Pris pour l’application de l’article 17 de la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels, un décret du 3 février 2025, paru au Journal officiel du 5 février 2025, vient modifier les conditions de désignation des structures réalisant la mission de permanence des soins en établissement de santé (PDSES). Ce texte constitue « un premier pas pour la réorganisation volontariste des schémas de PDSES qui s’impose et qui doit amener à une plus large implication de l’ensemble des acteurs, quels que soient leurs modes d’exercice », salue la Fédération hospitalière de France (FHF).
L’article 1 du décret prévoit que, après chaque publication du volet relatif à l’organisation de la permanence des soins du schéma régional de santé, le directeur général de l’Agence régionale de santé (ARS) procédera à un appel à candidatures afin de désigner les structures attributaires des implantations de permanence des soins. Il agira de même en cas de révision du volet, pour identifier de nouveaux objectifs d’implantations. L’appel à candidatures sera rendu public sur le site de l’ARS dans un délai maximum de six mois et y demeurera jusqu’à la date de clôture de l’appel. Un arrêté doit encore préciser le contenu minimal de cet appel à candidatures. Dans l’attente des désignations effectuées à l’issue de ces appels à candidatures, les désignations précédemment effectuées restent valables, précise le décret.
Le texte réglementaire autorise plusieurs structures à répondre conjointement à un appel à candidatures en vue d’exercer la mission de permanence des soins de manière alternée. Dans ce cas, leur réponse à l’appel à candidatures devra indiquer les modalités d’organisation des cycles d’alternance. Cette possibilité de partage d’une ligne de PDSES entre plusieurs établissements de santé, soit par alternance, soit par mutualisation, « permettra, dans les territoires où le contexte le justifie, de mieux associer l’ensemble des acteurs », se félicite la FHF.
Par ailleurs, le décret définit la notion de carence en PDSES et « fixe un mode de résolution impliquant les acteurs de santé du territoire, sous l’égide du directeur général de l’ARS », ajoute la Fédération. Ainsi, lorsqu’un appel à candidatures se révélera en tout ou partie infructueux ou lorsque, dans l’attente des résultats d’un appel à candidatures, le directeur général de l’ARS estimera nécessaire de pourvoir sans délai à la mission de permanence des soins, il dressera un constat de carence, stipule le texte. Et, en cas de carence constatée, le directeur général de l’ARS réunira les structures de la ou des zones concernées disposant de l’autorisation d’activité de soins ou d’équipement matériel lourd leur permettant de contribuer à la mission de permanence de soins concernée, ainsi que des représentants des professionnels de santé exerçant en leur sein, et invitera les participants « à répondre aux nécessités d’organisation collective de la permanence des soins. »
Au final, « la recherche d’une plus grande implication de tous les professionnels de santé du territoire dans la PDSES est une avancée très positive », répète la FHF.
Toutefois, s’il représente « une première étape essentielle vers une meilleure organisation et une participation renforcée à la permanence des soins », ce décret à lui seul « n’est pas pour autant une fin en soi au regard du rôle majeur des hôpitaux publics dans la PDSES aujourd’hui. Le texte demeure toujours relativement peu contraignant et ne fait pas de lien avec la continuité des soins, intrinsèquement liée à la PDSES, ou avec les autorisations d’activité elles-mêmes », regrette la Fédération.
Comme l’a démontré l’enquête nationale sur la permanence des soins en établissement de santé 2024, conduite par la Direction générale de l’organisation des soins (DGOS), les établissements publics portent l’essentiel de la charge de la PDSES, tant en nombre de lignes qu’en part de patients pris en charge dans les plages de permanence, rappelle la FHF. Ainsi, 69 % des lignes de garde et d’astreinte sont aujourd’hui portées par des établissements publics, qui prennent en charge 85 % de l’activité de permanence et de continuité des soins (83 % pour la seule permanence). Les établissements à but non lucratif ont, quant à eux, en charge 8 % des lignes pour 6 % des patients (5 % sur la seule permanence) et le privé à but lucratif, 23 % des lignes pour 9 % de l’activité (12 % sur la seule permanence). Ces résultats démontrent une hétérogénéité entre les lignes des différents types d’établissements. « Ce déséquilibre doit appeler à une réorganisation volontariste des schémas territoriaux de permanence des soins, en cohérence avec les dispositions du décret », plaide la Fédération hospitalière de France.
La refonte des schémas de PDSES actuellement engagée dans les régions doit donc « amener à résorber l’inadéquation et la non-proportionnalité entre les moyens mobilisés et la réalité des prises en charge », insiste la Fédération.
La FHF sera « vigilante » à ce que la réorganisation en cours de ces schémas repose sur « plusieurs principes fondamentaux », à savoir :
- assumer des obligations de PDSES nécessite de réunir les conditions techniques et les compétences humaines pour assurer l’intégralité des obligations ;
- assumer les obligations de PDSES implique de mobiliser tous les moyens pour y répondre pleinement sans refus ni transferts de patients, sauf situation exceptionnelle ;
- assumer les obligations de PDSES suppose de prendre en charge l’intégralité des besoins du patient, y compris le traitement de ses comorbidités. Le vieillissement de la population et le développement des pathologies chroniques nécessitent de pouvoir y faire face ;
- assumer le rôle d’offreur de soins implique aussi une obligation d’assurer la continuité des soins des patients pour lesquels on conserve une responsabilité en sortie d’hospitalisation.
« Ce décret marque une avancée significative pour l’organisation de la permanence des soins en France. Il ouvre la voie à une plus grande mobilisation de tous les acteurs et à une répartition plus équilibrée des responsabilités. Pour garantir l’efficacité de cette réforme, il est essentiel que chacun joue pleinement son rôle. Nous devons collectivement poursuivre cette dynamique pour construire un système de PDSES plus équitable, plus performant et plus adapté aux besoins des patients », conclut le président de la FHF, Arnaud Robinet.