Le principe de proportionnalité interdit l’exclusion d’un groupement en cas de modification de sa composition
Selon le droit européen, des marchés publics, « les groupements d’opérateurs économiques sont autorisés à soumissionner ou à se porter candidats. Pour la présentation d’une offre ou d’une demande de participation, les pouvoirs adjudicateurs ne peuvent exiger que les groupements d’opérateurs économiques aient une forme juridique déterminée, mais le groupement retenu peut être contraint de revêtir une forme juridique déterminée lorsque le marché lui a été attribué, dans la mesure où cette transformation est nécessaire pour la bonne exécution du marché ». En l’espèce, la législation italienne interdisait toute modification de la composition des groupements temporaires et des consortiums ordinaires de concurrents par rapport à celle résultant de l’engagement pris au cours de l’appel d’offre. Le manquement aux interdictions édictées au paragraphe précédent entraîne l’annulation de l’adjudication ou la nullité du contrat, ainsi que l’exclusion des concurrents réunis en groupement ou consortium ordinaire de concurrents concomitants ou postérieurs des procédures de passation du même marché. Selon la CJUE, le principe général de proportionnalité doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale excluant la possibilité, pour des membres originaires d’un groupement temporaire d’entreprises soumissionnaires, de se retirer de ce groupement, lorsque le délai de validité de l’offre présentée par ledit groupement vient à échéance et que le pouvoir adjudicateur sollicite la prorogation de la validité des offres qui lui ont été soumises. En imposant strictement le maintien de l’identité juridique et matérielle d’un groupement temporaire d’entreprises, la législation italienne porte manifestement atteinte au principe de proportionnalité.
Une modification soumise au respect du principe d’égalité de traitement
L’ancienne directive 2004 marchés publics autorise un opérateur économique le droit de faire valoir, d’une part, les capacités économiques et financières et, d’autre part, les capacités techniques et/ou professionnelles des participants au groupement ou d’autres entités, à condition de prouver au pouvoir adjudicateur que le groupement disposera des moyens nécessaires pour l’exécution du marché. Cette directive permet ainsi le cumul des capacités de plusieurs opérateurs économiques en vue de satisfaire aux exigences minimales de capacité fixées par le pouvoir adjudicateur, sous réserve que le candidat ou le soumissionnaire, qui se prévaut des capacités d’une ou de plusieurs autres entités, prouve au pouvoir adjudicateur qu’il disposera effectivement des moyens de ces dernières qui sont nécessaires à l’exécution du marché. Le principe d’égalité de traitement accorde aux soumissionnaires les mêmes chances dans la formulation des termes de leurs offres, ce qui implique que ces offres soient soumises aux mêmes conditions pour tous les soumissionnaires. L’obligation de transparence, qui en constitue le corollaire, a pour but de garantir l’absence de risque de favoritisme et d’arbitraire de la part du pouvoir adjudicateur. Cette obligation implique que toutes les conditions et les modalités de la procédure d’attribution soient formulées de manière claire, précise et univoque dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges, de façon, premièrement, à permettre à tous les soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents d’en comprendre la portée exacte et de les interpréter de la même manière et, deuxièmement, à mettre le pouvoir adjudicateur en mesure de vérifier effectivement si les offres des soumissionnaires correspondent aux critères régissant le marché en cause.
En conséquence, les membres d’un groupement temporaire d’entreprises peuvent, sans méconnaître le principe d’égalité de traitement, se retirer de ce dernier, pourvu qu’il soit établi, d’une part, que les membres restants de ce groupement satisfont aux conditions de participation à la procédure de passation de marché public définies par le pouvoir adjudicateur et, d’autre part, que la continuation de leur participation à cette procédure n’entraîne pas une détérioration de la situation concurrentielle des autres soumissionnaires.
Texte de référence : CJUE, 26 septembre 2024, Aff. C 403/23 et C 404/23