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Quelles indemnités d’assurance pour les communes en cas de sinistre provoqué par une catastrophe naturelle ?

Publié le 13 novembre 2024 à 11h00 - par

Un texte, ratifié notamment par Mme Lavarde a été déposé au Sénat le 21 mai 2024. Le Sénat a adopté ce texte relatif au régime d’indemnisation des catastrophes naturelles et celui-ci est actuellement en discussion à l’Assemblée nationale1.

Quelles indemnités d'assurance pour les communes en cas de sinistre provoqué par une catastrophe naturelle ?
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Le député Vincent Ledoux, dans le cadre de sa mission sur le retrait-gonflement des argiles, a déclaré aux Assises de la sécheresse que : « les victimes et les maires que j’ai rencontrés estiment très majoritairement que les experts sont de mèche avec les assurances, que le système est verrouillé, et qu’ils ne s’en sortiront pas »2.

Pour pallier à cela, l’article 5 de la proposition de loi prévoyait initialement de rétablir le principe de liberté d’utilisation des indemnités d’assurance en cas de sinistre provoqué par une catastrophe naturelle, y compris s’agissant du phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA). Ce dispositif prévoyait également que les assurances notifient systématiquement aux maires les dommages constatés sur le territoire de leur commune pour lesquels il a été établi que la cause déterminante résultait du phénomène de retrait-gonflement des argiles3.

1. Le régime actuel de l’article L. 125-2 du Code des assurances

La quinzième phrase du quatrième alinéa de l’article L. 125-2 dispose ainsi que « pour ces sinistres, l’indemnité due par l’assureur doit être utilisée par l’assuré pour réparer les dommages consécutifs aux mouvements de terrain différentiels ». La deuxième partie de la phrase se réfère explicitement à l’exception circonscrite au principe de libre utilisation des indemnités d’assurance dommage prévue par l’article L. 121-17 du Code des assurances pour préciser que l’obligation d’affectation à laquelle sont désormais tenus les sinistrés victimes du phénomène de RGA est totale puisqu’elle s’impose « sans que cette utilisation ne soit subordonnée à l’adoption préalable de l’arrêté mentionné au troisième alinéa de l’article L. 121-17 ».

Selon le rapporteur de la commission des finances du Sénat : « s’il était appliqué de façon stricte, ce renversement du principe de libre affectation des indemnités d’assurance versée en cas de RGA priverait d’indemnisation un sinistré qui, plutôt que de réparer son bien endommagé sur place, prendrait la décision de s’installer ailleurs, dans une zone moins exposée à cet aléa »4.

2. Le nouveau régime de l’article L. 125-2 du Code des assurances

En somme, ces dispositions rétablissent non seulement la liberté d’utilisation des indemnités d’assurance allouées dans le cadre du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles suite à un sinistre provoqué par le phénomène de RGA, mais également que si dans le cadre du régime de catastrophe naturelle, après expertise, une assurance a établi que la cause déterminante d’un sinistre est bien le phénomène de RGA, celle-ci est tenue de notifier cette information au maire de la commune concernée dans un délai de trois mois.

D’une part, le texte adopté par le Sénat prévoit de modifier la deuxième phrase dudit article en ajoutant que : « L’assuré et l’assureur reçoivent de la part de l’expert l’ensemble du dossier consécutif au sinistre incluant, outre le rapport d’expertise, les études menées, les échanges bilatéraux avec l’assureur et l’assuré, les échanges avec les différentes parties de l’expertise ainsi que les comptes rendus des visites de chantier »5.

D’autre part, après la quinzième phrase dudit article, il est insérée la disposition suivante : « si le montant des travaux de réparation permettant la remise en état effective du bien est supérieur à la valeur de la chose assurée au moment du sinistre ou si les dommages consécutifs aux mouvements de terrain différentiels rendent le bâti inhabitable, cette obligation d’utilisation de l’indemnité ne s’applique pas »6.

Enfin, la notion de dérogation est supprimée. Il est même ajouté que « lorsqu’il est établi que des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols sont la cause déterminante d’un sinistre, l’assureur notifie l’information au maire de la commune concernée dans un délai de trois mois ».

Ce texte a encore un long parcours à faire devant l’Assemblée nationale dans un contexte où le budget est également en discussion.

Dominique Volut, Avocat-Médiateur au barreau de Paris, Docteur en droit public


1. Texte n° 612 (2023-2024) de Mme Christine Lavarde et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 21 mai 2024.

2. Rapport n° 61 (2024-2025), déposé au Sénat le 23 octobre 2024.

3. Exposés de motifs Texte n° 612 (2023-2024) Op. Cit.

4. Rapport n° 61 (2024-2025), Op. Cit.

5. Art. 5 du texte n° 13 (2024-2025) adopté par le Sénat le 29 octobre 2024.

6. Ibidem.

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