Aujourd’hui, d’après les données du ministère de l’Intérieur, 11 % des communes ont fait le choix de se doter d’une police municipale ou, parfois, intercommunale. Cette proportion monte à 82 % dans les communes de plus de 3 500 habitants et, au-delà de 10 000 habitants, le nombre de communes sans police municipale devient marginal, rapporte l’Observatoire des finances et de la gestion publiques locales (OFGL), qui consacre le 26e numéro de sa collection Cap sur, publié le 28 octobre 2024, aux enjeux financiers des polices municipales. En préambule, le président de l’Observatoire, André Laignel, rappelle que, « malgré l’essor de ces polices depuis au moins 20 ans, malgré leur professionnalisation croissante, malgré la progression de l’armement des policiers municipaux ou encore le développement de la vidéoprotection, peu de données centralisées permettent de rendre compte du fonctionnement des polices municipales et de leur impact budgétaire pour nos collectivités. » L’OFGL propose donc d’évaluer l’engagement financier que représente l’ensemble des polices municipales, tout en signalant les fortes disparités existantes entre les communes et les facteurs qui pourraient les expliquer.
L’étude montre que les dépenses de fonctionnement pour l’ensemble des polices municipales et intercommunales peuvent être estimées à 2,2 milliards d’euros en 2023. À périmètre constant, sur un échantillon de 1 446 communes, les dépenses de fonctionnement des polices municipales s’avèrent très dynamiques sur les deux dernières années, pointe l’OFGL. Tirées pour partie par la hausse des recrutements et les revalorisations du point d’indice, celles-ci ont augmenté d’environ 7,6 % en 2023, après une hausse record de 9 % en 2022. « En 6 ans, cette compétence a connu, là où elle est exercée, une montée en puissance près de trois fois supérieure à celle des autres politiques publiques en section de fonctionnement », constate l’Observatoire : + 33 % en moyenne depuis 2017, contre + 12 % pour les autres dépenses de fonctionnement. En conséquence, le poids des polices municipales dans les dépenses de fonctionnement totales des communes concernées a augmenté entre 2017 et 2023, passant de 3,1 % des dépenses de fonctionnement à 3,8 % en moyenne, « actant ainsi la priorité donnée à cette politique publique », commente l’OFGL.
Au sein de ces dépenses de fonctionnement des polices municipales, 91 % correspondent à des frais de personnel. Le niveau médian de dépenses s’élève ainsi à 36,5 euros par habitant en 2023. Rapporté aux effectifs d’agents municipaux en charge de la sécurité plutôt qu’aux habitants, le niveau de dépenses de fonctionnement médian par agent s’élève à environ 54 000 euros, a calculé l’Observatoire.
Outre les choix politiques propres à chaque municipalité, qui demeurent déterminants sur les modes d’organisation des polices municipales et leurs périmètres d’action, certains facteurs peuvent expliquer des niveaux plus élevés de charges. L’OFGL évoque ainsi la situation géographique de la commune, son caractère touristique, sa richesse potentielle, sa taille ou encore l’armement des agents.
Ces charges de fonctionnement s’accompagnent d’un besoin d’investissement récurent, compte tenu des équipements techniques nécessaires. En moyenne, les dépenses d’investissement peuvent être estimées a minima à 155 millions d’euros par an depuis 2018. Elles connaissent une hausse sensible depuis 2021, pour atteindre environ 260 millions d’euros en 2023. Ces dépenses d’investissement sont très diverses et si spécifiques aux polices municipales qu’elles sont pour partie difficilement classables dans les comptes de gestion, indique l’Observatoire. Toutefois, sur la période 2018-2023, quatre postes semblent représenter l’essentiel des efforts : la construction ou la rénovation de bâtiments, le matériel et outillage technique (dans lequel peuvent s’inscrire l’armement, mais aussi tous les autres équipements techniques nécessaires aux missions des polices municipales), les systèmes de vidéoprotection et les véhicules de transport.
« Loin de vouloir en faire un rapport sur l’efficacité de ces polices (les données existantes ne le permettraient de toute façon pas), l’objectivation des dépenses de polices municipales et de leurs fortes disparités doit nourrir le débat public sur l’organisation de la sécurité dans nos territoires », estime André Laignel. Pour le président de l’OFGL, « ces données doivent aussi nous alerter sur les dynamiques inflationnistes de ces dépenses de polices municipales, afin que le “continuum de sécurité” ne se transforme pas en transfert de charges asphyxiant pour les finances du bloc communal. »