Dès janvier, l’Assemblée des départements de France (ADF) a recensé 25 départements ayant des difficultés à boucler leur budget. La Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) a confirmé récemment que plus des 2/3 des départements pourraient être dans ce cas à l’horizon 2011.
Première responsable : la crise économique. Les départements en ont subi dès 2008 les premiers effets avec la contraction du marché immobilier et la diminution du produit des droits de mutation (DMTO), qui représentaient en moyenne 15 % de leurs recettes de fonctionnement en 2007. De plus, parmi les dépenses sociales assumées par les départements, celles afférentes aux minima sociaux (RSA/RMI), qui représentaient en moyenne 23 % de leur budget de fonctionnement en 2008, sont sensibles aux évolutions du marché du travail.
« Pour autant, la conjoncture économique n’explique pas, à elle seule, la détérioration de la situation », soulignent les experts financiers. Pour les 15 départements qui présentaient, selon les données de la DGCL, les ratios de désendettement les plus dégradés en 2007, la détérioration de leur situation financière a été plus rapide que l’échelon dans son ensemble, alors même que la part des droits de mutation et celle des dépenses de RMI dans leur budget était inférieure d’environ deux points à la moyenne du secteur départemental. Les caractéristiques tant géographique, démographique qu’économique et social concourent certes à la fragilisation financière de ces 15 départements.
« Cependant, on peut difficilement dresser un portait type de cet échantillon tant ces caractéristiques sont disparates », poursuivent les analystes de Standard and Poor’s. Même si les décisions propres des conseils généraux en termes de fiscalité, d’investissement ou d’interventions ne relevant pas de leur domaine de compétences obligatoires sont régulièrement rendues responsables de la dégradation de leur ratio de solvabilité financière, il « apparaît que la détérioration de la situation financière des départements relève avant tout de l’évolution de leurs dépenses obligatoires et plus particulièrement de celle de leur financement », pointent les experts.
Depuis 2002, les départements se sont vus successivement attribués par l’État la gestion de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), du revenu minimum d’insertion (RMI) devenu revenu de solidarité active (RSA) et des prestations de compensation du handicap (PCH-ACTP). S’y ajoutent les charges afférentes aux personnels non-enseignant des collèges transférés à partir de 2007. « Depuis leur transfert, l’écart entre ces dépenses et le montant de leur compensation n’a cessé de se creuser », concluent les spécialistes. Une situation aggravée par la suppression de la taxe professionnelle, au volet des recettes, dans le cadre de la réforme du financement des collectivités territoriales.
Pour Claudy Lebreton, président de l’ADF : « Standard and Poor’s donne une mauvaise note au gouvernement ». Alors que celui-ci ne cesse de présenter la hausse des droits de mutations DMTO) pour 2010 comme solution à ces difficultés, l’agence de notation internationale rappelle que « une telle hausse des DMTO n’est probablement pas appelée à se répéter dans les prochaines années ».
Comme l’ADF le dit depuis des mois, seules des mesures structurelles règleront « l’asphyxie budgétaire » que subissent les départements. Le président Lebreton demande « expressément » au gouvernement d’ouvrir sans délais des négociations pour trouver des solutions pérennes et durables aux enjeux financiers des conseils généraux.
Le malaise semble général alors même que les débats parlementaires sur la réforme territoriale, qui est appelée à changer profondément le cadre institutionnel et financier des collectivités territoriales, laissent poindre de nouveaux sujets d’achoppement.
Alan Kerhel