Thèmes : les prérogatives des agents, le cadre général d’action, les armements et équipements.
Le « Beauvau des polices municipales » a repris, avec une première réunion le 21 février. Quel est votre état d’esprit à l’issue de cette rencontre ?
C’est une grosse déception. La réunion n’a pas du tout été à la hauteur de ce que l’on aurait aimé. On s’attendait à des ateliers et à des tables rondes comme avec l’ex-ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la ruralité, Dominique Faure, pour échanger et expliquer ce que l’on souhaitait pour la police municipale. Or, nous avons assisté davantage à l’annonce de certaines évidences : on nous a rappelé que les maires veulent garder la main sur la police municipale, que le respect de la libre administration des collectivités locales prime… Mais nous n’avons pas ressenti la volonté de faire avancer la police municipale et il n’y a pas vraiment eu d’échanges. Je ne dis pas que nous n’allons rien obtenir mais la réunion, en elle-même, n’a pas apporté grand-chose. En revanche, nous avons rencontré la chef de cabinet adjointe de François-Noël Buffet, le 18 février, au cours d’un entretien préparatoire nettement plus constructif où nous avons pu exposer nos points de vue sur les prérogatives de la police municipale.
Quelles sont vos revendications au cours de ce Beauvau ?
Le gouvernement voudrait faire passer un projet de loi* pour qu’il y ait des officiers de police judiciaire (OPJ) dans la police municipale, ce que nous n’approuvons pas. Car ils seraient des officiers de police judiciaire low-cost, dans le sens où ils auraient le titre d’officier de police judiciaire mais pas toutes les prérogatives. Or, un OPJ sans pouvoirs ne sert à rien. Et cela apporterait de la frustration de la part des collègues, qui pourraient obtenir ce titre par examen mais ne pourraient pas agir en tant qu’OPJ, mais aussi de l’incompréhension de la part des forces étatiques qui ne comprendraient pas pourquoi on est toujours en relations avec leurs OPJ alors qu’on a des officiers de police judiciaire (OPJ) chez nous…
Vous proposez donc un nouveau statut ?
Oui, ce que nous proposons, c’est la création d’un statut d’officier judiciaire de police municipale, calqué sur le modèle de l’officier judiciaire pour l’environnement. Cet officier judiciaire aurait une liaison directe avec le parquet et prendrait ses directives du procureur de la République. Par exemple, il pourrait statuer sur un défaut de permis de conduire ou d’assurance, sur la consommation de stupéfiants, ou encore saisir un objet de vente à la sauvette… Et c’est le procureur de la République qui indiquerait la conduite à tenir concernant l’individu interpellé : soit le remettre à un officier de police judiciaire, soit dresser une amende délictuelle forfaitaire, ce que ne peut toujours pas faire un policier municipal aujourd’hui.
Actuellement, les pouvoirs des policiers municipaux sont limités ?
Oui, ils sont limités par le statut d’OPJ adjoint et parce qu’ils doivent rendre compte en permanence à l’OPJ de police nationale ou de gendarmerie de tout crime, délit ou contravention qu’ils rencontrent. Avec le statut que nous proposons, le policier municipal pourrait rendre compte à l’officier judiciaire de police municipale qui, lui, pourrait rendre compte au parquet et prendre les directives directement. Cela soulagerait l’OPJ des forces étatiques et donnerait des compétences judiciaires particulières à l’officier judiciaire de police municipale sans pour autant qu’il ait un titre d’OPJ. En revanche, nous ne voulons pas assurer de garde à vue ni mener les enquêtes judiciaires, ce qui nous oblige à quitter le terrain, alors que notre métier est précisément la police de proximité. Il s’agirait là d’un statut propre à la police municipale. L’officier judiciaire de l’environnement traite uniquement de l’environnement. Nous, nous pourrions agir sur plein d’autres domaines qui sont de notre compétence, à partir du moment où cela ne nécessitera pas d’enquête.
Vos revendications concernent surtout le domaine social ?
Les syndicats sont opposés à une augmentation des statuts et à la FNPMF, nous le sommes aussi. Tout le monde veut nous donner des prérogatives supplémentaires mais ce qui prime, c’est le social et la retraite qui seront étudiés lors du Beauvau du 4 mars. Cela fait près de 30 ans qu’il n’y a pas eu de revalorisation. Nous suivons la même grille indiciaire que les pompiers. Mais, entre leur pension de retraite et la nôtre, il y a une différence de 900 euros ; car pour les pompiers, les primes sont incluses dans la retraite, ce qui n’est pas le cas pour les policiers municipaux. Or, nous engageons notre responsabilité judiciaire. Si nous faisons une erreur sur la voie publique, en utilisant par exemple du lacrymogène au moment où il ne fallait pas, nous pouvons perdre notre emploi. Et nous engageons notre intégrité physique tous les jours. Il faut que la reconnaissance soit à la hauteur de notre engagement.
Propos recueillis par Martine Courgnaud – Del Ry
* Un futur projet de loi devrait prévoir d’habiliter comme officiers de police judiciaire (OPJ) les directeurs ou chefs de police municipale.
En 25 ans, les effectifs des policiers municipaux ont doublé, atteignant aujourd’hui plus de 28 000 agents dans 4 500 communes. Désormais, 80 % d’entre eux sont armés et 58 % possèdent des armes à feu. |
Le Beauvau des polices municipales, calendrier
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