Organisation des élections : la Cour des comptes rend publiques ses observations définitives

Publié le 4 février 2025 à 14h50 - par

Dématérialisation de la propagande, intégration des adresses mail au répertoire électoral unique, suspension des radiations pour perte d’attache communale en cas de scrutin national… La Cour des comptes émet plusieurs recommandations sur les opérations électorales.

La Cour des comptes rend publiques des observations définitives sur l'organisation des élections
© Par Richard Villalon - stock.adobe.com

Alors que la démocratie représentative traverse une crise qui se caractérise par un taux d’abstention croissant, garantir la qualité de l’organisation des élections est essentiel, afin de préserver la sincérité des scrutins et de renforcer la confiance des citoyens, précise la Cour des comptes dans un rapport du 20 novembre 2024. Il faut notamment « préserver le vote à l’urne, sûr, simple et compréhensible », et « conforter la présence des magistrats au sein des commissions intervenant en matière électorale ».

En pratique, ce sont les communes qui organisent les opérations électorales : inscription sur les listes, envoi des cartes d’électeur, mise en place et tenue des bureaux de vote, dépouillement des bulletins et proclamation des résultats. Les maires agissent alors comme agents de l’État, sous l’autorité des préfets. Avec le répertoire électoral unique (REU), instauré en 2019, l’inscription sur les listes, plus souple, peut se faire jusqu’à six semaines avant l’élection. Cette réforme a facilité l’inscription en ligne et la demande de procurations. Le REU offre également de nombreux services aux communes : édition de la liste des électeurs à valider par la commission de contrôle, impression des listes d’émargement le jour du scrutin et fourniture des données nécessaires à l’impression des cartes électorales. Les préfectures l’utilisent pour envoyer la propagande électorale et, depuis le 1er janvier 2022, le REU gère les procurations et contribue à la mise en œuvre de leur déterritorialisation. Désormais, les électeurs peuvent en effet déposer en ligne leurs demandes d’inscription sur les listes électorales, quelle que soit leur commune de résidence.

La Cour pointe aussi les cas de « mal-inscription » qui touchent plutôt les jeunes, les personnes mobiles ou vulnérables. Il peut s’agir de personnes qui ont déménagé et choisi de ne pas se réinscrire dans leur nouvelle commune ou ont oublié, ou encore de citoyens qui ont le droit de s’inscrire dans plusieurs communes. Pour la Cour, il conviendrait d’encourager le changement d’adresse sur les listes et, à moyen terme, d’adopter un système intégré pour le faciliter.

Par ailleurs, la Cour préconise d’inclure les adresses électroniques dans le REU (seuls 24 % des électeurs y figurent). Les communes pourraient ainsi doubler le courrier recommandé aux électeurs qu’elles envisagent de radier d’un courriel qui aurait plus de chance d’atteindre son destinataire. C’est également nécessaire pour évoluer vers une dématérialisation, même partielle, de l’envoi de la propagande. Le rapport recommande de limiter l’envoi à domicile de la propagande papier, cher et peu écologique, en proposant la documentation en consultation sur un site web dédié. En outre, adresser aux électeurs un mail rappelant la tenue d’un scrutin, avec des liens vers le site des procurations, renforcerait la lutte contre l’abstention. Le formulaire Cerfa pourrait être modifié pour inciter les agents des mairies à demander que l’adresse électronique soit complétée.

Le maire peut radier tout au long de l’année les électeurs qui ne remplissent plus les conditions pour rester inscrits sur la liste électorale de la commune, à l’issue d’une procédure contradictoire. Selon l’Insee, 226 962 électeurs ont été radiés entre mai 2021 et mars 2022. Au préalable, le maire doit s’assurer que l’électeur ne remplit plus aucune des conditions lui permettant de demeurer inscrit. Une fois radié, l’électeur sort de la liste électorale de la commune, mais aussi du REU, tant qu’il ne se réinscrit pas sur une liste à laquelle il est autorisé à se rattacher. Or, le Code électoral n’interdit pas les radiations une fois passée la date limite d’inscription sur les listes électorales, ce qui crée un problème quand l’électeur est radié peu de temps avant une élection nationale et privé de toute inscription sur une liste électorale, par exemple pour l’élection présidentielle qui s’exerce dans le cadre d’une circonscription unique. Sans compter la difficulté d’informer les électeurs radiés ; la commune adresse le courrier contradictoire à l’adresse de rattachement figurant dans le REU, qui souvent ne correspond plus à l’adresse réelle. L’électeur n’étant pas informé de la procédure de radiation, il ne peut ni la contester ni procéder à sa réinscription. La Cour recommande donc de suspendre les radiations pour perte d’attache communale, dans la période qui s’étend entre la date limite d’inscription en vue d’une élection nationale et la tenue de cette élection.

Par ailleurs, les communes ont du mal à trouver des assesseurs pour composer leurs bureaux de vote. Elles peuvent, en ultime recours, faire appel au personnel municipal en le rémunérant, ce qui renchérit encore le coût du scrutin. L’État verse à la commune des frais d’assemblée forfaitaires qui n’ont pas été revalorisés depuis 2006 : 44,73 euros par bureau de vote et 0,10 euro par électeur inscrit au jour du scrutin. Le rapport précise que le ministère de l’Intérieur ne juge « pas pertinent d’ouvrir la possibilité à tout électeur d’un département d’exercer la fonction d’assesseur dans les bureaux de vote de n’importe quelle commune de ce département, ce qui conduirait à conférer au maire un pouvoir de désignation allant au-delà de sa commune ».

Marie Gasnier


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