Selon le juge administratif, en cours d’exécution du marché, la composition du groupement peut également être modifiée si l’un des membres est en situation d’insolvabilité suite à une mise en liquidation judiciaire.
Une modification de la composition possible sans nouvel appel public à la concurrence
La substitution, au cours de l’exécution d’un marché passé avec un groupement d’opérateurs économiques, lequel n’est pas doté de la personnalité juridique, d’un ou de plusieurs des membres de ce groupement par un ou plusieurs autres opérateurs économiques constitue une modification du titulaire du marché qui peut valablement avoir lieu sans mise en concurrence lorsque l’entreprise substituée était en situation d’insolvabilité formalisée par une mise en liquidation judiciaire. En l’espèce, une société a été substituée à un autre opérateur économique, placée en liquidation judiciaire, en tant que membre d’un groupement d’entreprises et en qualité de cocontractant de l’acheteur public. Il est constant que cette substitution a été effectuée sans publicité ni mise en concurrence. Selon le juge, alors qu’aucune autre modification substantielle n’a été constatée, cette substitution n’a pas été effectuée dans le seul but de soustraire le marché public aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Par suite, l’irrégularité alléguée par la société nouvellement admise dans le groupement sans publicité ni mise en concurrence, en méconnaissance du principe d’intangibilité du groupement, n’est pas établie. Au demeurant, alors qu’il ne résulte aucunement de l’instruction que cette absence de publicité et de mise en concurrence aurait été réalisée dans des circonstances frauduleuses, la substitution de la société à supposer même qu’elle constituât une irrégularité, n’est pas de nature à affecter la validité de la relation contractuelle entre l’acheteur et la société.
Les conséquences sur la mise en jeu au titre de la responsabilité décennale
Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d’épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d’ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n’apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables. La société intégrée dans le groupement était liée contractuellement avec l’acheteur et disposait, non pas de la qualité de sous-traitant, mais de la qualité de constructeur. Dans la mesure où la société était valablement liée avec le pouvoir adjudicateur par un contrat de louage d’ouvrage, elle n’est pas fondée à soutenir que l’acheteur ne pouvait rechercher sa responsabilité, sur le fondement de la garantie décennale. Par ailleurs, la circonstance que les travaux en litige aient fait l’objet d’une réception sans réserve ne fait pas obstacle, à ce que puisse être recherché la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale.
Texte de référence : Cour administrative d’appel de Nancy, 4e chambre, 14 mai 2024, n° 21NC02136, Inédit au recueil Lebon