PLF 2025 : vers une réduction de l’indemnisation des agents en arrêt maladie

Publié le 11 février 2025 à 15h00, mis à jour le 12 février 2025 à 9h20 - par

Le projet de loi de finances (PLF) 2025, adopté définitivement le 6 février 2025, modifie en profondeur la prise en charge des arrêts maladie des fonctionnaires territoriaux. La rémunération des fonctionnaires en congés maladie, accordés au titre de l’article L. 822-3 du Code général de la fonction publique, sera réduite à compter du premier jour du mois suivant la publication de la loi.

PLF 2025 : réduction de l'indemnisation des agents en arrêt maladie
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Jusqu’à présent et après application d’une journée de carence, les agents percevaient l’intégralité de leur rémunération durant les trois premiers mois d’un arrêt de maladie ordinaire (s’il n’y avait pas déjà eu d’arrêt de maladie ordinaire sur les 365 jours qui précèdent chacune des journées d’arrêt de travail). Désormais, sauf en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, cette indemnisation sera réduite à 90 % du traitement indiciaire brut dès le premier jour de l’arrêt, sans délai de carence supplémentaire.

Modalités de mise en œuvre de la mesure et impact sur le pouvoir d’achat des fonctionnaires

Dès l’entrée en vigueur du PLF 2025, les fonctionnaires en arrêt maladie ne percevront plus l’intégralité de leur salaire. Concrètement la perte de rémunération concernera tous les arrêts maladie ordinaires, y compris les arrêts prolongés. La déduction de 10 % s’appliquera sur le traitement indiciaire brut, sans impact direct sur les primes et indemnités, qui pourront continuer à être versées selon les règles propres à chaque collectivité. En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, la  rémunération à 100 % sera maintenue.
Cette baisse de la rémunération des agents publics suscite des interrogations quant à son impact sur leur pouvoir d’achat, déjà fragilisé par une inflation atteignant 4,9 % en 2024 selon l’Insee, et l’absence de revalorisation significative du point d’indice. Par exemple, un fonctionnaire de catégorie B avec un traitement indiciaire de 2 500 € brut subira une perte d’environ 250 € par mois en cas d’arrêt maladie. Cette diminution pourrait peser fortement sur les agents les moins bien rémunérés.

Un enjeu de gestion des ressources humaines pour les collectivités

Cette mesure soulève des défis pour les employeurs publics, notamment en matière d’attractivité et de fidélisation des agents, alors que la concurrence avec le secteur privé est déjà forte. Pour en limiter les effets, plusieurs mesures d’accompagnement peuvent être mises en place par les collectivités. Parmi elles, il pourrait être envisagé une meilleure sensibilisation des agents aux solutions de prévoyance, une facilitation de l’accès aux dispositifs complémentaires de couverture des arrêts maladie, ainsi qu’un accompagnement renforcé en matière de santé et de prévention des risques professionnels. Pour atténuer les effets de cette mesure sur l’attractivité des emplois publics, les employeurs territoriaux peuvent envisager une couverture complémentaire via des contrats collectifs de prévoyance. Dans le secteur privé, de nombreuses conventions collectives prévoient une compensation des jours de carence grâce à des assurances groupe. Un dispositif similaire pourrait être mis en place dans la fonction publique territoriale, permettant aux agents de maintenir leur niveau de rémunération en cas d’arrêt maladie. Cela permettrait d’éviter que les agents soient tentés de prolonger leurs arrêts pour compenser la perte financière et qu’ils perçoivent cette réduction comme une remise en cause de leurs acquis. Un risque de désaffection pour la fonction publique territoriale, notamment dans les métiers les plus exigeants et les moins bien rémunérés, peut aussi apparaître.

Lors de la séance plénière du Conseil commun de la fonction publique (CCFP) du 11 février 2025, un avis défavorable a été rendu à l’unanimité par les organisations syndicales de la fonction publique, mais également par les représentants des employeurs territoriaux et hospitaliers, sur les deux projets de décret visant à abaisser le taux d’indemnisation des congés maladie ordinaires de 100 % à 90 % pour les agents contractuels et certains fonctionnaires.

Ce rejet unanime illustre les inquiétudes majeures suscitées par cette réforme, aussi bien du côté des agents que des employeurs publics. Les semaines à venir risquent d’être marquées par des tensions sociales accrues, avec des mobilisations syndicales et des négociations difficiles. Les employeurs territoriaux, déjà confrontés à des défis en matière d’attractivité et de fidélisation, pourraient également voir leur capacité à gérer les ressources humaines fragilisée par cette mesure impopulaire. Reste à savoir si le gouvernement tiendra compte de cette opposition unanime ou s’il maintiendra sa position, au risque de renforcer la contestation dans la fonction publique territoriale et hospitalière.