Le numérique interroge les modalités de collaboration entre acteurs éducatifs
Situer le développement de la politique numérique au cœur de la coéducation est un sujet complexe. Il fait apparaître des enjeux fondamentaux pour notre système éducatif avec, d’une part, le problème de gouvernance partagée entre État et collectivité et, d’autre part, les modalités de collaboration et de partage entre acteurs, voire de mutualisation, mais aussi les problèmes d’inégalités territoriales.
Comme en matière de fournitures scolaires, l’équipement informatique des écoles n’est que de la compétence optionnelle des collectivités, soit pas une charge obligatoire. La décision de principe d’équiper les écoles avec du matériel informatique repose sur une volonté politique locale forte de développer le numérique dont le passage au B2I aura été un des supports des demandes de l’Éducation nationale. L’engagement local constitue un des leviers structurants d’une politique éducative locale globale.
Six points ont été retenus pour la réussite des projets numériques :
- La reconnaissance et le respect de l’ensemble des acteurs – encore faut-il se connaître !
- La définition de modes de collaboration – comment travaille-t-on ensemble ?
- Le partage d’un diagnostic initial.
- La définition d’objectifs partagés – lorsque ces 4 premiers points sont déjà pris en compte, c’est plus facile.
- Avoir des temps et des espaces de rencontre entre membres de la communauté éducative.
- Avoir des critères d’évaluation.
Pour nous, l’État doit :
- veiller au respect des équilibres territoriaux et à la lutte contre les inégalités,
- favoriser les innovations pédagogiques et encourager les volontés des acteurs de terrain,
- fixer des objectifs et développer un projet éducatif national numérique,
- mettre en place des conventions locales (académie, régions, département, intercommunalité, commune) pour organiser une coopération efficace,
- et laisser du temps au temps. Stop aux annonces multiples, pensons « développement durable » !
De leur côté, les collectivités territoriales doivent :
- développer un projet éducatif local global prenant en compte les bassins de vie ; c’est un espace territorial à préciser, qui est très différent entre les villes et les zones rurales. Chaque territoire a ses particularités, ses atouts – et je préfère parler de différences, plutôt que d’inégalités –, ces différences qui sont à la base de la richesse et de la diversité des territoires ;
- fédérer les initiatives au niveau local (enseignants, services, entreprises…) et animer des comités de pilotage locaux. Un exemple : les collèges et lycées ont des ENT, certaines écoles ont un ENT ; la mairie a un espace famille, qui prend également en compte le temps « hors scolaire » ; le Conseil général gère autrement et ailleurs la demi-pension, les transports scolaires, etc. Au final, les familles ont plusieurs identifiants différents, plusieurs cartes magnétiques ou à puce, différents sites pour se connecter alors qu’on parle de plus en plus de guichet unique à l’heure du numérique ! Il y a dans ce domaine encore beaucoup à faire.
Le numérique, un outil qui peut être un levier de changement
Il devrait permettre de mieux remplir certaines missions parfois moins connues telles que :
- l’enseignement à domicile,
- les enfants malades absents de l’école,
- les enfants nomades,
- les élèves handicapés, qu’ils soient accueillis à l’école ou dans les établissements spécialisés.
Et ainsi participer à la réussite de tous les élèves !
Le numérique, un outil parmi d’autres, mais qui mobilise les élus… et qui coûte relativement cher !
Les politiques numériques sont pour les élus un levier véritablement structurant d’une politique éducative locale globale. Ce n’est pas une politique en soi, mais une politique intégrée dans une politique éducative inscrite dans un projet éducatif du territoire. Développer le numérique pour eux est donc un vrai choix de politique éducative.
Les élus sont très attachés à leur école, les relations qu’ils entretiennent avec elle reposent sur des liens séculaires. Au-delà des demandes sociales et politiques en faveur de la proximité, ils ont conscience que des équipements de qualité peuvent aussi retenir les enseignants et les familles, et participent à l’attractivité des territoires.
Ils ont aussi l’ambition de donner aux élèves un enseignement et des moyens de très bon niveau, de permettre aux enfants, notamment dans les communes rurales, de vivre dans le XXIe siècle avec les mêmes chances que les enfants des communes urbaines.
Quant à l’outil numérique particulièrement, sachant qu’il peut améliorer la pédagogie et participer à l’apprentissage sous ces différentes formes, voire le faciliter, il devient un véritable enjeu :
- pour l’égalité des chances,
- pour la réussite scolaire : en développant le numérique et en mettant à disposition des outils performants, on développe du plaisir, mais aussi de l’appétence aux apprentissages, qui favorisent la réussite scolaire en réduisant les risques de décrochage,
- comme outil d’intégration sociale : tous les enfants partagent le même attrait pour les TICE. L’outil numérique leur donne les moyens de les mettre en confiance, de leur redonner le goût et l’envie d’apprendre.
Nicolas Debucquet
Secrétaire national de l’ANDEV
Livre blanc
L'éducation numérique, un enjeu majeur pour les collectivités
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