Pour la cinquième année consécutive, l’institut Ipsos a interrogé pour cette association et l’entreprise pharmaceutique Jannsen France un échantillon représentatif de 500 médecins hospitaliers, du 29 janvier au 20 février 2024, soit avant la vague de témoignages du « #Metoo Hôpital », déclenchée en avril 2024 par les accusations de l’infectiologue Karine Lacombe à l’encontre du médiatique urgentiste Patrick Pelloux.
Au cours des 12 derniers mois, 29 % des femmes médecins hospitalières interrogées disent avoir été confrontées à des propos sexistes sur leurs compétences et 26 % sur leur physique ou leur apparence.
Selon cette étude, 11 % ont subi des comportements intrusifs pour obtenir un numéro de téléphone ou un rendez-vous, 19 % des questions répétées sur leur vie privée et sexuelle, 7 % des gestes inappropriés et 5 % des situations d’agression sexuelle. Plus d’un homme médecin sur deux indique en avoir été témoin.
Mais la parole se libère peu : seules 36 % des victimes en ont parlé au sein de leur établissement, la plupart à leurs collègues, 4 % s’étant adressées à la hiérarchie et 4 % à des référents chargés des violences sexistes et sexuelles (VSS). Moins d’un homme témoin sur deux en a parlé au sein de l’hôpital.
Cette situation « s’explique en partie par une méconnaissance » des ressources, analyse l’association : seulement 19 % des médecins considèrent que leur établissement a communiqué sur les procédures à suivre en cas de violences sexistes et sexuelles (VSS).
Les directions d’hôpitaux n’ont « pas le pouvoir de sanctionner directement » les médecins auteurs, qui passent devant « un centre national de gestion » et l’Ordre des médecins, et sont « très peu sanctionnés » a déploré lors d’une conférence de presse la vice-présidente de « Donner des Elles à la santé », la Pr Coraline Hingray.
L’association appelle à « mettre en place des barèmes clairs » de sanctions administratives encourues et une « indépendance totale » vis-à-vis des procédures judiciaires.
Parallèlement, l’étude note un « désintérêt croissant » pour les postes à hautes responsabilités : environ 37 % des médecins voudraient s’en voir proposer, contre 49 % en 2021. Cette tendance est très marquée chez les femmes jeunes : 31 % des moins de 45 ans souhaiteraient ce type de promotion, contre 58 % des hommes du même âge.
Les raisons invoquées sont essentiellement le manque de temps pour la vie personnelle, la fatigue et le stress.
Le désir de grossesse est un frein : 46 % des femmes médecins hospitalières déclarent avoir retardé un projet de maternité pour raisons professionnelles. Quelque 27 % disent avoir été incitées par un manager à ne pas prendre leur congé à une période définie (8 % chez les hommes), et 72 % assurent avoir « culpabilisé » pendant leur congé en raison des conséquences pour leurs collègues (29 % chez les hommes).
Les congés maternité sont peu remplacés, déplore l’association, appelant notamment à « faire appel au vivier des internes ou chefs de clinique en cours de master ou de thèse ».
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