il en est résulté pour elle divers préjudices financiers, liés à l'éloignement de son lieu d'affectation et directement imputables à ladite notation, laquelle est illégale et donc fautive ;

Considérant toutefois qu'un agent n'a aucun droit au renouvellement de son détachement et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en date du
8 janvier 1998 de ne pas renouveler le détachement de Mme A, prise par le directeur des affaires sanitaires et sociales du département des Hauts-de-Seine, n'aurait pas été prise dans l'intérêt du service ; qu'il suit de là que Mme A ne saurait demander réparation de préjudices postérieurs à son détachement ;

Considérant que Mme A invoque les effets défavorables de sa notation au titre de l'année 1997 sur son avancement ; qu'il ressort toutefois de l'état des services établi en 2008, qu'elle produit, qu'elle était classée dans le grade d'agent administratif de 1ère classe échelle III au 1er janvier 1996 et qu'elle a été promue adjointe administrative échelle IV au
20 août 1999 ; que Mme A n'établit pas que cette progression de carrière aurait pâtie du fait de la notation illégale qui lui a été attribuée au titre de l'année 1997 ;

Considérant que si Mme A soutient qu'elle a été privée d'un reliquat de
13 jours de congé annuel, le document qu'elle produit, qui fait état des congés pris à la date à laquelle son détachement a pris fin, et du solde de jours de congé disponible, n'est pas, à lui seul, de nature à établir qu'elle aurait été privée d'une partie de ses droits à congé annuel ;

Considérant que, si Mme A fait valoir une diminution de ses primes de rendement durant la période de détachement, les bulletins de paye qu'elle produit n'établissent pas, en tout état de cause, la réalité du préjudice allégué ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi susvisée du 13 juillet 1983 introduit par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 : Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A a fait l'objet, pendant les deux années de son détachement auprès de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Hauts-de-Seine, de la part de son supérieur hiérarchique direct, de brimades, d'humiliations et de tracasseries répétées, de plusieurs agressions verbales, dont l'une a entraîné un arrêt de travail de quinze jours ; que la notation qui lui a été attribuée au titre de 1997, entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa manière de servir, était assortie d'appréciations littérales d'une particulière sévérité ; qu'il résulte de l'ensemble de ces circonstances, dont l'administration ne conteste pas sérieusement la réalité, que
Mme A a été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral qui ont eu pour objet et pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que ces agissements, dont il n'est pas démontré ni même soutenu que le comportement de
Mme A les aurait même partiellement provoqués, sont fautifs et de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait qu'il une juste appréciation du préjudice subi par Mme A en l'évaluant à la somme de 2 000 euros, tous intérêts compris ; que, par suite, Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 1 500 euros tous intérêts compris ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat au profit de Mme A la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :


Article 1er : La somme que l'Etat a été condamné à verser à Mme A par le jugement susvisé du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en date du
29 octobre 2008 est portée à la somme de 2 000 euros, tous intérêts compris.

Article 2 : Le jugement susvisé du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris en date du 29 octobre 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA06403



Source : DILA, 08/05/2010, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction administrative

JURIDICTION : Cour administrative d'appel

SIEGE : CAA Paris

Date : 22/03/2010