Instauré par le décret n° 2020-182 du 27 février 2020, le RIFSEEP est l’outil indemnitaire des collectivités territoriales et de leurs établissements. Il vise à remplacer les différentes primes et indemnités et à donner de la lisibilité à la rémunération des agents publics. L’Indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (IFSE) se substitue à la plupart des primes et indemnités existantes ayant la même nature et le même objet, sauf exceptions prévues par la réglementation. L’IFSE peut être cumulée avec la Nouvelle bonification indiciaire (NBI), qui n’est ni une prime ni une indemnité, mais un supplément d’indice de traitement.
Composé de deux primes, l’IFSE et le CIA, le Régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP), est aujourd’hui un des principaux leviers de l’attractivité d’une collectivité territoriale.
La délibération de l’organe délibérant fixe le dispositif indemnitaire de la collectivité
Le régime indemnitaire est facultatif et son instauration est soumis à une délibération de l’organe délibérant qui fixe le taux et les modalités d’application de celui-ci. Cette délibération est prise après un avis du comité social territorial (CST).
Cette délibération doit créer une prime instaurée par les textes (interdiction de créer de prime sans fondement légal comme une prime de vacances ou un treizième mois par exemple), qui ne soit pas plus favorable au régime indemnitaire des agents de l’État (principe de parité) et qui prévoit une évolution.
Quels sont les agents qui peuvent bénéficier de l’IFSE ?
La délibération doit prévoir précisément les bénéficiaires de l’IFSE. Il conviendra notamment de prévoir si les agents stagiaires, mais surtout contractuels peuvent en bénéficier (CE, 21 juillet 2022, n° 460172). Il convient de préciser que les vacataires, les emplois aidés et les agents en contrat d’apprentissage sont exclus du dispositif. Rappelons également qu’en vertu du principe de parité avec les agents de la FPE, certains cadres d’emplois sont encore exclus du dispositif. Aussi, la police municipale dispose d’un régime indemnitaire propre déterminé par le décret n° 2024-614 du 26 juin 2024.
Fixer les règles pour lesquelles l’IFSE est modulée ou suspendue
Outre les bénéficiaires, la délibération devra prévoir les règles de modulation du régime indemnitaire en fonction des absences : maladie ordinaire, temps partiel pour raison de santé ou encore sur le congé pour invalidité temporaire imputable au service (Citis). Attention néanmoins, tous les agents en arrêt de maladie doivent être placés dans une situation analogue (CE, 18 novembre 2011, n° 344563). Il conviendra également de déterminer la règle applicable dans le cas des agents en PPR.
En tout état de cause, et conformément au principe de parité avec les agents de la FPE, une collectivité ne pourra prévoir le maintien de l’IFSE en cas de longue maladie, de longue durée ou de congé de grave maladie (CAA Paris, 9 avril 2021, n° 20PA01766).
Attention, les dispositions du décret n° 2024-641 du 27 juin 2024 sur les modulations du régime indemnitaire pendant un CLM ou CGM ne sont pas applicables en l’état dans la FPT. Néanmoins, les collectivités peuvent, par délibération prise après avis du CST, décider de modifier les règles de modulation du régime indemnitaire pendant les périodes de congé de longue maladie (CLM) et de congé de grave maladie (CGM), dans la limite des nouvelles dispositions prévues pour la fonction publique d’État (maximum 33 % la première années et 60 % les deuxième et troisième années). Le régime indemnitaire demeure suspendu pendant un congé de longue durée (CLD).
La délibération doit prévoir :
- La nature de la prime
- Les bénéficiaires
- Les critères qui permettent de définir les groupes de fonction
- La fixation des groupes de fonction
- Les montants plafonds pour chaque groupe
- Les conditions d’attribution individuelle
- Les modalités de prise en compte de l’expérience professionnelle pour la révision de l’IFSE
- Les modalités pour les absences
- Les périodicités de versement
L’assemblée délibérante de la collectivité fixe les conditions d’attribution de l’IFSE
La fixation individuelle de l’IFSE reste de la compétence de l’autorité territoriale (art. 2 du décret n° 91-875 du 9 septembre 1991) via un arrêté de fixation individuelle pour les agents titulaires et une disposition du contrat pour les agents contractuels.
Attention, la fixation de la rémunération est un élément central du contrat d’un agent contractuel. Sa situation n’est pas fixée par un arrêté. Il convient de prévoir son régime indemnitaire dans les dispositions du contrat et de prendre un avenant à celui-ci en cas de modification.
Mettre en place ou réformer l’IFSE
La fixation de l’IFSE est conditionnée à la création de groupes de fonctions qui reflètent une cotation des postes de la collectivité. De manière concrète, il convient de reprendre l’ensemble des délibérations de création d’emploi et les fiches de postes afin de rassembler des fonctions identiques par catégorie.
Le décret sur le RIFSEEP n’apporte pas de précisions sur le nombre de groupes. La circulaire du 3 avril 2017 sur la mise en place du RIFSEEP dans la FPT n’apporte pas plus de précision. Il convient pour chaque collectivité de décider du nombre de groupes applicables. À titre d’exemple, la circulaire ministérielle du 5 décembre 2014 relative à la mise en œuvre de ce nouveau régime indemnitaire dans la FPE prévoit 4 groupes pour les agents de catégorie A, 3 groupes pour les agents de catégorie B et 2 groupes pour les agents de catégorie C. Contrairement à la fonction publique d’État, les collectivités territoriales ne sont pas obligées de suivre strictement les critères de répartition des groupes de fonctions définis pour l’État. Elles disposent d’une certaine liberté pour adapter ces critères à leurs besoins spécifiques, dans le respect du principe de libre administration.
Détermination du système d’attribution du régime indemnitaire selon les choix et les objectifs retenus pour l’IFSE
La réflexion sur la répartition des métiers dans les groupes de fonction est déterminante d’une bonne cohérence de la politique indemnitaire de la collectivité. Il est conseillé de regrouper les métiers selon des critères de regroupement, par exemple :
- Encadrement, coordination, pilotage ou conception : responsabilités liées à la gestion d’équipes ou à la conduite de projets.
- Technicité, expertise, expérience ou qualification : compétences spécifiques nécessaires à l’exercice des fonctions.
- Sujétions particulières ou degré d’exposition : contraintes ou risques liés à l’environnement professionnel.
Sera appliqué à chaque groupe de fonction un montant plafond que l’autorité territoriale ne pourra dépasser dans la fixation individuelle du montant à chaque agent. Pour celui-ci, il est conseillé de se fixer une modalité de calcul du montant d’IFSE.
Exemple de tableau de critères :
Le montant de l’IFSE peut être réexaminé dans plusieurs cas :
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- En cas de mobilité au sein du même groupe de fonctions : la polyvalence pourra être valorisée au même titre que la spécialisation ;
- En cas de changement de groupe de fonctions ;
- En l’absence de changement de fonctions, pour tenir compte de l’expérience acquise : ce réexamen intervient au maximum 4 ans après la prise de poste ;
- En cas de changement de grade.
La mise en place ou la réforme du RIFSEEP revêt une importance stratégique
Au-delà de la simple question de la fixation d’une part de la rémunération de l’agent public, la réforme ou la mise en place du RIFSEEP est stratégique et assez proche de la politique salariale dans le secteur privé.
Trois objectifs peuvent être déterminés qui s’apparentent à une individualisation de la rémunération :
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- La prise en compte des fonctions et des métiers avec une décorrélation du régime indemnitaire de la notion de cadre d’emploi et du grade.
- La lisibilité du régime indemnitaire
- La valorisation de l’engament et de l’expérience professionnelle.
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L’IFSE est perçue comme un outil de simplification et d’équité, mais elle suscite également des critiques, notamment en raison des contraintes imposées par le principe de parité, qui limite la capacité des collectivités territoriales à adapter les régimes indemnitaires à leurs besoins spécifiques
Florian Glay, Formateur et Consultant RH