La ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse a signé, le 26 juin 2024, la circulaire de rentrée pour l’année scolaire 2024-2025. Ce texte précise l’ensemble des priorités fixées pour l’année scolaire à venir. Nicole Belloubet les résume à une seule : « assurer la cohésion sociale dans l’école et par l’école, pour ne laisser aucun élève sur le bord du chemin ». Cette exigence est au cœur du métier et de l’engagement professionnel de chaque personnel de l’Éducation nationale, insiste la ministre.
Réactiver l’école comme ascenseur scolaire et social
L’école de la République constitue « un vecteur d’ascension sociale grâce à l’engagement de ses professeurs et de l’ensemble des personnels. Mais nous pouvons encore, collectivement, faire mieux », assure Nicole Belloubet. En dépit d’une amélioration régulière depuis 5 ans, 27 % des élèves entrent en 6e avec une maîtrise insuffisante en français et 32 % en mathématiques. Les résultats au diplôme national du brevet, en apparence satisfaisants, présentent de fortes disparités territoriales, mais également une distorsion entre les résultats obtenus aux épreuves terminales et ceux du contrôle continu. « C’est pourquoi l’exigence pédagogique, notamment pour la transmission des savoirs fondamentaux, doit être notre boussole à tous les niveaux de l’institution scolaire. Elle est la condition première d’une réelle égalité des chances », peut-on lire dans la circulaire.
- Dans le premier degré : de l’école maternelle à l’école élémentaire
L’année scolaire 2024-2025 sera caractérisée par « trois évolutions substantielles. » À savoir :
– Une nouvelle manière d’enseigner les mathématiques et le français en cycle 1 et en cycle 2, pour l’ensemble des années concernées
Il s’agit notamment, en mathématiques, de modifier profondément la démarche didactique, autour du triptyque « manipuler, verbaliser, abstraire ». En français, la nécessaire pratique de la lecture et de l’écrit, conformément à la circulaire du 12 janvier 2023, doit constituer « notre repère commun. » Seule la pratique quotidienne, soutenue et systématique, à chaque niveau de l’école élémentaire, de la lecture et de l’écriture de lettres, de mots, puis de phrases et, enfin, de textes d’une longueur croissante, peut permettre de réduire les écarts scolaires et les inégalités qui leur sont attachés, est convaincue la ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse.
– Lancement d’une démarche de labellisation des manuels scolaires
Ouverte pour les manuels de CP et de CE1 en lecture, cette labellisation peut être sollicitée par les éditeurs pour certifier la conformité de leurs manuels aux programmes. « Elle permettra, sans être une condition obligatoire, de guider les professeurs dans le choix des manuels », précise la circulaire.
– Les évaluations nationales seront déployées en début d’année pour chaque niveau scolaire à l’école élémentaire comme au collège
Ces évaluations doivent permettre d’identifier, dès le début de l’année, le niveau de maîtrise des compétences des élèves et, aux équipes, de positionner leurs résultats en référence aux données nationales, académiques et départementales.
- Dans le second degré : au collège et au lycée
Le gouvernement affirme « une nouvelle ambition » pour le collège. Souvent dénoncé comme le lieu du « grand écart » entre les élèves les plus à l’aise et ceux en difficulté, le collège unique doit retrouver sa capacité à amener chaque élève au plus haut de ses aptitudes, plaide la ministre. Au programme :
– Des groupes de besoins en français et en mathématiques pour les élèves des classes de 6e et de 5e seront mis en place dès la rentrée 2024.
– Les conditions d’obtention du diplôme national du brevet seront révisées dès la session 2025 : ce sont les notes attribuées par les professeurs qui serviront au calcul de la note de contrôle continu, tandis que les épreuves terminales compteront désormais pour 60 % de la note finale.
– La réforme du lycée professionnel entre en vigueur, sur l’ensemble des niveaux.
– La découverte des métiers au collège est poursuivie, avec l’aide et le soutien des psychologues de l’Éducation nationale.
– Le stage de seconde, obligatoire pour tous les élèves en voie générale et technologique, est reconduit.
Lutter contre toutes les formes d’assignation
« Notre institution a pour mission de s’élever contre toutes les barrières sociales, géographiques ou culturelles qui freinent la réussite et l’ambition de nos élèves. Il en va de leur réussite personnelle, mais aussi de la pérennité d’un contrat social fondé sur l’émancipation individuelle et la cohésion nationale », explique la circulaire.
Pour l’année scolaire 2024-2025, le ministère de l’Éducation nationale prévoit donc de :
- Lever le frein de l’assignation sociale
– Poursuivre la revalorisation des internats, notamment des internats d’excellence ruraux. Dès cette nouvelle rentrée, 170 internats supplémentaires bénéficieront de la labellisation « internats d’excellence », dont 38 avec le soutien financier de l’État, à hauteur de 40 millions d’euros.
– Favoriser la diversification et l’excellence de l’offre éducative dans les établissements les moins favorisés ou les plus isolés.
– Débuter les travaux relatifs à la refonte de la carte de l’éducation prioritaire et poursuivre la politique d’ouverture sociale des établissements privés sous contrat, ainsi que des établissements publics les plus favorisés
- Assurer la pleine inclusion scolaire
– Poursuivre l’amélioration de la réponse aux familles d’élèves en situation de handicap.
– Renforcer le soutien aux professeurs.
– Assurer l’effectivité de la scolarisation des enfants concernés, notamment en améliorant le statut des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH).
- Émanciper les élèves et lutter contre les inégalités par la culture littéraire, scientifique, historique et artistique.
- Considérer l’école comme le lieu de la fabrique du citoyen et de lutte contre tous les stéréotypes.
- Faire progressivement entrer en vigueur les programmes d’enseignement moral et civique (EMC) révisés.
- Poursuivre la promotion de l’égalité entre les filles et les garçons.
- Respecter l’autorité des professeurs et lutter contre les différentes formes de violence.
La cohésion autour de l’école et de ses personnels
La circulaire pose un principe : « La cohésion que permet l’école doit présider à son propre fonctionnement : cohésion entre l’institution et ses personnels, notamment face aux violences ; cohésion de l’ensemble de la communauté éducative ; cohésion autour de ses valeurs ».
S’agissant de la protection des personnels, l’ensemble des recteurs, cadres académiques, inspecteurs et chefs d’établissements « doivent être guidés par une seule exigence : prévenir et agir pour protéger tous les personnels de l’éducation nationale, sans jamais minorer ou taire aucune atteinte, en lien étroit avec les services de sécurité et de la justice. La République repose sur ses professeurs et les professionnels de l’éducation, parce qu’ils l’incarnent et qu’ils lui dédient leur vie professionnelle, afin de permettre à chacun d’aller au plus haut de ses potentialités et de s’épanouir. Il ne peut donc y avoir ni lâcheté, ni faiblesse, ni tiédeur lorsque la sécurité, mais aussi la réputation de nos personnels, notamment sur les réseaux sociaux, sont mises en cause ». C’est le sens du plan ministériel déployé pour renforcer la sécurité des élèves, des personnels et des établissements scolaires.
- Dès la rentrée, une force mobile scolaire sera créée au niveau national pour apporter, en cas de crise, un appui et des renforts aux équipes académiques en moins de 24 heures.
- De même, les écoles et établissements, notamment en éducation prioritaire où ce processus est déjà en place, seront invités à constituer des réseaux d’appui éducatif au sein desquels les assistants d’éducation (AED) pourront participer à la sécurisation de l’ensemble des enceintes scolaires du premier et du second degrés.
- Enfin, au moyen de conventions locales devenues systématiques, les liens seront encore renforcés entre les services académiques, les forces de l’ordre et la Justice, « pour assurer le déploiement d’un véritable bouclier républicain autour de l’école et de tous les publics qu’elle accueille ».
La cohésion de l’institution implique également « une attention constante aux personnels de l’Éducation nationale et à leurs parcours de carrière ». La réforme de la formation initiale, qui permettra de recruter les étudiants en fin de L3 et de suivre un master professionnalisant sous un statut rémunéré, comme les évolutions de la formation continue constituent ainsi « un enjeu majeur ». Enfin, le ministère entend redonner aux écoles, aux établissements et aux équipes les marges de manœuvre dont ils ont besoin pour porter leurs projets et s’adapter au contexte et aux besoins de leurs élèves.
Construire dès à présent l’école du futur
« L’école est aussi la fabrique de notre avenir, ce qui implique non seulement qu’elle s’adapte, mais qu’elle anticipe les besoins de nos élèves comme de leurs familles dans une société et un monde en mutation de plus en plus rapide », poursuit la circulaire. C’est pourquoi l’année 2024-2025 verra plusieurs expérimentations ou travaux menés en ce sens.
- En premier lieu, l’école doit jouer un rôle déterminant dans l’usage raisonné des écrans et l’appropriation d’une culture numérique responsable.
- En second lieu, l’école du futur sera une école plus engagée dans la protection de l’environnement et la transition écologique. Exemple : le déploiement des aires éducatives, petits espaces naturels marins, forestiers ou fluviaux, dont la gestion est confiée à des classes, doit permettre aux élèves d’incarner leur action dans un territoire proche de leur école ou établissement. Actuellement au nombre de 1 200, ces aires ont vocation à se multiplier pour atteindre les 18 000 aires en 2030.
- Enfin, l’école du futur devra répondre aux attentes contemporaines et, parfois, aux angoisses, face à ces nouveaux défis. « Les transitions numériques et écologiques participent en effet d’une nouvelle forme d’anxiété, souvent sur fond de repli sur soi, dont nos élèves peuvent être victimes », prévient la circulaire. Les éléments disponibles sur la santé mentale des élèves montrent la persistance d’importantes difficultés et exigent « des actions résolues ». La première tient au renforcement des compétences psychosociales des élèves, aussi bien en termes de confiance en soi que de rapport aux autres. L’année scolaire 2024-2025 sera ainsi l’occasion de mettre en œuvre une feuille de route sur le développement de ces compétences, qui sera rendue publique d’ici la rentrée. La seconde tient à la revalorisation de la santé scolaire et de ses personnels – médecins, infirmiers, psychologues, mais aussi assistants sociaux. La revalorisation des infirmières et infirmiers de l’Éducation nationale ainsi que des conseillers et assistants de service social intervenue en 2024 sera complétée d’une mesure d’attractivité et de restructuration des grilles indiciaires des médecins scolaires. Des assises de la santé scolaire seront organisées pour « identifier les voies et moyens de consolider cette dimension essentielle de notre action ».