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Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 5 février 2014, 12-29.279, Inédit

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Rejet

Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)

SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Piwnica et Molinié


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 15 décembre 2011), que Mme X..., engagée le 1er mars 1985 en qualité d'agent d'entretien et dont le contrat de travail a été repris par la société La Rayonnante, aux droits de laquelle est venue la société TFN propreté Est, a fait l'objet de deux avertissements les 6 février et 13 mars 2009, puis a été licenciée le 7 août 2009 pour faute grave ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une faute grave et de la débouter en conséquence de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen :

1°/ que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit exposer les motifs précis du licenciement et ne peut se borner à faire allusion à des fautes précédemment reprochées au salarié ; qu'en retenant que le licenciement reposait sur une faute grave caractérisée par des retards non justifiés accompagnés d'un manque de professionnalisme, grief qui n'était pas « clairement explicité » dans la lettre de licenciement mais « fai sait écho au contenu des lettres d'avertissement » des 6 février et 13 mars 2009, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ que l'inaptitude et l'insuffisance professionnelle du salarié ne constituent pas une faute pouvant être sanctionnée par un licenciement disciplinaire ; que le licenciement prononcé pour faute grave ayant nécessairement un caractère disciplinaire, il ne peut venir sanctionner une inaptitude et insuffisance professionnelle ; qu'en retenant que le licenciement reposait sur une faute grave caractérisée par le manque de professionnalisme de la salariée, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1331-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°/ que la faute grave suppose un fait ou un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le fait pour un salarié ayant plus de vingt ans d'ancienneté, pendant lesquels aucun reproche ne lui avait jamais été adressé, d'être en retard à son poste de travail dans un contexte d'adaptation à un nouvel employeur n'est pas constitutif d'une faute grave ; qu'en retenant que de tels faits, accompagnés d'un manque de professionnalisme, étaient constitutifs d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement, de retard au travail le 23 juin 2009 sans explication ni justification et de persistance, malgré les reproches faits à maintes reprises et deux avertissements, à ne pas respecter les horaires contractuels d'intervention sur le site d'un client et de mauvaise exécution des prestations de nettoyage ayant eu pour effet l'application de pénalités financières, étaient établis, la cour d'appel a pu décider que ces manquements de la salariée à ses obligations contractuelles étaient d'une importance telle qu'ils rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen irrecevable en sa troisième branche comme nouveau et mélangé de fait et de droit, est mal fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille quatorze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé le licenciement de Mme X... fondé sur une faute grave et de l'avoir, par conséquent, déboutée de ses demandes indemnitaires ;

AUX MOTIFS QUE l'employeur qui se prévaut d'une faute grave du salarié doit prouver l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre de licenciement et doit démontrer que ces faits constituent une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; QUE lorsque l'employeur procède à un licenciement pour faute disciplinaire, il appartient au juge d'apprécier d'une part, si la faute est caractérisée et d'autre part, si elle est suffisante pour motiver un licenciement ; QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige fait grief à Mme X... : - de n'avoir apporté aucune explication ni justification à son retard au travail du 23 juin 2009 malgré la mise en demeure du 24 juin 2009, - de sa persistance à ne pas respecter les horaires contractuels d'intervention sur le site de l'OPAC de Dijon, - de ce que ces faits lui ont été reprochés à maintes reprises et qu'ils ont fait l'objet de deux avertissements, l'un du 6 février 2009, l'autre du 13 mars 2009, - de ce que ces faits sont préjudiciables au bon fonctionnement de l'agence, le non-respect des horaires de travail et le manque de professionnalisme de l'intéressée ayant occasionné des pénalités financières et ayant mis en péril le contrat commercial ; QUE l'employeur à qui incombe la charge de la preuve, verse aux débats : - la lettre recommandée avec avis de réception en date du 6 février 2009 par laquelle elle a d'une part, notifié un premier avertissement à Mme X... pour réalisation incorrecte de ses prestations concernant les sols et les vitres, ces faits ayant provoqué de nombreuses plaintes de locataires ainsi que de l'OPAC, ainsi que pour non-respect de ses horaires de travail, et d'autre part, rappelé à la salariée qu'en aucun cas, un tel manque de professionnalisme dans son travail et le non-respect de ses horaires de travail ne pouvaient être tolérés, - la lettre recommandée avec avis de réception du 13 mars 2009 par laquelle un deuxième avertissement a été décerné à l'intéressée pour nettoyage approximatif ou non réalisé des parties communes des sols et des vitres au cours de la semaine du 5 au 12 février 2009 et pour accomplissement de deux heures de travail au lieu des quatre heures prévues le 10 février 2009, tout en lui précisant que sa négligence et son manque de professionnalisme avaient occasionné des pénalités financières et mis le contrat commercial en péril et en la mettant en demeure de se conformer scrupuleusement à son horaire contractuel, soit de 8 heures à 12 heures, et de réaliser les tâches qui lui incombent dans le respect de la qualité exigée par sa cliente, - un courrier de l'OPAC de Dijon Résidence Jean XXIII, en date du 2 février 2002, faisant état du mécontentement de cet organisme quant au nettoyage de la vitrerie et des parties communes non exécuté au cours de la période du 5 février 2009 au 12 février 2009 et de l'application d'une pénalité de 372 €, soit 186 € pour la vitrerie et 186 € pour le hall, - une lettre recommandée avec avis de réception en date du 24 juin 2009 mettant Mme X... en demeure de justifier de son retard au travail le 23 juin 2009 et lui rappelant que, selon l'article 6 du règlement intérieur, tout retard non motivé doit être immédiatement justifié auprès du responsable hiérarchique, tout salarié doit informer au plus tôt la direction en cas d'absence imprévue avec fourniture d'un justificatif dans les 48 heures, - un nouveau courrier de l'OPAC de Dijon Résidence Jean XMII, en date du 7 juillet 2009, lui notifiant l'application d'une pénalité de 230 € pour inexécution des prestations de nettoyage du mardi 23 juin 2009, - un troisième courrier de l'OPAC de Dijon Résidence Jean XXIII, en date du 7 octobre 2009 l'informant de ce que les carences constatées dans la mise en couvre des prestations contractuelles ont été prises en compte et qu'une nette amélioration a été notée par ses agents, - une attestation de Jean-Luc A..., inspecteur, qui certifie avoir appelé à plusieurs reprises Mme X... afin qu'elle revienne à son poste de travail qu'elle avait quitté de façon anticipée et lui avoir à plusieurs reprises demandé de soigner son travail car les plaintes de certains locataires et de l'OPAC s'accumulaient ; QUE Mme X... soutient que rien ne justifie le reproche concernant le retard d'une heure cinq le 23 juin 2009, que rien ne prouve qu'elle serait à l'origine de l'application de la pénalité notifiée pour l'inexécution des prestations de nettoyage du 23 juin 2009, qu'il n'est pas établi que son retard supposé ait pu affecter la relation commerciale avec l'OPAC, que les faits qui lui sont reprochés ont déjà été sanctionnés et que le grief relatif au manque de professionnalisme n'est pas explicité ; QU'elle se prévaut d'attestations de locataires de la résidence Jean XXIII qui se considèrent comme satisfaits de ses prestations ou qui apprécient son amabilité ; QU'elle invoque, plus particulièrement, le témoignage en date du 25 février 2009 de Didier B... qui déclare avoir constaté qu'elle était sur le lieu de son travail à 8 heures 15 le mercredi 25 février 2009 alors que le gardien est venu lui dire qu'elle était arrivée à 9 heures 15 ; QU'il doit toutefois être noté : - que Mme X... n'a apporté aucune réponse à la lettre de l'employeur en date du 24 juin 2009 la mettant en demeure de justifier de son retard au travail le 23 juin 2009, reconnaissant ainsi, de façon suffisamment explicite, non seulement qu'elle ne contestait pas le retard qui lui était reproché mais, également, qu'elle n'était pas en mesure d'en justifier dans les termes de l'article 6 du règlement intérieur qui lui avaient été dûment rappelés, - que le contenu du courrier de l'OPAC en date du 7 juillet 2009 confirme, s'il en était besoin, qu'une partie, au moins, de la prestation de nettoyage du mardi 23 juin 2009 n'a pas été effectuée, que Mme X... ne conteste pas l'affirmation de la SAS TFN PROPRETÉ EST selon laquelle elle exerçait seule sur le site de l'OPAC, de sorte que les manquements ne peuvent être imputés à nul autre qu'elle, - que le témoignage isolé de Didier B..., relatif à un événement qui serait survenu le 25 février 2009 et qui n'a donné lieu à aucun sanction disciplinaire ni même à une simple observation de la part de l'employeur, est dépourvu de tout emport, - qu'il en va de même des autres témoignages produits par Mme X... dont l'amabilité n'est pas en cause, - que l'application répétée par l'OPAC de pénalités pour inexécution ou mauvaise exécution de prestations de nettoyage constitue, en elle-même, la démonstration de ce que le comportement de la salariée n'a pas été sans conséquence sur la relation commerciale entre cet organisme et la SAS TFN PROPRETÉ EST, - que le rappel, dans la lettre de licenciement, du manque de professionnalisme de Mme X... fait écho au contenu des lettres d'avertissement non contestées du 6 février 2009 et du 13 mars 2009 dans lesquels ce grief est clairement explicité, que la règle non bis in idem ne trouve pas matière à s'appliquer s'agissant du simple rappel, dans la lettre de licenciement, de faits réitérés postérieurement à leur sanction ; QU'il est ainsi démontré que Mme X... a manqué à ses obligations professionnelles, en dépit des avertissements qui lui avaient été notifiés, et que son comportement a eu des répercussions sur les relations commerciales entretenues par la SAS TFN PROPRETÉ EST avec l'OPAC de Dijon ; QUE la réalité des griefs articulés dans la lettre de licenciement est établie ; QUE les fautes commises par la salariée constituaient une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible son maintien dans les effectifs de l'entreprise ; QU'il convient, par conséquent, d'infirmer le jugement entrepris, de juger que le licenciement de Mme X... repose sur une faute grave et de débouter l'intéressée de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail ;

1/ ALORS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit exposer les motifs précis du licenciement et ne peut se borner à faire allusion à des fautes précédemment reprochées au salarié ; qu'en retenant que le licenciement de Mme X... reposait sur une faute grave caractérisée par des retards non justifiés accompagnés d'un manque de professionnalisme, grief qui n'était pas « clairement explicité » dans la lettre de licenciement mais « fai sait écho au contenu des lettres d'avertissement » des 6 février et 13 mars 2009, la cour d'appel a violé les articles L.1232-6, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;

2/ ALORS QUE l'inaptitude et l'insuffisance professionnelle du salarié ne constituent pas une faute pouvant être sanctionnée par un licenciement disciplinaire ; que le licenciement prononcé pour faute grave ayant nécessairement un caractère disciplinaire, il ne peut venir sanctionner une inaptitude et insuffisance professionnelle ; qu'en retenant que le licenciement de Mme X... reposait sur une faute grave caractérisée par le manque de professionnalisme de la salariée, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 1331-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

3/ ALORS QUE la faute grave suppose un fait ou un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le fait pour un salarié ayant plus de vingt ans d'ancienneté, pendant lesquelles aucun reproche ne lui avait jamais été adressé, d'être en retard à son poste de travail dans un contexte d'adaptation à un nouvel employeur n'est pas constitutif d'une faute grave ; qu'en retenant que de tels faits, accompagnés d'un manque de professionnalisme, étaient constitutifs d'une faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail.

Source : DILA, 22/03/2016, https://www.legifrance.gouv.fr/

Informations sur ce texte

ECLI:FR:CCASS:2014:SO00240

TYPE DE JURISPRUDENCE : Juridiction judiciaire

JURIDICTION : Cour de cassation, hors Chambre criminelle

FORMATION : Chambre sociale