Vers un effondrement de l’investissement local en 2025 ?

Publié le 20 novembre 2024 à 10h40 - par

La Fondation Jean Jaurès et Sens du service public évaluent l’impact du projet de loi de finances pour 2025 sur les investissements à venir des collectivités territoriales.

Vers un effondrement de l'investissement local en 2025 ?
© Par shocky - stock.adobe.com

Au premier jour du Salon des maires et des collectivités locales, Simon-Pierre Sengayrac, codirecteur de l’Observatoire de l’économie de la Fondation Jean Jaurès, et Johan Theuret, cofondateur du Sens du service public, ont dévoilé, le 19 novembre 2024, une note mesurant les conséquences à prévoir sur l’investissement local l’an prochain au regard des mesures annoncées dans le cadre projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Le gouvernement veut faire contribuer les collectivités territoriales au budget 2025 à hauteur de 5 milliards d’euros en réduisant les concours financiers de l’État. Simon-Pierre Sengayrac et Johan Theuret estiment que l’investissement local pourrait alors chuter de 12 milliards d’euros, tout en augmentant l’endettement public.

L’estimation de l’impact de l’effort budgétaire demandé aux collectivités nécessite de distinguer leurs effets sur les comptes des collectivités, expliquent les deux auteurs de la note. Ainsi, le fonds de précaution et l’écrêtement de recettes TVA viendraient réduire les recettes de fonctionnement de 4,2 milliards d’euros. La cotisation supplémentaire à la CNRACL accroîtrait leurs dépenses de fonctionnement de 1,3 milliard d’euros. Ces deux types de mesures viendraient réduire la capacité d’autofinancement des collectivités (CAF), « indicateur essentiel de leur santé financière et de leur capacité à investir ». Parallèlement, la baisse du budget du Fonds vert amputerait les recettes d’investissement des collectivités à hauteur de 1,5 milliard d’euros, au même titre que le non-versement de 800 millions d’euros de FCTVA.

« Toutes ces mesures peuvent avoir de multiples impacts sur les collectivités, en fonction de leur santé financière actuelle. Il est donc difficile d’estimer un impact global », indiquent Simon-Pierre Sengayrac et Johan Theuret. Toutefois, ils anticipent plusieurs tendances.

Au niveau du fonctionnement

En fonctionnement, les collectivités seraient contraintes de réduire leurs dépenses, afin de garder l’équilibre obligatoire de leur section de fonctionnement. Toutefois, en dehors des régions, les dépenses des collectivités sont fortement encadrées : versement du RSA et des autres aides sociales par les départements, versement des rémunérations des agents publics, administration des établissements scolaires, fonctionnement des services publics de transports, de voirie, d’eau et d’assainissement, d’enlèvement des ordures ménagères… « Il faut donc anticiper une dégradation de ces services publics », prédisent les deux auteurs de la note.

Au niveau de l’investissement

En investissement, les collectivités devraient soit réduire leurs dépenses d’équipement et d’aménagement, soit accroître leur endettement pour compenser la perte de CAF et de FCTVA. « Il serait ainsi ironique qu’en voulant assainir les finances publiques, ces mesures gouvernementales conduisent à accroître la dette locale », commentent Simon-Pierre Sengayrac et Johan Theuret.

Cette cure budgétaire imposée à des collectivités « structurellement en bonne santé » aura « deux impacts massifs », résument-ils : une forte baisse de l’investissement local et une hausse de l’endettement public. Dans leur note, Simon-Pierre Sengayrac et Johan Theuret estiment donc que les efforts budgétaires demandés aux collectivités pourraient faire chuter l’investissement local de 12 milliards d’euros, soit – 16 % par rapport à 2023, à niveau d’endettement inchangé.

« Au-delà d’être injuste, cet effort aura un impact économique récessif important », prévoient-ils. De fait, alors que l’investissement public local représente 58 % de l’investissement public total, il contribue fortement à la création d’activité et d’emplois dans les territoires dans un large spectre de secteurs (logements, bâtiments publics, transports, voirie, gestion de l’eau…). « Les effets à attendre sur l’activité et l’emploi d’une baisse aussi significative de l’investissement des collectivités locales sont naturellement très dépendants de la conjoncture économique, dont les prévisions pour 2025 ne sont guère réjouissantes », ajoutent Simon-Pierre Sengayrac et Johan Theuret. Et, si le Premier ministre a déjà annoncé des aménagements concernant les départements, ceux-ci sont soumis au fait de voter de nouvelles économies lors des débats budgétaires en cours au Sénat, observent-ils.


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