Analyse des spécialistes / Droits et obligations

L’employeur public pourrait-il déposer plainte au nom de l’agent, en lieu et place de l’agent victime ?

Publié le 18 février 2025 à 10h15 - par

Dans une proposition de loi relative à la protection des agents publics, n° 688, composée de quatre articles et déposée le mardi 3 décembre 2024, des députés ont souhaité élargir la protection fonctionnelle des agents. Ils voudraient également que l’employeur public puisse déposer plainte au nom de l’agent, en lieu et place de l’agent victime.

L'employeur public pourrait-il déposer plainte au nom de l'agent, en lieu et place de l'agent victime ?
© Par Richard Villalon - stock.adobe.com

Les députés partent du constat suivant : « cette violence, amplifiée par l’usage massif et souvent malveillant des réseaux sociaux, n’épargne aucun secteur de la fonction publique. Qu’il s’agisse des agents de l’État, des personnels hospitaliers ou des agents territoriaux, tous sont exposés à des actes d’intimidation, d’agression, voire de harcèlement. Ces attaques fragilisent non seulement les victimes directes, mais également la relation de confiance entre les citoyens et leurs institutions. Elles contribuent également à fragiliser les conditions de travail au sein de la fonction publique, ce qui peut accentuer l’absentéisme et, par ricochet, perturber le bon fonctionnement des services publics, avec des répercussions directes pour les usagers »1.

1. Une volonté de mise en place d’une plainte de l’employeur public au nom de l’agent

Dans l’exposé des motifs, les députés précisent que : « nous souhaitons que l’administration puisse, déposer plainte au nom de l’agent, en lieu et place de l’agent victime. Cette mesure répond à une demande forte des agents victimes, souvent réticents ou dans l’impossibilité de porter plainte eux-mêmes, en raison de pressions, de traumatismes ou d’un sentiment d’isolement »2.

2. Les infractions ouvrant la possibilité de plainte de l’employeur public au nom de l’agent

L’actuel article premier de la proposition de loi prévoit que lorsque l’employeur public a connaissance de faits susceptibles de constituer l’une des infractions prévues aux articles 222-9 à 222-13, 222-14-5 (violences), 222-15 (administration de substances nuisibles ayant porté atteinte à l’intégrité physique ou psychique d’autrui), 222-16 (appels téléphoniques malveillants réitérés, les envois réitérés de messages malveillants émis par la voie des communications électroniques ou les agressions sonores en vue de troubler la tranquillité d’autrui), 222-17 (menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes), 222-18 (menace), 322-1 et 322-3 (destruction, dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui, tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain), 433-3 (menace de commettre un crime ou un délit) et 433-3-1 (menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public, afin d’obtenir pour soi-même ou pour autrui une exemption totale ou partielle ou une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement dudit service) du Code pénal et lorsque cette infraction est commise à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public ou d’un professionnel de santé, à l’occasion de l’exercice ou en raison de ses fonctions, l’employeur, après avoir recueilli par tout moyen le consentement de la victime, peut déposer plainte au nom de la victime.

3. L’usage parallèle de l’article 40 du Code de la procédure pénale

Le second alinéa du premier article précise que si l’employeur public dépose plainte au nom de l’agent, cela ne dispensera pas celui-ci, l’agent ou l’officier public ou l’autorité constituée, des prescriptions du second alinéa de l’article 40.

4. La plainte au nom de l’agent ne donne pas à l’employeur public le statut de victime

Le troisième alinéa du premier article précise que l’ensemble de ces prescriptions ne donnent pas l’employeur la qualité de victime.

Ce texte est au début de son processus de discussion. À ce jour, il est impossible de savoir comment il sera enrichi, complété ou élagué.

Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public


1. Proposition de loi n° 688 relative à la protection des agents publics, exposé des motifs.

2. Ibidem.

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