En premier lieu, en quoi consiste la réforme de la fonction publique et comment concerne-t-elle la fonction publique hospitalière ?
La réforme de la fonction publique comporte trois grands chantiers. Le premier porte sur les enjeux de fonctionnement du service public. C’est un sujet très politique. Il s’agit de faciliter l’entrée des talents, la mobilité et la construction des parcours professionnels, ainsi que des passerelles au sein de chaque fonction publique ou entre la fonction publique territoriale, la fonction publique d’État ou la fonction publique hospitalière. Le ministre a vraiment cette volonté de donner un peu de souplesse au fonctionnement pour permettre des parcours avec des compétences transversales qui peuvent servir aux différentes fonctions publiques et répondre à des souhaits de professionnels de faire évoluer leur parcours.
La deuxième réflexion est autour de la reconnaissance et de la valorisation. Comment peut-on valoriser les professionnels qui s’investissent et s’impliquent dans leur métier ? Aujourd’hui, la fonction publique valorise ses professionnels plutôt par des primes, qui sont intégrées dans un rythme annuel. L’objectif est de réfléchir en fonction d’objectifs annuels à des modalités de valorisation tout en gardant la part la plus importante de la rémunération stable.
Enfin, le troisième chantier concerne la protection des professionnels : comment protéger les professionnels de la fonction publique face à l’agressivité des usagers ? Les mesures déjà prises sont-elles suffisantes ? Faut-il faire plus ?
Quant à la refonte du régime indemnitaire, elle est déjà en œuvre dans la fonction publique d’État et la fonction publique territoriale, le sujet est en cours de travail pour la fonction publique hospitalière.
Les enjeux sont-ils plus particuliers pour la fonction publique hospitalière ?
La fonction publique hospitalière est singulière car il faut prendre en compte ses différents métiers. Pour tous les administratifs, il peut vraiment y avoir des passerelles avec les autres fonctions publiques. Pour les métiers de soignants, il est très important de penser les parcours et les possibilités de mobilité, et lorsque ces derniers exercent en dehors de la fonction publique et qu’ils souhaitent l’intégrer, nous aurions besoin de pouvoir reprendre la totalité de leur ancienneté pour que ces parcours soient constructifs. Cela fait partie des principes de la mobilité qui sont travaillés.
L’attractivité est une préoccupation très importante, pour laquelle le travail se fait à différents niveaux. Après le Covid, il y a une fuite des personnels paramédicaux. Ce n’est pas uniquement lié au métier, mais à tout un environnement sociétal, ainsi qu’aux contraintes d’un métier de soignant. On travaille actuellement sur les équilibres avec une vie personnelle. En tant que directeurs des soins et par rapport aux paramédicaux, nous travaillons sur ces thématiques : soulager les contraintes et donner des perspectives de parcours avec l’acquisition de compétences et un exercice collectif enthousiasmant.
Il y a également la réforme de la Haute fonction publique. Qu’en est-il pour les directeurs de la fonction publique hospitalière ?
Les directeurs hospitaliers, les D3S, c’est-à-dire les directeurs d’établissement sanitaire, social et médico-social, et les directeurs des soins sont intégrés dans cette réforme. Mais celle-ci doit concerner les D3S et les directeurs des soins dans un deuxième temps, avec un niveau qui ne sera pas complètement aligné sur celui des directeurs hospitaliers. Nous sommes d’accord sur ce principe car nous avons des filières différentes. Les directeurs des soins sont en effet des paramédicaux qui ont suivi une formation diplômante de cadre de santé et passent ensuite le concours d’entrée à l’École des hautes études en santé publique (EHESP). Les travaux sur cette réforme pour les directeurs des soins et les D3S devaient commencer en septembre prochain.
Le 7 juin 2024, l’AFDS et 4 autres associations1 ont eu une réunion avec le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Stanislas Guerini. Deux jours après, le président de la République a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale. Quelles en sont les conséquences pour ces réformes sachant que des réunions avec les directeurs hospitaliers ont été annulées après le 9 juin ?
La réunion du 7 juin a été très intéressante et concrète. Le ministre voulait avoir nos retours en tant qu’organisations professionnelles et donc de professionnels de terrain. Quels étaient nos éléments de réflexion par rapport à aux grandes thématiques que j’ai évoquées ? Qu’est-ce qui nous semblait pertinent ? De quoi nous avions besoin par rapport à l’accompagnement des parcours professionnels, de l’intégration professionnelle, de l’attractivité de la fonction publique. Le travail a été très productif même si nous avons exprimé des critiques et rappelé les cadres que nous voulions conserver dans la fonction publique. Et dimanche 9 juin, nous avons été très désappointés parce que nous nous sommes rendu compte que les choses allaient rester en stand-by quelque temps. Le ministre avait intégré les directeurs des soins et les D3S dans la réforme de la Haute fonction publique. C’était acté. Comment cela va-t-il se passer après le 7 juillet ? J’espère que les échanges vont reprendre pour tous les chantiers et pour la réforme du régime indemnitaire. Pour notre association, nous avons finalisé une proposition que j’adresse cette semaine à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). Mais nous avons des questionnements sur les suites données aux réformes de la fonction publique.
Propos recueillis par Magali Clausener
1. L’Association nationale des cadres de santé (Ancim), l’association Donner des ELLES à la santé, le Collectif des directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (COD3S) et l’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa).