Métier essentiel et spécifique, sans lequel le maire d’une commune rurale ne peut pas fonctionner, le secrétaire général de mairie (SGM) est, on le sait, un métier en tension. Plus d’un quart des agents ont plus de 58 ans et les communes de moins de 3 500 habitants devront recruter 10 000 agents dans les prochaines années. Si rien n’améliore l’attrait du poste auprès de candidats potentiels, 40 % des 29 600 mairies concernées n’auront pas de secrétaire général en 2030. Pourtant, malgré la loi du 30 décembre 2023 – qui en a changé la dénomination et a intégré notamment de nombreuses propositions de l’Association des Maires de France (AMF) – et les quatre décrets du 16 juillet 2024, de nombreux points demeurent en suspens pour réellement revaloriser la profession.
« Un an plus tard, il reste encore à travailler la rémunération et le statut d’emploi », a constaté la co-présidente de la commission FPT et RH de l’AMF, secrétaire générale de l’AMF et maire de Lampertheim (Bas-Rhin, 3 512 habitants), Murielle Fabre, le 20 novembre lors d’un point info du 106e congrès des maires de France. Mais pour améliorer la rémunération, il faut aussi que les finances locales puissent l’assumer. « Cette revalorisation était un premier pas mais à l’Association des maires ruraux de France, nos demandes étaient plus importantes et nous voulons que le travail soit tout de suite repris car les secrétaires de mairie sont très déçus », a renchéri Chantal Gantch, maire de Savignac-de-l’Isle (Gironde, 570 habitants). Et, si l’on veut que les nouveaux élus s’investissent, il faut qu’ils bénéficient d’une assistance. Certains élus se sont retrouvés en burn-out par défaut de secrétaire général de mairie (SGM), a témoigné le président du CNFPT Yohann Nédélec, adjoint au maire de Brest (Finistère, 142 234 habitants). Comme huit départements sur dix, le centre de gestion du Finistère a créé un pool de SGM « volants » de deux personnes qui peuvent remplacer un secrétaire général de mairie absent et qui « tournent tout le temps ». Chantal Gantch a toutefois soulevé la nécessité d’uniformiser les logiciels, car souvent, les remplaçants ne les connaissent pas.
Finances, urbanisme, funéraire, état civil, ressources humaines… : le secrétaire général de mairie (SGM) doit savoir tout faire. D’autant que le métier a évolué, qu’il devient de plus en plus difficile et complexe et nécessite une meilleure formation propice à « sécuriser les actes juridiques du maire », a précisé le sénateur de la Savoie, Cédric Vial. Dans une proposition de loi du 11 août 2023, il préconise de créer une prime de responsabilité à points qui serait intégrée dans le calcul de la retraite, avec un statut particulier comme celui des directeurs généraux de service (DGS). Mais l’AMF défend davantage le point d’indice plutôt qu’une prime, a précisé Murielle Fabre. Quant à créer un statut particulier, le métier deviendrait alors un emploi fonctionnel, d’où un problème de continuité de service dans les petites communes si les agents ne survivent pas au changement d’autorité politique.
Désormais, une formation de 15 jours, dont 10 sur les fondamentaux, est obligatoire avant la prise de poste auprès du CNFPT et une formation qualifiante de 56 jours, sanctionnée par un examen, est destinée aux agents de catégorie C qui veulent passer en catégorie B. En outre, il existe des dispositifs de requalification en catégorie B, pour reconnaître l’expérience et les responsabilités des agents de catégorie C à qui on octroie une promotion interne hors quota, en les faisant passer en B. Pour les autres, un plan de requalification existe, à condition d’avoir huit ans d’ancienneté dans la fonction publique et un grade d’avancement (au moins adjoint principal). Le sénateur Vial a pointé un vide juridique. Les secrétaires de mairie recrutés avant la loi du 30 décembre 2023 qui classe ce métier au moins dans la catégorie B ne sont malheureusement pas éligibles à cette requalification. « Donc, de nombreux secrétaires de mairie qui sont seulement adjoints administratifs ne peuvent pas être promus en B et ne sont pas éligibles à la promotion. Il faudra un accompagnement spécifique, sinon ils seront bloqués. Ils ne pourront plus être secrétaires de mairie et il faudra les licencier ». Il faudra trouver une solution avant 2028, a conclu le sénateur.
Pour anticiper les départs en retraite, les Alpes-Maritimes ont créé un nouveau diplôme national avec l’université Côte-d’Azur. Une formation d’un an pour mettre à niveau les connaissances des secrétaires de mairie et créer un réseau d’entraide, ouverte aux étudiants et aux chercheurs d’emploi. Un succès : alors que huit places étaient prévues pour la formation, plus de quarante-cinq communes ont demandé à en faire bénéficier leur secrétaire de mairie.
Et attention… « Non seulement le secrétaire général de mairie (SGM) exerce un poly-métier, mais il le fait avec une épée de Damoclès systématique, celle du contentieux », a rappelé Emmanuel Dutay, directeur général des services de Bléré (Indre-et-Loire, 1 300 habitants), président du SNDGCT 37, élu et ancien secrétaire de mairie. Par exemple lorsque, surchargé de travail, il oublie d’envoyer des arrêts de travail.
Marie Gasnier