Un dispositif déjà ancien
C’est depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité que les distributeurs d’électricité d’origine éolienne sont contraints d’acheter cette électricité à un prix supérieur à celui du marché. Il s’agit, pour l’essentiel, d’EDF mais cela concerne aussi certains producteurs non nationalisés.
Mais la loi a prévu que les surcoûts résultant de cette obligation d’achat devaient faire l’objet d’une compensation par un fonds de service public de production d’électricité, géré par la Caisse des Dépôts et Consignations (la « CDC »). Ce fonds est alimenté par des contributions dues par les producteurs, fournisseurs et distributeurs.
À l’occasion de la contestation d’arrêtés fixant les conditions d’achat de l’électricité par une association « Vent de colère », le Conseil d’État a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne afin de savoir si le mécanisme mis en place avait la nature d’une aide d’État. Le Conseil d’État a donc demandé à la Cour si le mécanisme mis en place devait être analysé, au sens de l’article 107 du TFUE, comme une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État.
L’arrêt du 13 décembre 2013, dans l’affaire C 262/12, condamne le mécanisme de compensation mis en œuvre par la loi de 2000 et juge qu’il a bien la nature d’une aide d’État
Pour qu’un dispositif soit regardé comme une aide d’État, quatre conditions doivent être réunies : il doit s’agir d’une intervention de l’État ; il doit être susceptible d’affecter les échanges entre les États membres ; il doit accorder un avantage à son bénéficiaire et fausser la concurrence. La Cour rappelle qu’un avantage, bien que ne comportant pas de transfert de ressources d’État, peut être qualifié d’aide d’État s’il est accordé directement ou indirectement au moyen de ressources de l’État. Sur ce dernier élément, qui a justifié la saisine par le CE, la Cour relève qu’un organisme public, la Caisse des Dépôts et Consignations, est chargé en l’espèce de collecter les sommes destinées à compenser les surcoûts, auprès de l’ensemble des consommateurs. La CDC intervient ainsi comme intermédiaire dans la gestion de ces fonds, à la demande et sous le contrôle de l’État. C’est pourquoi ces montants gérés doivent être considérés comme demeurant sous contrôle public.
La Cour condamne donc le dispositif. Ce faisant, elle rejette également la demande française tendant à reporter dans le temps l’invalidation du dispositif. La Cour se fonde d’une part sur le fait que les autorités françaises ne pouvaient pas méconnaître l’irrégularité en cause, et qu’un arrêt à caractère préjudiciel n’emporte en soi aucune conséquence financière.
Il sera intéressant, sur ce dernier point, de voir si le Conseil d’État se sent lié par la décision de la Cour pour l’application de la jurisprudence Association AC ! du 11 mai 2004. L’enjeu, qui porte sur les éventuels remboursements des sommes en cause, est de taille
Laurent Marcovici
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